Harcèlement moral : la Cour de cassation renforce la protection du salarié

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Opérant un revirement de jurisprudence, la Cour de cassation (Cass. soc. 19-4-2023, n° 21-21053) vient de décider que le salarié qui dénonce des faits de harcèlement moral ne peut pas être licencié pour ce motif, peu important qu’il n’ait pas qualifié ces faits de harcèlement moral lors de leur dénonciation.

1/ Le régime de protection

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (C. trav. art. L. 1152-1).

En complément de ce texte, le Code du travail prévoit qu’aucune personne ayant subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou ayant, de bonne foi, relaté ou témoigné de tels agissements ne peut faire d’une sanction, d’un licenciement ou, encore, d’une mesure discriminatoire (C. trav. art. L. 1152-2).

Le dispositif protecteur prévoit, enfin, que « toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul. »

A titre d’exemple, est nul le licenciement s’inscrivant dans le contexte d’agissements de harcèlement moral subis par le salarié et motivé par une faute grave artificiellement invoquée, dans le seul but de faire échec à la prohibition de la rupture du contrat de travail par l’employeur au cours d’une période de suspension du contrat de travail (Cass. soc. 11-2-2015, n° 13-26.198).

De même, une Cour d’appel annule, à bon droit, un licenciement après avoir constaté que le harcèlement moral était caractérisé et que le comportement reproché au salarié était une réaction aux agissements dont il avait été victime (Cass. soc. 29-6-2011, n° 09-69.444).

2/ Le déclenchement de la protection

Avant l’arrêt du 19 avril 2023, la Cour de cassation considérait que le salarié ne pouvait bénéficier de la protection légale contre le licenciement tiré d’un grief de dénonciation de faits de harcèlement moral que s’il avait lui-même qualifié les faits d’agissements de harcèlement moral (Cass. soc. 13-9-2017, n° 15-23.045).

Ainsi, pour bénéficier de la protection contre les agissements répréhensibles qu’il dénonçait, le salarié devait revendiquer expressément, formellement, la qualification de harcèlement moral.

Pour autant, la protection n’était pas absolue et était refusée au salarié ayant connaissance du caractère fallacieux des faits qu’il dénonçait ou prétendait avoir subi.

A titre d’illustration, constitue une faute grave le fait, pour un salarié, de dénoncer de façon mensongère des faits inexistants de harcèlement moral dans le but de déstabiliser l’entreprise et de se débarrasser de son supérieur hiérarchique (Cass. soc. 6-6-2012 n° 10-28.345).

Dans le même sens, est justifié le licenciement d’un salarié ayant invoqué un harcèlement moral de mauvaise foi, alors qu’il refusait de rendre des comptes à sa hiérarchie, faisait preuve d’un comportement insolent, et entretenait une attitude de dénigrement envers l’entreprise (Cass. soc. 7-5-2014 n° 13-14.344).

Postérieurement, la Cour de cassation énonçait que l’absence éventuelle, dans la lettre de licenciement de mention de la mauvaise foi avec laquelle le salarié avait relaté des agissements de harcèlement moral n’était pas exclusive de la mauvaise foi de l’intéressé, laquelle pouvait être alléguée par l’employeur devant le juge (Cass. soc. 16-9-2020, n° 18-26.696).

Dans son arrêt du 19 avril 2023, la Cour de cassation considère désormais que :

– « Le salarié qui dénonce des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, peu important qu’il n’ait pas qualifié lesdits faits de harcèlement moral lors de leur dénonciation, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce. »

En l’espèce, une salariée, licenciée pour faute grave, avait adressé, au conseil d’administration d’une association, une lettre pour dénoncer le comportement d’un supérieur, en l’illustrant de plusieurs faits ayant entraîné, selon elle, une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé.

Pour la Cour de cassation, ayant estimé que la mauvaise foi de la salariée n’était pas démontrée, la Cour d’appel en a déduit à bon droit que le grief tiré de la relation par l’intéressée d’agissements de harcèlement moral emportait à lui seul la nullité du licenciement.

L’arrêt du 19 avril 2023 constitue donc un revirement, comme l’ont d’ailleurs expliqué le conseiller rapporteur et l’avocat général ayant traité cette affaire.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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