Vidéosurveillance des salariés : les conditions de mise en place

Vidéosurveillance des salariés : les conditions de mise en place

Vidéosurveillance des salariés : les conditions de mise en place 1709 2560 sancy-avocats.com

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Dans un arrêt du 8 mars 2023 (Cass. soc. 8-3-2023, n° 21-17.802), la Cour de cassation rappelle que l’utilisation d’images de vidéosurveillance, obtenues de manière illicite, est parfois possible. Cette décision offre l’occasion de revoir les conditions de mise en place de la vidéosurveillance dans l’entreprise.

1/ La vidéosurveillance dans les lieux de travail ouverts au public

Le recours à la vidéosurveillance dans les lieux de travail ouverts au public (restaurant, cinéma, supermarché,…) est régi par les articles L. 251-1 et suivants du Code de la sécurité intérieure.

Les textes prévoient plusieurs cas de recours à la vidéosurveillance, notamment pour assurer la sécurité des personnes et des biens lorsque ces lieux sont particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol ou sont susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme.

L’installation d’un tel dispositif est subordonnée à une autorisation du préfet et, à Paris, du préfet de police, donnée après avis d’une commission départementale présidée par un magistrat du siège ou un magistrat honoraire.

L’autorisation implique que le public soit informé de manière claire et permanente de l’existence du système de vidéosurveillance et de l’autorité ou de la personne responsable.

Par ailleurs, le CSE doit être informé et consulté, préalablement à la décision de mise en œuvre de la vidéosurveillance, dans la mesure où celle-ci permet un contrôle de l’activité des salariés (C. trav. art. L. 2312-38, al. 3).

Enfin, chaque salarié doit être individuellement informé, conformément à l’article L. 1222-4 du Code du travail selon lequel :

– « Aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance. »

2/ La vidéosurveillance dans les lieux de travail non ouverts au public

Le recours à la vidéosurveillance doit respecter le principe énoncé à l’article L. 1121-1 du Code du travail selon lequel nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.

La mise en œuvre d’un système de vidéosurveillance doit nécessairement respecter ce principe de proportionnalité, ce qui signifie qu’elle doit s’effectuer de façon adéquate, pertinente, non excessive et strictement nécessaire à l’objectif poursuivi.

Ainsi, la vidéosurveillance ne peut avoir pour seul but de contrôler l’activité professionnelle des salariés.

A titre d’exemple, la surveillance vidéo constante d’un salarié qui exerce son activité seul en cuisine constitue une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle (Cass. soc. 23-6-2021, n° 19-13.856).

Par ailleurs, le CSE doit être informé et consulté préalablement – et les salariés individuellement informés – dans les conditions susvisées (cf. § 1).

Les salariés doivent également être prévus de l’existence de dispositifs de vidéosurveillance sur les sites tiers où ils interviennent.

La Cour de cassation considère, en effet, que l’employeur ne peut pas être autorisé à utiliser, comme mode de preuve, les enregistrements d’un dispositif de vidéosurveillance installé sur le site d’une société cliente, si les salariés n’ont pas été préalablement informés de l’existence de ce dispositif (Cass. soc. 10-01-2012, n° 10-23.482).

En principe, il est interdit de licencier un salarié pour un vol découvert au moyen d’une vidéosurveillance illicite (Cass. soc. 20-9-2018, n° 16-26.482).

Dans l’arrêt du 8 mars 2023, la Cour de cassation tempère cette jurisprudence, prescrivant qu’en présence d’une preuve illicite, le juge doit d’abord s’interroger sur la légitimité du contrôle opéré par l’employeur et vérifier s’il existait des raisons concrètes qui justifiaient le recours à la surveillance et l’ampleur de celle-ci.

Ainsi, si la production des enregistrements litigieux est indispensable à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur, et que celui-ci ne dispose pas d’un autre moyen de preuve, les images de vidéosurveillance peuvent être produites en justice.

3/ La durée de conservation des images

L’employeur doit définir la durée de conservation des images issues des caméras, qui doit être en lien avec l’objectif poursuivi par la vidéosurveillance.

En principe, cette durée ne doit pas excéder pas un mois.

Selon la CNIL, en règle générale, conserver les images quelques jours doit suffire, sauf circonstances exceptionnelles, à effectuer les vérifications nécessaires en cas d’incident et permet d’enclencher d’éventuelles procédures disciplinaires ou pénales.

Si de telles procédures sont engagées, les images sont alors extraites du dispositif (après consignation de cette opération dans un cahier spécifique) et conservées pour la durée de la procédure.

En tout état de cause, la durée maximale de conservation des images ne doit pas être fixée en fonction de la seule capacité technique de stockage de l’enregistreur.

4/ Les exigences liées au RGPD

Les personnes concernées (salariés, fournisseurs, clients,…) doivent être informées, au moyen de panneaux affichés en permanence, de façon visible, dans les lieux concernés, que le lieu est placé sous vidéoprotection.

L’information doit comprendre a minima, outre le pictogramme d’une caméra :

– Les finalités du traitement installé ;

– La durée de conservation des images ;

– Le nom ou la qualité et le numéro de téléphone du responsable/du délégué à la protection des données (DPO) ;

– L’existence de droits « Informatique et Libertés » ;

– Le droit d’introduire une réclamation auprès de la CNIL, en précisant ses coordonnées ;

– La base légale du traitement ;

– Les destinataires des données personnelles, y compris ceux établis en dehors de l’UE ;

– Enfin, s’il y en a, les informations complémentaires qui doivent être portées à l’attention de la personne (prise de décision automatisée, profilage, etc.).

Ces informations sont prévues par l’article 13 du RGPD (Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données).) et l’article 104 de la loi « Informatique et Libertés ».

Si l’employeur a désigné un DPO, celui-ci doit être associé à la mise en œuvre du dispositif.

La désignation d’un délégué est obligatoire pour :

– Les autorités ou les organismes publics, à l’exception des juridictions dans l’exercice de leurs fonctions juridictionnelles ;

– Les organismes dont les activités de base les amènent à réaliser un suivi régulier et systématique des personnes à grande échelle ;

– Les organismes dont les activités de base les amènent à traiter à grande échelle des données dites « sensibles » ou relatives à des condamnations pénales et infractions.

Enfin, le système de vidéosurveillance doit être inscrit au registre des activités de traitement tenu par l’employeur.

Le registre est prévu par l’article 30 du RGPD et participe à la documentation de la conformité.

Ce document doit transcrire la réalité des traitements de données personnelles de l’entreprise et permettre d’identifier précisément :

– Les parties prenantes (représentant, sous-traitants, co-responsables, etc.) qui interviennent dans le traitement des données ;

– Les catégories de données traitées ;

– A quoi servent ces données, qui accède aux données et à qui elles sont communiquées,

– Combien de temps elles sont conservées ;

– Comment elles sont sécurisées.

5/ La vidéosurveillance dans les lieux non accessibles aux salariés

L’installation d’un dispositif de vidéosurveillance destiné à assurer la protection de pièces ou locaux non accessibles aux salariés n’est soumise à aucune condition particulière.

A titre d’exemple, l’employeur est libre de mettre en place des procédés de surveillance des entrepôts ou autres locaux de rangement dans lesquels les salariés ne travaillent pas (Cass. soc. 31-01-2001, n° 98-44.290).

Si un salarié accède malgré tout à un tel local, l’employeur peut se prévaloir des éléments recueillis au moyen de ce système de vidéosurveillance pour établir la preuve des faits reprochés à l’intéressé, comme un vol ou une dégradation de matériel (Cass. soc. 19-4-2005, n° 02-46.295).

Par conséquent, dans cette hypothèse, l’employeur n’a ni à informer ni à consulter les représentants du personnel ni à informer les salariés.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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