La preuve des heures supplémentaires facilitée

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Dans plusieurs décisions récentes, la Cour de cassation confirme sa jurisprudence favorable au salarié au sujet de l’administration de la preuve des heures supplémentaires. Elle invite l’employeur à ne pas négliger ce qui constitue, souvent, un risque judiciaire significatif. 

1/ Un principe de partage de la preuve

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié (C. trav. art. L. 3171-4, al. 1).

Le texte ajoute qu’au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles (C. trav. art. L. 3171-4, al. 2).

Le Code du travail a donc prévu un partage de la charge de la preuve, entre les parties, en matière d’heures supplémentaires.

Le salarié, demandeur à l’instance, doit présenter des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies (Cass. soc. 18-3-2020 n° 18-10.919).

L’employeur, pour sa part, doit être en mesure de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié dans la limite de la prescription applicable aux salaires (Cass. soc. 13-2-2002 n° 00-40.836).

Ce régime de partage de la preuve s’applique également aux litiges portant :

– sur les heures complémentaires effectuées par les salariés à temps partiel (Cass. soc. 13-12-2000 n° 98-46.054) ;

– sur les heures effectuées les dimanches et jours fériés (Cass. soc. 12-10-2004 n° 02-41.289) ;

– sur l’existence ou le nombre de jours travaillés dans le cadre d’une convention de forfait en jours (Cass. soc. 7-12-2010 n° 09-42.626).

En revanche, les dispositions de l’article L. 3171-4 du Code du travail relatives à la répartition entre employeur et salarié de la charge de la preuve des heures de travail effectuées ne sont pas applicables à la preuve du respect des durées maximales de travail, qui incombe à l’employeur (Cass. soc. 23-5-2017 n° 15-24.507).

2/ Une jurisprudence favorable au salarié

Depuis longtemps, la Cour de cassation énonce que « la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties » (ex. Cass. soc. 24-4-2003 n° 00-44.653).

Elle ajoute qu’il appartient cependant au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande en paiement d’heures supplémentaires (Cass. soc. 25-2-2004 n° 01-45.441).

La notion de demande « étayée » est beaucoup plus souple que celle de demande « prouvée » ou « établie. »

En effet, pour la Cour de cassation, le juge ne peut pas rejeter une demande en paiement d’heures complémentaires au motif que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de celle-ci (Cass. soc. 10-5-2007 n° 05-45.932).

Ainsi, un décompte hebdomadaire n’est pas obligatoire pour étayer une demande en paiement d’heures supplémentaires (Cass. soc. 4-9-2019 n° 18-10.541).

La jurisprudence est relativement favorable au salarié dans l’administration de la preuve, admettant notamment :

– un décompte d’heures, calculé mois par mois, sans explication ni indication complémentaire (Cass. soc. 24-11-2010 n° 09-40.928) ;

– un agenda personnel, étayé par des attestations de collègues (Cass. soc. 8-12-2010 n° 09-66.138) ;

– un décompte des horaires de prise de poste et de fin de service, même en l’absence d’indications d’éventuelles pauses méridiennes (Cass. soc. 27-1-2021 n° 17-31.046).

Dans un arrêt du 5 janvier 2022 (Cass. soc. 5-1-2022, n°20-16.172), la Cour de cassation a censuré un arrêt ayant rejeté, comme preuve des heures supplémentaires d’un directeur commercial, « des feuilles d’enregistrement des heures de travail faisant apparaître une amplitude de 9 heures par jour et sur une base de 45 heures, sans toutefois faire mention du début et de la fin de la journée de travail ni préciser l’amplitude des pauses déjeuner. »

Dans autre affaire ayant donné lieu à un arrêt du 16 mars 2022 (Cass. soc. 16-3-2022, n° 21-10210), le salarié produisait des tableaux relatifs à des heures complémentaires et supplémentaires, établis par mois et non par semaine.

Pour la Cour d’appel de Grenoble (2 juillet 2019), ces éléments étaient « inexploitables » puisque les heures supplémentaires se décomptent sur la semaine.

L’arrêt est cassé par la Cour de cassation, qui juge que « le salarié communiquait des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre. »

C’est d’ailleurs la même formulation qui est retenue dans l’arrêt du 5 janvier 2022.

Enfin, la Cour relève que l’employeur était soumis aux dispositions de l’article R. 713-36 du Code rural et de la pêche maritime selon lesquelles :

– L’employeur doit enregistrer, chaque jour, sur un document prévu à cet effet, le nombre d’heures de travail effectuées par chaque salarié, ou groupe de salariés, ou les heures de début et de fin de chacune de leurs périodes de travail.

– Une copie du document doit être remise à chaque salarié, en même temps que sa paye.

En définitive, la jurisprudence exige de l’employeur qu’il produise des éléments probants permettant de contester ceux du salarié.

Cette solution est logique dans la mesure où le Code du travail impose à l’employeur de contrôler la durée de travail du salarié, ce qui implique l’établissement de documents de décompte (C. trav. art. L. 3171-1).

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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