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Le licenciement pour inaptitude, d’origine professionnelle ou non, est motivé par l’inaptitude du salarié et l’impossibilité de le reclasser. Toutefois, la rupture est sans cause réelle et sérieuse, voire nulle, si l’inaptitude a pour origine un manquement de l’employeur.
1/ L’inaptitude consécutive à un accident du travail
Pour la Cour de cassation, est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu’il est démontré que celle-ci était consécutive « à un manquement préalable de l’employeur qui l’a provoquée. »
Tel est le cas du salarié victime d’un accident du travail alors que l’employeur n’a pas respecté l’obligation de sécurité à laquelle il est soumis (Cass. soc. 3-5-2018 n° 17-10.306).
La juridiction prud’homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail et pour allouer, le cas échéant, une indemnisation au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 3-5-2018 n° 16-26.850).
L’employeur ne peut donc pas soutenir qu’une telle action serait du ressort du tribunal judiciaire, car liée à l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail.
La Cour de cassation avait déjà jugé qu’en présence d’une telle faute de l’employeur, le licenciement pour inaptitude est sans cause réelle et sérieuse, et ce même si l’employeur a respecté son obligation de reclassement (Cass. soc. 26-9-2012 n° 11-14.742).
2/ L’inaptitude causée par un harcèlement moral
Est nul le licenciement en lien avec une inaptitude ayant pour seule origine un état dépressif réactionnel aux agissements de harcèlement moral dont le salarié avait été la cible (Cass. soc. 13-2-2013 n° 11-26.380).
Cette solution s’applique même si l’avis d’inaptitude n’évoque pas le harcèlement mais constate seulement l’aptitude de la salariée à un poste de reclassement « au sein de l’administration commerciale de l’entreprise, sans indication de lieu ni des raisons justifiant l’inaptitude au poste initial. »
En d’autres termes, il appartient au juge du fond, en fonction des éléments de fait et de preuve qui lui sont soumis par les parties, de déterminer s’il existe un lien suffisant entre le harcèlement moral et l’inaptitude du salarié.
Cette jurisprudence rejoint celle développée par la Cour de cassation au sujet du licenciement pour absence prolongée ou absences répétées.
Ainsi, l’employeur ne peut pas se prévaloir de la perturbation du fonctionnement de l’entreprise causée par l’absence prolongée du salarié lorsque cette dernière est la conséquence du harcèlement moral dont l’intéressé avait été victime (Cass. soc. 11-10-2006 n° 04-48.314).
Dans de telles situations, la nullité du licenciement est encourue sur le fondement de l’article L. 1235-3-1 du Code du travail, visant le harcèlement moral et sexuel.
Par ailleurs, l’article L. 1152-3 du Code du travail prévoit expressément que toute rupture du contrat du travail qui résulte d’un harcèlement moral est nulle.
Le barème Macron n’est donc pas applicable en l’occurrence.
3/ L’inaptitude liée à l’absence de prise en compte des préconisations du médecin du travail
Constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse la rupture du contrat notifiée par l’employeur qui n’a pas pris en considération les propositions du médecin du travail en vue du reclassement de l’intéressé à la suite de la déclaration de son inaptitude (Cass. soc. 17-12-2003 n° 01-44.444).
De même, l’absence de prise en compte des préconisations du médecin du travail entraînant une aggravation de l’état de santé du salarié, et conduisant à son inaptitude définitive, prive son licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 17-10-2012 n° 11-18.648).
L’employeur doit être particulièrement vigilant concernant le suivi médical des salariés.
A titre d’exemple, l’absence de visite de reprise à la suite d’un précédent arrêt de travail constitue un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité en lien avec l’inaptitude du salarié constatée ultérieurement et prive de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude (Cass. soc. 11-12-2013 n° 12-22.248).
4/ Le cas du salarié protégé
Il n’entre pas dans le champ de contrôle de l’inspecteur du travail, saisi d’une demande d’autorisation de licenciement pour inaptitude d’un salarié protégé, d’apprécier les causes de l’inaptitude médicalement constatée (CE, 20-11-2013 n° 340.591).
Cette solution a été rappelée par l’administration dans le guide relatif aux décisions administratives en matière de rupture ou de transfert du contrat de travail des salariés protégés de septembre 2019 (mis à jour en décembre 2021).
Il en résulte qu’une décision administrative autorisant ou refusant le licenciement d’un salarié sur ce point serait entachée d’illégalité (CAA Nantes, 14-4-2011 n° 09NT01319).
En revanche, le salarié protégé reconnu inapte et licencié après autorisation de l’inspecteur du travail, qui invoque un lien entre son licenciement pour inaptitude et un manquement de l’employeur, peut saisir le Conseil de prud’hommes de ce chef (CE, 20-11-2013 n° 340.591).
Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com
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