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La période d’essai permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent (C. trav. art. L. 1221-20).
Lorsque l’employeur met fin à la période d’essai, il doit être particulièrement vigilant sur la motivation de sa décision.
1/ La rupture de la période d’essai : un droit discrétionnaire
Selon l’article L. 1231-1 du Code du travail, le CDI peut être rompu à l’initiative de l’employeur ou du salarié, ou d’un commun accord, « dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre. » L’alinéa 2 du texte dispose que ces dispositions ne sont pas applicables pendant la période d’essai.
En d’autres termes, les parties n’ont pas à motiver leur décision de rompre l’essai (Cass. soc. 20-10-2010, n° 08-40.822 : « Durant la période d’essai, chacune des parties dispose en principe d’un droit de résiliation unilatéral, sans avoir à alléguer de motif »).
D’ailleurs, une cause réelle et sérieuse justifiant la rupture n’est pas exigée (Cass. soc. 13-11-1985, n° 84-41.104). Dans cet arrêt, la Cour de cassation a jugé que l’employeur n’avait pas à démontrer l’existence de l’insuffisance professionnelle invoquée à l’égard du salarié.
Sur le plan du formalisme, sauf dispositions conventionnelles contraires, les parties ne sont soumises à aucune obligation particulière, sous réserve du respect du délai de prévenance à respecter en fonction de l’auteur de la rupture.
Bien entendu, pour des raisons probatoires, la partie qui entend mettre fin à l’essai a tout intérêt à le manifester par lettre recommandée avec AR ou remise en mains propres contre décharge (mentionnant – ceci est essentiel – la date de remise).
2/ Surtout ne pas motiver la rupture de la période d’essai
De bonne foi, certains employeurs explicitent au salarié, par écrit, les motifs pour lesquels ils ont décidé de ne pas poursuivre la relation contractuelle. Or, une telle motivation écrite peut se retourner contre l’employeur.
La Cour de cassation considère, en effet, que la période d’essai étant destinée à permettre à l’employeur d’apprécier la valeur professionnelle du salarié, la résiliation du contrat de travail intervenue au cours de cette période pour un motif non inhérent à la personne du salarié est abusive (Cass. soc. 20-11-2007, n° 06-41212).
Ainsi, même en l’absence de toute discrimination, la rupture de la période d’essai peut être sanctionnée par le Conseil de prud’hommes, si elle est étrangère à l’évaluation des compétences du salarié dans son travail.
A titre d’exemple, est abusive la rupture de la période d’essai en raison de la fermeture d’un établissement (CA Metz 7-06-2010, n° 08-1871).
De même, revêt un caractère abusif la rupture de la période d’essai motivée par l’incapacité de l’employeur d’acquitter les salaires, en raison des difficultés économiques de l’entreprise (CA Versailles 27-01-1999, n° 98-21508). Dans de telles situations, il est manifeste que les qualités professionnelles du salarié sont étrangères à la décision de l’employeur…
De même, si ce dernier justifie la fin de l’essai en raison d’une faute du salarié, il doit respecter la procédure disciplinaire (Cass. soc. 14-5-2014, n° 13-13.975 : « Pour débouter le salarié de ses demandes, le jugement relève que l’employeur avait mis fin au contrat de travail pour insubordination et retient que l’inobservation du lien de subordination peut être constitutive d’une faute ; en se déterminant ainsi, sans rechercher si la procédure disciplinaire avait été respectée, le conseil de prud’hommes n’a pas donné de base légale à sa décision »).
3/ Conséquences financières de la rupture abusive de la période d’essai
Sur le plan indemnitaire, la rupture abusive de la période d’essai ouvre droit à des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié « victime » (Cass. soc. 16-2-2005, n° 02-43.402), mais ne s’analyse pas en un licenciement abusif permettant l’octroi d’une indemnité pour licenciement abusif et d’une indemnité compensatrice de préavis (Cass. soc. 12-9-2018, n° 16-26.333).
La Cour de cassation considère que le juge ne peut pas condamner l’employeur à indemniser le salarié pour rupture abusive pendant la période d’essai sans matérialiser les faits constitutifs de l’abus ni caractériser un préjudice.
En effet, en principe, la rupture en cours d’essai n’entraîne pas l’allocation de dommages-intérêts (Cass. soc. 5-12-1984, n° 84-41.183).
En définitive, l’employeur a tout intérêt à ne pas motiver la lettre par laquelle il met fin à l’essai, ce qui ne le dispense pas – pour des raisons évidentes de loyauté – de communiquer avec le salarié lors d’un entretien sur le sujet.
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