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Dans certaines situations, jugées graves par le législateur, le licenciement du salarié peut être annulé par le Conseil de prud’hommes. La nullité du licenciement emporte des conséquences particulières, parmi lesquelles figure la réintégration du salarié.
1. Les cas de nullité du licenciement
Les cas de nullité, au nombre de six, sont ceux qui sont afférents à (C. trav. art. L. 1235-3-1) :
1° La violation d’une liberté fondamentale ;
2° Des faits de harcèlement moral ou sexuel ;
3° Un licenciement discriminatoire ;
4° Un licenciement consécutif à une action en justice en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ou à une dénonciation de crimes et délits ;
5° Un licenciement d’un salarié protégé en raison de l’exercice de son mandat ;
6° Un licenciement d’un salarié en méconnaissance des protections liées à la grossesse, la maternité, la paternité, l’adoption et l’éducation des enfants ou à un accident du travail ou une maladie professionnelle.
A côté de ce texte général, d’autres dispositions spécifiques envisagent la nullité du licenciement.
Exemples :
– En cas d’annulation d’une décision de validation ou d’homologation en raison d’une absence ou d’une insuffisance de PSE (C. trav. art. L. 1235-10).
– En cas de licenciement du salarié d’un établissement médico-social ayant témoigné de mauvais traitements ou de privations infligés à une personne accueillie (CASF art. L. 313-24).
En vertu du principe « pas de nullité sans texte », le juge ne peut pas annuler le licenciement du salarié à défaut de dispositions légales prévoyant cette faculté.
Ainsi, la méconnaissance par l’employeur du droit du salarié à une action de formation professionnelle après un congé parental n’ouvre pas droit à l’annulation de son licenciement pour insuffisance professionnelle après son congé (Cass. soc. 5-3-2014 n° 11-14.426).
Le principe « pas de nullité sans texte » connaît cependant un tempérament lors de la violation d’une liberté fondamentale.
En effet, s’il s’agit bien d’un cas de nullité prévu par la loi, il revient à la jurisprudence de déterminer la notion de violation d’une liberté fondamentale.
Pour la Cour de cassation, est nul le licenciement du salarié motivé par la demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail (Cass. soc. 3-2-2016 n° 14-18.600), fondé sur le contenu d’une attestation délivrée par un salarié au bénéfice d’un autre (Cass. soc. 29-10-2013 n° 12-22.447) ou, encore, lié à l’exercice légitime par le salarié du droit de retrait de son poste dans une situation de danger (Cass. soc. 28-1-2009 n° 07-44.556).
2. Les conséquences de la nullité du licenciement
2.1. La réintégration du salarié
Lorsque son licenciement est nul, le salarié a le droit de réclamer sa réintégration dans son emploi (Cass. soc. 21-6-2017 n° 15-21.897).
Il s’agit d’une simple option et le salarié n’est tenu ni d’accepter la réintégration proposée par l’employeur, ni de la solliciter (Cass. soc. 16-2-1987 n° 84-42.569).
En cas de nullité du licenciement, l’employeur est tenu de faire droit à la demande de réintégration du salarié (Cass. soc. 14-2-2018 n° 16-22.360), dès lors qu’aucune impossibilité d’y procéder n’est établie (Cass. soc. 25-2-1998 n° 95-44.019).
D’ailleurs, le juge des référés est compétent pour ordonner, sous astreinte, la réintégration du salarié, par exemple, en cas de licenciement d’un représentant du personnel notifié en l’absence d’autorisation de l’inspecteur du travail (Cass soc. 13-5-1981 n° 80-10.703).
La réintégration implique de restaurer le salarié dans son poste ou, à défaut, dans un emploi équivalent (Cass. soc. 26-5-2004 n° 02-41.325).
NB. L’obligation de réintégration ne s’étend pas au groupe auquel appartient l’employeur (Cass. soc. 9-7-2008 n° 07-41.845).
Le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d’une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s’est écoulée entre la rupture et sa réintégration, dans la limite du montant des salaires dont il a été privé (Cass. soc. 3-7-2003 n° 01-44.522).
Cette somme, soumise à cotisations sociales, doit tenir compte des revenus de remplacement (allocations Pôle Emploi, indemnités journalières de sécurité sociale, etc.) perçus par le salarié entre son licenciement et sa réintégration (Cass. soc. 16-10-2019 n° 17-31.624).
Par exception, le salarié a droit à une réparation forfaitaire, correspondant aux salaires afférents à la période comprise entre son licenciement et sa réintégration, sans déduction des revenus qu’il a pu percevoir pendant cette période, lorsque la nullité du licenciement résulte de l’atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement protégée.
Tel est le cas, par exemple, du licenciement motivé par les activités syndicales du salarié (Cass. soc. 2-6-2010 n° 08-43.277), par sa participation à une grève (Cass. soc. 2-2-2006 n° 03-47.481) ou par son action en justice (Cass. soc. 21-11-2018 n° 17-11.122).
2.2. Les sanctions en l’absence de réintégration
Lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des 6 derniers mois (C. trav. art. L. 1235-3-1).
Pour la Cour de cassation, le salarié a droit, d’une part, aux indemnités de rupture et, d’autre part, à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, au moins égale à 6 mois de salaire quelles que soient son ancienneté et la taille de l’entreprise (Cass. soc. 30-11-2010 n° 09-66.210).
Les indemnités de rupture sont, classiquement, l’indemnité de licenciement légale, conventionnelle ou contractuelle (C. trav. art. L. 1235-3-1) et l’indemnité compensatrice de préavis, due au salarié même s’il est dans l’impossibilité physique d’exécuter son préavis (Cass. soc. 5-6-2001 n° 99-41.186).
Quant à l’indemnité pour rupture illicite, celle-ci n’est pas plafonnée et son montant est souverainement apprécié par le juge du fond (Cass. soc. 18-12-2000 n° 98-41.608).
Ainsi, le barème « Macron » prévoyant une indemnité encadrée par des planchers et des plafonds, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, n’est pas applicable en cas de nullité du licenciement (C. trav. art. L. 1235-3-1).
Enfin, le salarié protégé peut solliciter, outre les indemnités de licenciement, de préavis et de rupture illicite, une indemnité pour violation du statut protecteur.
Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com
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