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Xavier Berjot

Pas de CSE = préjudice causé au salarié

Pas de CSE = préjudice causé au salarié 2560 1707 sancy-avocats.com

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La Cour de cassation (Cass. soc. 8-01-2020, n° 18-20591) vient de le rappeler : l’absence d’institutions représentatives du personnel constitue une faute qui cause un préjudice aux salariés. Cette décision doit alerter les employeurs qui n’ont pas encore mis en place leur CSE…

1/ La décision de la Cour de cassation

Les faits ayant donné lieu à l’arrêt du 8 janvier 2020 pourraient prêter à sourire si la Cour de cassation n’avait pas cassé l’arrêt attaqué de la Cour d’appel de Lyon du 1er juin 2018.

En l’espèce, un salarié de 18 ans d’ancienneté, en préavis de départ en retraite, avait demandé à son employeur d’organiser les élections professionnelles des délégués du personnel au sein d’une UES.

Son contrat rompu, il saisit le Conseil de prud’hommes de diverses demandes et notamment d’une demande indemnitaire liée à l’absence d’organisation des élections des délégués du personnel au sein de l’UES à laquelle appartenait son entreprise.

Les juges du fond avaient constaté que l’employeur ne pouvait produire un procès-verbal de carence valable mais avaient néanmoins débouté le salarié de cette demande, jugeant qu’il ne rapportait la preuve d’aucun préjudice.

En particulier, la Cour notait :

– Que ce salarié avait interpellé l’employeur sur l’organisation des élections des délégués du personnel pendant son préavis qu’il était dispensé d’exécuter… ;

–  Que ses compétences en droit du travail  et ses fonctions d’assistance et de formation des élus aux comités d’entreprise et d’expertise auprès des CHSCT auraient dû le rendre particulièrement sensible à un tel manquement de l’employeur dont il ne pouvait théoriquement et pratiquement qu’avoir conscience.

Cassant l’arrêt de la Cour d’appel de Lyon, la Cour de cassation rappelle que :

– « L’employeur qui n’a pas accompli, bien qu’il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel, sans qu’un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause un préjudice aux salariés, privés ainsi d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts. »

La Cour de cassation avait déjà statué en ce sens dans un arrêt du 17 mai 2011 (Cass. soc. 17-05-2011 n° 10-12.852) suivi d’autres décisions similaires (Cass. soc. 17-10-2018 n° 17-14.392 ; Cass. soc. 15-5-2019 n° 17-22.224).

La jurisprudence de la Cour de cassation est donc désormais solidement établie sur le sujet.

2/ Les conséquences des manquements de l’employeur

Les juges du fond ne peuvent pas débouter un salarié de sa demande de dommages-intérêts liée à l’absence de mise en place des institutions représentatives du personnel au motif qu’il ne justifie pas de l’existence d’un préjudice en lien avec ces manquements.

Le salarié doit donc percevoir des dommages-intérêts dont le montant est souverainement apprécié par le juge en fonction des éléments produits par chacune des parties.

Ce préjudice peut sembler davantage significatif dans les entreprises de 50 salariés et plus, dans la mesure où ce seuil d’effectif confère des attributions étendues au CSE.

Par ailleurs, l’absence de mise en place d’un CSE peut entraîner des sanctions pénales pour délit d’entrave à la mise en place du comité.

L’article L. 2317-1, alinéa 1er du Code du travail dispose à ce titre que :

« Le fait d’apporter une entrave soit à la constitution d’un comité social et économique, d’un comité social et économique d’établissement ou d’un comité social et économique central, soit à la libre désignation de leurs membres, notamment par la méconnaissance des dispositions des articles L. 2314-1 à L. 2314-9 est puni d’un emprisonnement d’un an et d’une amende de 7 500 €. »

La Cour de cassation a pu juger que le fait pour le chef d’entreprise d’omettre de prendre les mesures nécessaires au déroulement régulier des opérations préélectorales en vue du renouvellement de l’institution représentative du personnel dont le mandat est venu à échéance constitue le délit d’entrave (Cass. crim. 6-11-2007 n° 06-86.027).

Le 17 janvier 2020, le Ministère du travail a apporté des précisions sur le sujet (source. travail-emploi.gouv.fr) en ces termes :

« Juridiquement, le seul fait de l’absence de mise en place d’un CSE au 31 décembre peut être caractérisé comme une entrave à la mise en place du CSE, sauf en cas de prorogation des mandats à la suite de la saisine de la Direccte ou du tribunal d’instance. 

Pour être constitué, le délit d’entrave doit réunir un élément matériel et un élément intentionnel.

Le fait pour l’employeur de ne pas avoir mis en place le CSE avant la date butoir constitue l’élément matériel de l’infraction. L’élément intentionnel se déduira du caractère volontaire de l’omission. Il appartiendra alors au juge pénal de déterminer si les difficultés de négociation procèdent d’une volonté de l’employeur de ne pas mettre en place l’instance ou de différer sa mise en place. 

Dès les premières semaines de 2020, les services déconcentrés du ministère du travail se rapprocheront des employeurs qui n’auront pas organisé les élections du CSE pour que soit engagé le plus vite possible le processus électoral. Si ces demandes n’étaient pas suivies d’effet, l’employeur s’exposerait alors à un constat d’infraction par l’inspecteur du travail. »

Le délit d’entrave est particulièrement caractérisé si un salarié sollicite la mise en place des élections et que l’employeur y fait obstacle.

Rappelons à cet égard qu’ « en l’absence de comité social et économique, l’employeur engage la procédure définie à l’article L. 2314-5 à la demande d’un salarié ou d’une organisation syndicale dans le mois suivant la réception de cette demande. »

Enfin, l’absence de mise en place d’un CSE est susceptible de vicier certaines procédures lorsque le Code du travail exige la consultation préalable des représentants du personnel.

Il en va ainsi, par exemple, du licenciement pour inaptitude consécutif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle (Cass. soc. 28-4-2011 n° 09-71.658) ou des consultations obligatoires prévues en cas de licenciement collectif pour motif économique. 

En effet, si l’employeur est légalement tenu de consulter le CSE avant une prise de décision et qu’il n’a pas procédé à sa mise en place, une irrégularité de fond peut être soulevée par le ou les salariés concernés.

En définitive, seul un procès-verbal de carence peut protéger l’employeur des conséquences liées à l’absence d’un CSE dans l’entreprise.

Xavier Berjot
Avocat Associé

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Indemnité forfaitaire de conciliation : comment procéder depuis le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile ?

Indemnité forfaitaire de conciliation : comment procéder depuis le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile ? 2560 1709 sancy-avocats.com

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L’employeur et le salarié peuvent résoudre à l’amiable un litige portant sur le licenciement en prévoyant le versement, à ce dernier, d’une indemnité forfaitaire de conciliation. Cette indemnité présente des avantages significatifs par rapport à l’indemnité transactionnelle. Le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 a cependant changé les règles du jeu…

1/ Les dispositions applicables

En cas de litige, lors de la phase de conciliation, l’employeur et le salarié peuvent convenir d’y mettre un terme par accord (C. trav. art. L. 1235-1).

Cet accord prévoit le versement par l’employeur au salarié d’une indemnité forfaitaire dont le montant est déterminé, sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles, en référence à un barème fixé par décret en fonction de l’ancienneté du salarié.

Le procès-verbal constatant l’accord vaut renonciation des parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail.

Le barème visé par le texte est le suivant (C. trav. art. D. 1235-21) :

– 2 mois de salaire si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté inférieure à 1 an ;

– 3 mois de salaire si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté au moins égale à 1 an, auxquels s’ajoute 1 mois de salaire par année supplémentaire jusqu’à 8 ans d’ancienneté ;

– 10 mois de salaire si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté comprise entre 8 ans et moins de 12 ans ;

– 12 mois de salaire si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté comprise entre 12 ans et moins de 15 ans ;

– 14 mois de salaire si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté comprise entre 15 ans et moins de 19 ans ;

– 16 mois de salaire si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté comprise entre 19 ans et moins de 23 ans ;

– 18 mois de salaire si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté comprise entre 23 ans et moins de 26 ans ;

– 20 mois de salaire si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté comprise entre 26 ans et moins de 30 ans ;

– 24 mois de salaire si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté au moins égale à 30 ans.

Ces dispositions sont inchangées depuis le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile.

NB. Rappelons qu’un décret n° 2016-1582 du 23 novembre 2016 avait amélioré le barème, fixé antérieurement à 2 mois pour une ancienneté inférieure à 2 ans, 4 mois pour une ancienneté comprise entre 2 ans et moins de 8 ans, 8 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 8 ans et moins de 15 ans, 10 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 15 ans et 25 ans et 14 mois pour une ancienneté supérieure à 25 ans.

2/ Le double avantage de l’indemnité forfaitaire de conciliation

Le procès-verbal de conciliation vaut renonciation des parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail.

Au-delà de cet effet extinctif, l’indemnité forfaitaire de conciliation présente un double avantage par rapport à l’indemnité transactionnelle.

2.1. Sur le plan fiscal

L’indemnité forfaitaire de conciliation est intégralement exonérée d’impôt sur le revenu dans la limite du barème susvisé.

La solution est prévue par l’article 80 duodecies du Code général des impôts :

– « 1. Toute indemnité versée à l’occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve des dispositions suivantes.
Ne constituent pas une rémunération imposable : « 1° Les indemnités mentionnées aux articles L. 1235-1 (…). »

Le Bulletin Officiel des Finances Publiques-Impôts (BOFiP-Impôts) rappelle cette solution de manière explicite :

« L’indemnité forfaitaire versée lors de la conciliation prévue à l’article L. 1411-1 du Code du travail (C. trav., L. 1235-1), dont le barème est fixé à l’article D. 1235-21 du Code du travail en fonction de l’ancienneté du salarié, est ainsi intégralement exonérée d’impôt sur le revenu dans la limite de ce barème. » (lien : http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/4935-PGP).

La solution peut se révéler très avantageuse car l’indemnité transactionnelle est exonérée d’impôt sur le revenu dans la limite suivante (la plus haute est retenue) :

– Soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture de son contrat de travail, dans la limite de six fois le PASS (246.816 euros en 2020) ;

– Soit 50 % du montant de l’indemnité si ce seuil est supérieur, toujours dans la limite de six fois le PASS ;

Par ailleurs, il convient d’ajouter l’indemnité de licenciement à l’indemnité transactionnelle pour déterminer le plafond d’exonération (étant précisé que l’addition des deux est toujours exonérée à hauteur de l’indemnité de licenciement, sans limite).

Or, dans certains cas, l’indemnité forfaitaire de conciliation peut être totalement exonérée alors que l’indemnité transactionnelle peut être soumise en partie à l’impôt sur le revenu.

Exemple : 

Un salarié a perçu une rémunération brute de 70.000 € en 2019, soit 5.833,33 € par mois. Il est licencié pour inaptitude non-professionnelle le 3 janvier 2020, alors qu’il totalisait 23 ans d’ancienneté. Son indemnité conventionnelle de licenciement s’élève à 80.000 €. Le 20 janvier 2020, il perçoit une indemnité transactionnelle nette de 90.000 €. Le total (80.000 + 90.000) s’élève à 170.000 €. Ce « package » est exonéré à hauteur de 140.000 € (deux fois la rémunération 2019 : limite la plus favorable). Conclusion : le package est soumis à l’impôt sur le revenu à hauteur de 30.000 €. 

Si ce même salarié avait perçu une indemnité forfaitaire de conciliation de 90.000 € à la place de l’indemnité transactionnelle, celle-ci aurait été exonérée d’impôt sur le revenu en totalité. En effet, le montant de 90.000 € représente moins de 16 mois de salaire. Or, un salarié de 23 ans d’ancienneté peut percevoir une indemnité exonérée de 18 mois de salaire, soit 104.999,94 € dans cet exemple (5833,33 x 18) !

2.2. Au regard de l’assurance-chômage

Ici encore, le versement d’une indemnité transactionnelle peut se révéler moins favorable que la perception d’une indemnité forfaitaire de conciliation.

En effet, Pôle Emploi retarde la prise en charge du demandeur d’emploi par l’application d’un « différé d’indemnisation spécifique », tenant compte des indemnités de rupture versées au-delà de l’indemnité légale de licenciement.

Ce différé « indemnités supra-légales », prévu par l’article  21§2  du  Règlement  Général annexé  à  la  convention  du  14 avril  2017, est limité à 150 jours calendaires (75 jours calendaires dans le cas d’un licenciement pour motif économique).

Il est calculé comme suit : Indemnités supra légales ÷ 95,8.

Il se déclenche par le versement de toute indemnité supra-légale (ex. l’indemnité conventionnelle de licenciement, si elle est plus favorable que l’indemnité légale, l’indemnité transactionnelle, l’indemnité de non-concurrence, etc.).

Exemple :

Un salarié perçoit une indemnité transactionnelle de 12.000 €. Son différé d’indemnisation spécifique est de 125 jours. S’il perçoit une indemnité transactionnelle de 14.400 €, le plafond du différé d’indemnisation spécifique est déjà atteint : 14.400 / 95,8 = 150,31.

Or, l’indemnité forfaitaire de conciliation est exclue de l’assiette de calcul du différé spécifique d’indemnisation.

Comme l’UNEDIC le rappelle dans sa circulaire n° 2019-12 du 1er novembre 2019 :

« Lorsque l’indemnité forfaitaire de conciliation correspond aux montants prévus par ce barème  en fonction de l’ancienneté du salarié, elle est exclue de l’assiette de calcul du différé spécifique. »

3/ L’incidence du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019

Conscients du double avantage de l’indemnité forfaitaire de conciliation, les praticiens du droit social avaient pris l’habitude de saisir le Conseil de prud’hommes par la voie de la présentation volontaire, afin de faire dresser un procès-verbal de conciliation.

En effet, l’article R. 1452-1, alinéa 1er du Code du travail, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, disposait :

« La demande en justice est formée soit par une requête, soit par la présentation volontaire des parties devant le bureau de conciliation et d’orientation. »

En pratique, il suffisait donc à l’employeur et au salarié (ou à leurs avocats) de se présenter spontanément devant le Conseil de prud’hommes pour bénéficier du dispositif.

NB. Certains Conseils de prud’hommes demandaient aux parties de communiquer, la veille, un projet de procès-verbal. Certains autres fixaient des rendez-vous plus ou moins lointains, en fonction de leur agenda d’audience. 

Depuis le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 applicable au 1er janvier 2020, l’article L. 1452-1, alinéa 1er du Code du travail dispose : « La demande en justice est formée par requête. »

Ainsi, la présentation volontaire des parties n’est plus un mode de saisine du Conseil de prud’hommes.

Désormais, les parties doivent saisir le Conseil de prud’hommes par voie de requête, le cas échéant conjointe, afin d’obtenir un procès-verbal de conciliation.

Or, les délais sont très variables selon les Conseils de prud’hommes et certains fixent à plus de 6-8 mois les audiences de conciliation.

L’employeur et le salarié peuvent cependant contourner la difficulté en saisissant un Conseil de prud’hommes territorialement incompétent.

En effet, si aucune des parties ne soulève l’exception d’incompétence, le juge n’a pas le pouvoir de relever celle-ci d’office, sauf si le défendeur ne comparaît pas (C. proc. civ. art. 92).

Il est donc possible de choisir un Conseil de prud’hommes peu chargé afin de gagner de précieux mois…

Par ailleurs, les parties peuvent saisir, auprès du Conseil de prud’hommes territorialement compétent, une autre section que celle dont relève leur litige (ex. la section Activités Diverses au lieu de la section Encadrement).

En effet, certaines sections sont plus encombrées que d’autres.

Ici encore, le Président du bureau de conciliation ne soulève pas l’incompétence de la section, cette prérogative revenant aux parties (C. trav. R. 1423-7).

En conclusion, signalons qu’il est naturellement préférable, dans tous les cas, de contacter le greffe en amont pour connaître les pratiques du Conseil.

Xavier Berjot
Avocat Associé

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Hôtels-Cafés-Restaurants (HCR) : le contrat d’extra en 5 points-clés

Hôtels-Cafés-Restaurants (HCR) : le contrat d’extra en 5 points-clés 2560 1707 sancy-avocats.com

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Le contrat d’extra est un CDD d’usage, utilisé particulièrement dans les métiers de l’hôtellerie et de la restauration. Souvent de courte durée, le contrat d’extra ne peut pas être utilisé sans condition et son régime est spécifique.

1/ Dans quelles conditions les professionnels de l’HCR peuvent-ils recourir au contrat d’extra ?

Le contrat d’extra peut être utilisé par les professionnels de l’hôtellerie et de la restauration dans de multiples circonstances : organisation de cocktails, de mariages, événements d’entreprise, inaugurations, etc.

Dans tous les cas, il s’agit d’un contrat de travail à durée déterminée (CDD) qui bénéficie d’un support légal.

En effet, selon l’article L. 1242-2, 3° du Code du travail, un CDD peut être conclu pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire notamment pour les emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

Or, il résulte de l’article D. 1242-1 du Code du travail (article issu d’un décret) que, parmi les secteurs d’activité permettant le recours au CDD d’usage, figure « 4° L’hôtellerie et la restauration, les centres de loisirs et de vacances. »

Le contrat d’extra ne peut cependant pas être utilisé pour tous les emplois.

Comme l’Administration l’a précisé : « dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration, s’il est d’usage de faire appel aux « extras » dans le cadre de CDD ou de contrats de travail temporaire (intérim), il n’en est pas de même pour les personnes affectées à des tâches administratives ou d’entretien présentant un caractère permanent » (Circ. DRT 90-18 du 30 octobre 1990).

Ainsi, le contrat d’extra ne peut pas concerner :

– les postes administratifs (secrétaire, comptable, juriste, etc.) ;

– les postes pouvant être occupés par des CDI dans l’établissement.

La Cour de cassation a précisé, à cet égard, qu’il appartient au juge de rechercher si, pour l’emploi considéré, il est effectivement d’usage constant de ne pas recourir au CDI et de vérifier si le recours à des contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi (Cass. soc. 24 septembre 2008, n° 06-43529).

2/ Comment le contrat d’extra doit-il être rédigé ?

Le contrat d’extra correspond à un CDD et doit donc répondre aux conditions exigées par ce type de contrats.

Ainsi, le contrat d’extra doit mentionner (C. trav. art. L. 1242-12) :

– L’indication du motif de recours et des textes applicables (cf. modèle ci-dessous) ;

– La date du terme et, le cas échéant, une clause de renouvellement lorsqu’il comporte un terme précis ;

– La durée minimale pour laquelle il est conclu lorsqu’il ne comporte pas de terme précis (cela est rare pour les contrats d’extra, qui ne visent pas à remplacer un salarié absent) ;

– La désignation du poste de travail en précisant, le cas échéant, si celui-ci figure sur la liste des postes de travail présentant des risques particuliers pour la santé ou la sécurité des salariés ;

– L’intitulé de la convention collective applicable ;

– La durée de la période d’essai éventuellement prévue ;

– Le montant de la rémunération et de ses différentes composantes, y compris les primes et accessoires de salaire s’il en existe ;

– Le nom et l’adresse de la caisse de retraite complémentaire ainsi que, le cas échéant, ceux de l’organisme de prévoyance.

Le motif de recours peut être ainsi libellé (modèle indicatif) :

« Le présent contrat est conclu en application du 3° de l’article L. 1242-2 du Code du travail : emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et en application de l’article D. 1242-1 du même code visant l’hôtellerie et la restauration. »

3/ Quelles précautions doivent être prises lors du recours à un contrat d’extra ?

La difficulté en la matière réside dans le fait que le contrat d’extra peut être conclu pour quelques jours ou, seulement, pour quelques heures.

Cependant, comme tout CDD, le contrat d’extra peut être requalifié en CDI s’il ne respecte pas les règles prévues par le Code du travail.

En particulier, le contrat d’extra doit être obligatoirement établi par écrit et comporter la définition précise de son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée (C. trav. art. L. 1242-12).

Il doit comporter l’ensemble des mentions rappelées ci-dessus (§ 2).

Le contrat d’extra doit être transmis au salarié, au plus tard, dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche (C. trav. art. L. 1242-13).

Concernant la visite médicale d’embauche, précisons que l’article R. 4624-5 du code du travail prévoit que lorsque le travailleur a bénéficié d’une visite d’information et de prévention dans les 5 ans, l’organisation d’une nouvelle visite d’information et de prévention n’est pas requise dès lors que l’ensemble des conditions suivantes sont réunies :

– Le travailleur est appelé à occuper un emploi identique présentant des risques d’exposition équivalents ;

– Le médecin du travail est en possession de la dernière attestation de suivi ou du dernier avis d’aptitude ;

– Aucune mesure d’aménagement du poste n’a été prononcée ou aucun avis d’inaptitude n’a été émis au cours des 5 dernières années.

Enfin, l’hôtelier ou le restaurateur doit être vigilant sur les conditions d’exécution du contrat d’extra.

Signalons que les dispositions légales et conventionnelles ainsi que celles résultant des usages visant les salariés titulaires d’un CDI s’appliquent également aux salariés titulaires d’un CDD (à l’exception bien sûr des règles concernant la rupture du contrat de travail) (C. trav. art. L. 1242-14).

Par ailleurs, la rémunération perçue par le salarié titulaire d’un contrat d’extra ne peut pas être inférieure au montant de la rémunération que percevrait dans la même entreprise, après période d’essai, un salarié bénéficiant d’un CDI de qualification professionnelle équivalente et occupant les mêmes fonctions.

4/ Quelles sont les dispositions prévues par la convention collective HCR ?

Le contrat d’extra est visé à l’article 14-1 de la convention collective HCR, qui contient les dispositions suivantes : 

« L’emploi d’extra qui, par nature est temporaire, est régi par les dispositions légales en vigueur. 

Un extra est engagé pour la durée nécessaire à la réalisation de la mission. Il peut être appelé à être occupé dans un établissement quelques heures, une journée entière ou plusieurs journées consécutives dans les limites des durées définies par l’article 21.2 c. 

Un extra qui se verrait confier par le même établissement des missions pendant plus de 60 jours dans un trimestre civil pourra demander la requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée. 

Le salaire de l’extra ne pourra être inférieur ni au minimum conventionnel de la catégorie professionnelle à laquelle il appartient, ni au montant de la rémunération que percevrait dans la même entreprise, après période d’essai, un salarié sous contrat à durée indéterminée de qualification équivalente et occupant les mêmes fonctions. 

Les modalités de rémunération d’extra seront définies d’un commun accord à l’embauche. En outre, à la fin du contrat le salarié perçoit une indemnité de congés payés égale à 10 % de la rémunération totale brute perçue quelque soit la durée du contrat. 

Un contrat devra être établi pour chaque vacation. Toutefois, si plusieurs vacations sont effectuées au cours d’un mois civil, l’employeur pourra établir un seul bulletin de paie récapitulatif qui devra ventiler toutes les vacations sans que la nature juridique du contrat s’en trouve modifiée. Le bordereau individuel d’accès à la formation lui sera remis conformément à la législation en vigueur. » 

5/ Comment gérer la fin du contrat d’extra ?

Comme tout CDD, le contrat d’extra prend fin à l’issue du terme, sans formalités particulières.

L’extra a droit à une indemnité de congés payés égale à 10 % des rémunérations perçues en cours de contrat, sauf s’il a pu bénéficier de congés payés durant sa période d’emploi.

En effet, l’article L. 1242-16 du Code du travail prévoit que le salarié titulaire d’un CDD a droit à une indemnité compensatrice de congés payés au titre du travail effectivement accompli durant ce contrat, quelle qu’ait été sa durée, dès lors que le régime des congés applicable dans l’entreprise ne lui permet pas de les prendre effectivement.

Le montant de cette indemnité, calculé en fonction de la durée du contrat, ne peut être inférieur au dixième de la rémunération totale brute perçue par le salarié pendant la durée de son contrat d’extra.

L’indemnité est versée à la fin du contrat, sauf si le contrat d’extra se poursuit par un CDI.

Enfin, conformément à l’article L. 1243-10 du Code du travail, l’indemnité de précarité (« indemnité de fin de contrat ») n’est pas due à l’issue du contrat d’extra.

En effet, les CDD d’usage n’ouvrent pas droit à l’indemnité de fin de contrat.

Xavier Berjot
Avocat Associé

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L’accord de performance collective : un dispositif novateur

L’accord de performance collective : un dispositif novateur 2560 1707 sancy-avocats.com

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Depuis l’ordonnance n°2017-1385 du 22 septembre 2017, l’employeur peut conclure des accords de performance collective, destinés à répondre aux nécessités de fonctionnement de l’entreprise ou à préserver ou développer l’emploi. Ce dispositif novateur offre de véritables leviers de flexibilité. 

1/ Objet de l’accord

A titre préalable, indiquons que l’accord de performance collective remplace et fusionne les accords de maintien dans l’emploi (AME), les accords de préservation ou développement de l’emploi (APDE) et les accords de mobilité interne (AMI).

Toutefois, les AME, les APDE et les AMI conclus jusqu’au 23 septembre 2017 continuent d’être applicables jusqu’à leur terme.

Quant à lui, l’accord de performance collective peut (C. trav. art. L. 2254-2) :

– Aménager la durée du travail, ses modalités d’organisation et de répartition ;

– Aménager la rémunération dans le respect des salaires minima hiérarchiques ;

– Déterminer les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise.

Il peut être négocié même si l’entreprise n’est pas confrontée à des difficultés économiques conjoncturelles, son objectif étant de permettre à celle-ci d’adapter ses ressources humaines aux réalités de son activité.

2/ Modalités de négociation

L’accord de performance collective est un accord de droit commun et sa validité est donc subordonnée à sa signature par, d’une part, l’employeur ou son représentant et, d’autre part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au CSE, quel que soit le nombre de votants (C. trav. art. L. 2232-12).

À défaut, s’il est signé par un ou plusieurs syndicats représentatifs ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés, il doit être approuvé par une majorité de salariés (référendum).

En l’absence de représentation syndicale, ses modalités de négociation dépendent de l’effectif de l’entreprise :

2.1. Entreprises de moins de 11 salariés

Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical et dont l’effectif habituel est inférieur à 11 salariés, l’employeur peut proposer un projet d’accord aux salariés (C. trav. art. L. 2232-21).

Tel que le texte est rédigé, l’employeur est le seul rédacteur de l’accord d’entreprise qu’il se propose de soumettre ensuite à la ratification du personnel.

La consultation du personnel doit être organisée à l’issue d’un délai minimum de 15 jours à compter de la communication du projet d’accord à chaque salarié.

Cette possibilité de négociation est étendue aux entreprises dont l’effectif habituel est compris entre 11 et 20 salariés, en l’absence de membre élu de la délégation du personnel du CSE (C. trav. art. L. 2232-23).

Dans les deux cas (entreprises de moins de 11 salariés et entreprises entre 11 et 20 salariés), lorsque le projet d’accord est approuvé à la majorité des deux tiers du personnel, il est considéré comme un accord valide (C. trav. art. L. 2232-22).

2.2. Entreprises entre 11 et 49 salariés

L’accord de performance collective peut être signé (C. trav. art. L. 2232-23-1) :

– Soit par un ou plusieurs salariés expressément mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans la branche ou, à défaut, par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au niveau national et interprofessionnel, étant membre ou non de la délégation du personnel du CSE.

– Soit par un ou des membres titulaires de la délégation du personnel du CSE.

Précisons que la validité de l’accord conclu avec un ou des membres de la délégation du personnel du CSE, mandaté ou non, est subordonnée à sa signature par des membres du CSE représentant la majorité des suffrages exprimés en faveur des membres du CSE lors des dernières élections professionnelles.

Par ailleurs, la validité de l’accord avec un ou plusieurs salariés mandatés, s’ils ne sont pas membres de la délégation du personnel du CSE, est subordonnée à son approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, dans le respect des principes généraux du droit électoral.

2.3. Entreprises de 50 salariés et plus

Dans les entreprises dont l’effectif habituel est au moins égal à 50 salariés, en l’absence de délégués syndicaux dans l’entreprise, les membres titulaires de la délégation du personnel du CSE peuvent signer un accord de performance collective s’ils sont expressément mandatés à cet effet par une ou plusieurs organisations syndicales (C. trav. art. L. 2232-24).

La validité de l’accord est subordonnée à son approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, dans le respect des principes généraux du droit électoral.

NB. Quel que soit le niveau de négociation, l’accord de performance collective n’a pas à être publié dans la base de données nationale (C. trav. art. L 2231-5-1).

3/ Contenu de l’accord

L’accord de performance collective doit définir ses objectifs dans son préambule et peut préciser les points suivants :

– Les conditions dans lesquelles les dirigeants salariés et les mandataires sociaux et actionnaires fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés ;

– La manière dont laquelle sont conciliées la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale des salariés ;

– Les conditions d’accompagnement des salariés, ainsi que l’abondement du compte personnel de formation (CPF) au-delà du montant minimal ;

– Les moyens d’information des salariés sur son application et son suivi pendant toute sa durée et examen de la situation des salariés à la fin de l’accord.

S’agissant des mesures prévues par l’accord, celui-ci peut (C. trav. art. L. 2254-2, I) :

–  aménager la durée du travail, ses modalités d’organisation et de répartition ;

–  aménager la rémunération dans le respect des salaires minima hiérarchiques ;

–  déterminer les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise.

Si l’accord met en place ou modifie notamment un dispositif d’aménagement du temps de travail sur une période de référence supérieure à la semaine, les dispositions du Code du travail relatives à ce dispositif s’appliquent (C. trav. art. L. 3121-41 et s.).

NB. L’accord de performance collective ne peut imposer une convention de forfait-jours à un salarié en décompte horaire (C. trav. art L 2254-2, II, al. 8). En revanche, s’il modifie une convention de forfait-jours existante, ses dispositions s’imposent au salarié.

4/ Mise en œuvre de l’accord

L’originalité de l’accord de performance collective réside dans le fait qu’il peut légalement entraîner une modification du contrat de travail des salariés.

L’employeur doit informer les salariés, par tout moyen conférant date certaine et précise (LRAR, lettre remise en mains propres,…), de l’existence et du contenu de l’accord, ainsi que du droit de chacun d’eux d’accepter ou de refuser l’application de cet accord à son contrat de travail (C. trav. art. L. 2254-2, IV).

Si le salarié accepte l’application de l’accord, ses stipulations se substituent de plein droit aux clauses contraires et incompatibles de son contrat de travail, y compris en matière de rémunération (sous réserve du respect des salaires minima hiérarchiques), de durée du travail et de mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise (C. trav. art. L. 2254-2, III-al. 1).

Le salarié refusant l’application de l’accord à son contrat de travail dispose d’un délai d’un mois à compter de la date à laquelle il a été informé de l’existence et du contenu de l’accord et de son droit de l’accepter ou de le refuser pour faire connaître par écrit sa décision à l’employeur.

Ce refus l’expose à un licenciement reposant sur un motif spécifique constituant une cause réelle et sérieuse.

L’employeur dispose alors d’un délai de 2 mois à compter de la notification du refus du salarié pour engager une procédure de licenciement.

Il doit appliquer la procédure de licenciement individuel pour motif personnel qui ouvre droit à l’assurance-chômage.

Enfin, le salarié licencié en raison d’une modification de son contrat de travail résultant de l’application de l’accord bénéficie d’un abondement minimum de 100 heures de son compte personnel de formation (C. trav. art. D. 6323-3-2, I).

Xavier Berjot
Avocat Associé

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Salariés : le régime social et fiscal des indemnités de rupture en 2020

Salariés : le régime social et fiscal des indemnités de rupture en 2020 2560 1920 sancy-avocats.com

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Hormis quelques spécificités, le régime des indemnités de rupture est identique, qu’il s’agisse de l’indemnité de licenciement, de l’indemnité de rupture conventionnelle ou de l’indemnité transactionnelle. En d’autres termes, ces indemnités doivent être additionnées pour la détermination de leur régime social et fiscal.

1/ Régime social 

Les indemnités de rupture sont exclues de l’assiette des cotisations sociales, dans la limite d’un montant fixé à deux fois la valeur annuelle du plafond de la sécurité sociale (« PASS »), soit 82.272 € pour 2020 (41.136 € x 2).

La partie excédentaire est soumise à cotisations patronales et salariales, comme les salaires. Il faut décompter environ 45 % de cotisations patronales et 25 % de cotisations salariales.

Par ailleurs, la partie qui excède le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement est toujours soumise à CSG / CRDS, soit 9,7 % au total, à la charge du salarié.

NB. Une spécificité concerne l’indemnité de rupture conventionnelle, qui est soumise en outre au forfait social de 20 % portant sur la fraction de l’indemnité exclue de l’assiette des cotisations de sécurité sociale. Ajoutons que l’indemnité de rupture conventionnelle est intégralement assujettie aux cotisations sociales, à la CSG et à la CRDS lorsqu’elle est versée à un salarié en droit de bénéficier d’une pension de retraite (Circ. Acoss 2008-81 du 16-10-2008 n° 2.2 ; Cass. 2e civ. QPC 13-6-2019 n° 19-40.011).

Enfin, lorsque les indemnités de rupture dépassent 10 fois le PASS (soit 411.360 € en 2020), elles sont soumises à cotisations sociales dès le premier euro.

2/ Régime fiscal

Les indemnités de rupture sont exonérées d’impôt sur le revenu dans la limite suivante (la plus haute est retenue) :

– Soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture de son contrat de travail, dans la limite de six fois le PASS (246.816 € en 2020) ;

– Soit 50 % du montant de l’indemnité si ce seuil est supérieur, toujours dans la limite de six fois le PASS ;

– Soit le montant de l’indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, par l’accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi, et ce sans limite.

3/ Licenciement économique

Les indemnités de rupture versées dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi (« PSE ») sont exclues de l’assiette des cotisations de sécurité sociale dans la limite d’un montant fixé à deux fois la valeur du PASS, soit 82.272  € pour 2020.

Cette exonération ne joue pas si le montant total versé dépasse 10 fois le PASS, soit 411.360 € en 2020.

Enfin, les indemnités de rupture versées dans le cadre d’un PSE bénéficient d’une exonération totale d’impôt sur le revenu.

Sont ainsi exonérées de l’impôt sur le revenu les indemnités dues aux salariés en vertu des dispositions légales ou conventionnelles, mais aussi les indemnités et avantages alloués par l’employeur dans ce cadre (aide au départ volontaire, à la réinsertion professionnelle, à la création d’entreprise,…).

En revanche, les indemnités constituant des éléments de salaires (bonus, indemnité compensatrice de congés payés, indemnité compensatrice de préavis,…) demeurent imposables dans les conditions de droit commun.

4/ Cas pratiques

1er exemple :

Un salarié négocie une rupture conventionnelle et perçoit, le 10 janvier 2020, une indemnité de rupture conventionnelle de 70.000 €.

Ce salarié a touché une rémunération brute de 43.000 € en 2019.

Son indemnité conventionnelle de licenciement (théorique) est de 8.000 €.

Le régime social et fiscal de son indemnité de rupture conventionnelle est le suivant :

– Pas de cotisations sociales (l’indemnité n’excède pas 82.272 €) ;

– CSG / CRDS sur 62000 € (70.000 – 8.000), soit un montant de 6.014 €, à la charge du salarié ;

– Forfait social de 20 %, soit un montant de 14.000 €, à la charge de l’employeur ;

– Aucun impôt sur le revenu (l’indemnité n’excède pas 2 fois la rémunération annuelle brute perçue par le salarié en 2019).

2ème exemple :

Un salarié est licencié pour insuffisance professionnelle le 3 octobre 2019 et touche le 2 janvier 2020  – à l’issue de son préavis de 3 mois – une indemnité conventionnelle de licenciement de 35.000 €.

Ce salarié signe une transaction le 13 janvier 2020 et perçoit une indemnité transactionnelle de 55.000 €.

Il a gagné un salaire de 50.000 € bruts en 2019.

Le régime social et fiscal de ses indemnités de rupture est le suivant :

Rappel : il faut additionner les deux indemnités, soit un montant à considérer de 90.000 € (35.000 + 55.000) ;

– Cotisations sociales sur 7.728 € (90.000 – 82.272), soit environ 45 % de cotisations patronales (3.477 €) et 25 % de cotisations salariales (1.932 €) ;

– Pas de CSG / CRDS sur la partie correspondant à l’indemnité de licenciement (35.000 €) ;

– CSG / CRDS sur 47.272 € (82.272 – 35.000), soit un montant de 4.585,38 € ;

– Aucun impôt sur le revenu (les indemnités de rupture n’excèdent pas 2 fois la rémunération annuelle brute perçue par le salarié en 2019). 

3ème exemple :

Un salarié est licencié pour inaptitude non-professionnelle le 8 janvier 2020 et perçoit une indemnité conventionnelle de licenciement de 88.500 €.

Le régime social et fiscal de cette indemnité est le suivant :

– Cotisations sociales sur 6.228 € (88.500 – 82.272), soit environ 45 % de cotisations patronales (2.802 €) et 25 % de cotisations salariales (1.557 €) ;

– Aucun impôt sur le revenu car l’indemnité de licenciement est toujours exonérée.

Xavier Berjot
Avocat Associé

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Puis-je emmener mon chien au travail ?

Puis-je emmener mon chien au travail ? 1838 2560 sancy-avocats.com

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Emmener son chien au travail serait une pratique bénéfique, permettant de réduire le stress professionnel mais aussi de renforcer le contact entre les collaborateurs et même d’augmenter la productivité. Ce phénomène américain du « pet at work » est-il concevable en France ? 

1/ Une prérogative de l’employeur

Il appartient à l’employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, d’autoriser ou de refuser la présence de chiens – ou d’autres animaux domestiques – sur le lieu de travail.

En principe, c’est dans le règlement intérieur que l’employeur peut adopter de telles mesures, ce document étant destiné à fixer notamment « les mesures d’application de la réglementation en matière de santé et de sécurité » et « les règles générales et permanentes relatives à la discipline. »

Le chef d’entreprise peut décider d’interdire purement et simplement la présence de chiens sur le lieu de travail ou de l’autoriser, le cas échéant sous conditions (ex. pas en contact avec la clientèle, pas dans la cuisine d’un restaurant, pas pour certains postes à risque,…).

S’il n’est pas expressément autorisé à prendre son chien au travail, le salarié peut faire l’objet d’un licenciement, en fonction des circonstances.

A titre d’exemple, est justifié le licenciement d’un chauffeur routier se faisant accompagner dans son travail par son chien en contrevenant à la réglementation professionnelle (CA Rouen 8-2-2000, n° 97-1301).

En définitive, le salarié n’a aucun droit à partager sa journée de travail avec son animal de compagnie préféré, sauf accord de l’employeur.

2/ Les problématiques liées à l’hygiène et à la sécurité 

L’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (C. trav. art. L. 4121-1).

En la matière, il est tenu par une obligation de sécurité de résultat (Cass. soc. 28-02-2002, n°00-10.051) et engage sa responsabilité même en l’absence de faute de sa part.

Le manquement à l’obligation de sécurité de résultat peut même revêtir le caractère d’une faute inexcusable, au sens de l’article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Or, les chiens peuvent transmettre à l’homme des maladies plus ou moins graves, telles que la teigne, le ver solitaire, la leptospirose,…

Par ailleurs, certaines personnes sont allergiques aux chiens et leur état de santé peut se dégrader brutalement au contact de l’animal.

L’employeur doit donc prendre très au sérieux ces sujets d’hygiène et de sécurité.

Signalons qu’un salarié en présence d’un chien, et craignant légitimement pour sa santé, peut déclencher son droit de retrait.

L’article L. 4131-1 du Code du travail prévoit, à cet égard, que le salarié « alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé » et qu’il « peut se retirer d’une telle situation. »

3/ La responsabilité personnelle du propriétaire du chien

Le salarié emmenant son chien sur le lieu de travail engage sa responsabilité en cas d’accident et peut se voir reprocher une faute justifiant son licenciement.

A titre d’exemple, est bien-fondé le licenciement du salarié ayant laissé son chien pendant trois heures à l’intérieur de son véhicule stationné sur le parking de l’entreprise et n’ayant pas été en mesure de l’empêcher d’attaquer une collègue sur ce parking (Cass. soc. 4-10-2011, n° 10-18.862).

L’employeur engage également sa responsabilité si son chien attaque un salarié ou place ce dernier dans une situation de stress.

Ainsi, est justifiée la prise d’acte de la rupture du contrat de travail d’une salariée travaillant dans des locaux où se trouve régulièrement un Rottweiler non muselé appartenant à l’employeur, la salariée ayant été mordue par le chien (CA Bordeaux 14-9-2010, n° 09/00129).

Dans cette affaire, la Cour d’appel a jugé que l’employeur, en ne répondant pas aux demandes de la salariée tendant à ne plus être amenée à rencontrer sur son lieu de travail un chien classé en deuxième catégorie et qui doit donc être gardé dans des conditions particulières qui n’étaient pas respectées, n’a pas rempli ses obligations de sécurité par rapport à sa salariée.

Xavier Berjot
Avocat Associé

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Licenciement du salarié en arrêt de travail : attention aux clauses de garantie d’emploi !

Licenciement du salarié en arrêt de travail : attention aux clauses de garantie d’emploi ! 2560 1707 sancy-avocats.com

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Dans un arrêt récent (Cass. soc. 18-12-2019, n° 18-18.864), la Cour de cassation rappelle qu’est sans cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié qui intervient pendant une période de garantie d’emploi prévue par la convention collective. La décision invite à la plus grande prudence…

1/ L’existence des clauses de garantie d’emploi

De nombreuses conventions collectives prévoient des clauses de garantie d’emploi au bénéfice du salarié en arrêt de travail pour maladie.

Elles ont pour objet d’interdire à l’employeur de licencier le salarié avant l’expiration d’une certaine période.

Par exemple, l’article 16 de la convention collective de la pharmacie d’officine prévoit que l’employeur ne peut pas licencier le salarié pour absence prolongée nécessitant de procéder à son remplacement définitif avant l’expiration des délais suivants :

– 4 mois d’absence au cours des 12 derniers mois pour les salariés ayant moins de 2 ans d’ancienneté,

– 6 mois d’absence au cours des 12 derniers mois pour les salariés ayant 2 ans et plus d’ancienneté.

Certaines dispositions conventionnelles sont très explicites et contiennent un article intitulé « garantie d’emploi », comme l’article 4.6 de la convention collective de l’assainissement et de la maintenance industrielle :

« 4.6.  Garantie d’emploi en cas de maladie 

En cas de maladie dont l’employeur est informé dans les conditions prévues aux articles 7.4 et 7.5, les absences qui en résultent ne peuvent, sauf faute grave ou lourde, justifier la rupture par l’employeur du contrat de travail pendant les délais suivants qui varient en fonction de l’ancienneté de l’intéressé : 

– entre 2 et 10 ans d’ancienneté = 6 mois

– après 10 ans d’ancienneté = 12 mois »

D’autres conventions collectives sont moins claires et les clauses de garantie d’emploi « se cachent » parfois dans les dispositions générales relatives à la maladie.

L’employeur doit donc être vigilant lorsqu’il entend procéder au licenciement du salarié en arrêt de travail pour maladie.

Dans l’arrêt du 18 décembre 2019, la Cour de cassation s’est prononcée au sujet de l’article 29 de la convention collective du personnel des cabinets médicaux du 14 octobre 1981.

Le deuxième alinéa de ce texte prévoit que les absences justifiées par la maladie ou l’accident dans un délai maximum d’un an n’entraînent pas une rupture du contrat de travail.

Or, une secrétaire-standardiste, en arrêt de travail pour maladie à compter du 8 février 2014, avait été licenciée le 10 mars 2014 au motif que son absence prolongée perturbait le fonctionnement du cabinet médical et nécessitait son remplacement.

La Cour d’appel d’Orléans avait néanmoins considéré que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, au motif qu’il lui avait été notifié non pas en raison de son arrêt maladie mais seulement au motif de la perturbation qu’entraînait son absence prolongée nécessitant son remplacement définitif.

Le raisonnement est censuré par la Cour de cassation, jugeant que « l’employeur ne pouvait se prévaloir des conséquences de l’absence pour maladie de la salariée qui, à la date où le licenciement a été prononcé, n’excédait pas un an. »

2/ La violation des clauses de garantie d’emploi

La Cour de cassation considère que l’inobservation des clauses de garantie d’emploi prive le licenciement de toute cause réelle et sérieuse.

Ex. Cass. soc. 18 novembre 1997, n° 95-43395 :

– « Vu les articles 6-111 et 6-112 de la convention collective nationale du bâtiment ; 

Attendu, selon ces textes, que les absences résultant d’une maladie ou d’un accident ne constituent pas une rupture du contrat de travail, toutefois le chef d’entreprise peut effectuer le licenciement de l’ouvrier qui se trouve en arrêt de travail pour maladie ou accident lorsqu’il est obligé de procéder à son remplacement avant la date présumée de son retour ; que ce licenciement ne peut intervenir que si l’indisponibilité totale de l’ouvrier est supérieure à 90 jours au cours de la même année civile. 

(…) 

Qu’en statuant ainsi, alors d’une part que l’arrêt constatait que le licenciement avait été prononcé pour une absence consécutive à une maladie à un moment où l’indisponibilité du salarié était inférieure à 90 jours, et alors, d’autre part, que les absences répétées résultant d’une maladie ou d’un accident ne sont pas, aux termes de la convention collective, une cause de rupture du contrat de travail, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »

Dans un tel cas, le salarié peut prétendre, en plus de son indemnité (légale ou conventionnelle) de licenciement, à une indemnité de préavis et à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse encadrée par le « barème Macron » (planchers et plafonds fixés dans un tableau : C. trav. art. L. 1235-3, al. 2).

La Cour de cassation considère, toutefois, que les dispositions conventionnelles prévoyant une garantie d’emploi ne font pas obstacle à un licenciement fondé sur un motif disciplinaire.

A titre d’illustration, un salarié licencié pour faute grave durant son absence pour maladie ne peut, pour contester cette mesure, se prévaloir de la clause d’une convention collective n’autorisant le licenciement du salarié malade qu’en cas d’absence supérieure à 6 mois (Cass. soc. 14-10-2009, n° 07-44.834).

Dans un arrêt ancien, la Cour de cassation a également admis le licenciement pour motif économique d’une salariée intervenu sans attendre l’expiration du délai de protection prévu par la convention collective (Cass. soc. 27-10-1977, n° 76-40.908).

Xavier Berjot
Avocat Associé

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[INEDIT] Précisions de la Direction générale du travail sur les ordonnances Macron

[INEDIT] Précisions de la Direction générale du travail sur les ordonnances Macron 1200 1172 sancy-avocats.com

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Le Conseil national des barreaux (CNB) et le ministère du Travail ont conclu, en mars 2019, une convention instaurant un circuit d’information entre la direction générale du travail (DGT) et le CNB pour répondre aux interrogations juridiques rencontrées par les avocats au sujet de l’interprétation de la nouvelle réglementation.

Dans ce cadre, le 5 décembre 2019, la DGT a adressé au CNB un tableau contenant les réponses du Ministère à 59 questions posées par des avocats et relayées par le CNB.

Ces questions-réponses portent sur les ordonnances dites « Macron » du mois de septembre 2017, ratifiées par la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 :

– Ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 relative au renforcement de la négociation collective,

– Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales,

– Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail,

– Ordonnance n° 2017-1388 du 22 septembre 2017 portant diverses mesures relatives au cadre de la négociation collective,

– Ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 relative à la prévention et à la prise en compte des effets de l’exposition à certains facteurs de risques professionnels et au compte professionnel de prévention.

CSE, heures de délégation, CSSCT, accord de performance collective, etc., la DGT apporte des précisions utiles sur de nombreux points qui étaient sujets à interprétation.

Télécharger le document : Questions-Réponses Ordonnance Macron

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Blackface des salariés Le Slip Français : motif de licenciement ?

Blackface des salariés Le Slip Français : motif de licenciement ? 1256 708 sancy-avocats.com

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Le 3 janvier dernier, la vidéo de trois salariés de la société Le Slip Français a fait scandale sur Instagram, Twitter puis dans la presse généraliste. Et pour cause, puisque deux d’entre eux se livrent à un blackface du plus mauvais goût lors d’une soirée privée. Pour autant, ces faits constituent-ils un motif de licenciement ?

Le communiqué officiel Le Slip Français

Dans un communiqué officiel du même jour (cf. illustration), Le Slip Français (ci-après « la Société ») a condamné fermement le blackface et indiqué que « les salariés concernés ont été convoqués et sanctionnés par la direction », sans livrer davantage de précisions.

A première vue, le communiqué laisse penser que la Société s’est contentée de notifier un avertissement à ses salariés.

En effet, l’article L. 1332-2 du Code du travail dispose que lorsque l’employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l’objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n’ayant pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.

Le texte ajoute que le salarié peut se faire assister durant l’entretien et que la sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien.

Ainsi, seul un avertissement (ou un blâme ou un recadrage,…) peut être notifié par l’employeur sans respecter la procédure disciplinaire visée ci-dessus.

Cependant, compte tenu de l’ampleur du scandale, il est probable que la Société ait, en réalité, procédé à la mise à pied à titre conservatoire des salariés, comme certains journaux le suggèrent.

La mise à pied conservatoire 

La mise à pied à titre conservatoire peut être définie, comme l’acte par lequel l’employeur demande au salarié de ne plus se rendre à son poste de travail dans l’attente de la décision à intervenir.

L’employeur qui reproche une faute grave ou lourde au salarié n’a pas l’obligation de prononcer une mise à pied à titre conservatoire.

Toutefois, cette mesure s’impose en pratique, puisque ces fautes impliquent que le maintien du salarié dans l’entreprise n’est plus possible.

La mise à pied à titre conservatoire a pour effet de suspendre immédiatement l’exécution du contrat de travail.

En pratique, elle est notifiée au salarié en même temps que sa convocation à l’entretien préalable à son éventuel licenciement.

Pendant la période de mise à pied à titre conservatoire, le salarié ne perçoit aucune rémunération.

Attention : la mise à pied conservatoire n’est pas une sanction. Il s’agit « simplement » d’une mesure provisoire prononcée lorsque les faits reprochés au salarié paraissent d’une gravité telle qu’ils justifient sa mise à l’écart de l’entreprise dans l’attente de son éventuel licenciement.

En l’occurrence, le communiqué de la Société indique que les salariés « ont été sanctionnés » et cette rédaction est maladroite.

En effet, les salariés pourraient soutenir que leur mise à pied conservatoire (si elle est avérée) doit être requalifiée en mise à pied disciplinaire, correspondant à la suspension provisoire du contrat de travail avec privation de la rémunération.

Par ailleurs, en cas de licenciement pour faute grave, les salariés pourraient prétendre que la décision de la Société était prise avant même leur entretien préalable.

Cela est d’autant plus vrai que, dans un second communiqué, Le Slip Français a écrit « nous avons décidé de sanctionner fermement les deux salariés concernés »…

Le licenciement pour faute 

Au-delà de ces questions – importantes – de forme, reste à savoir si les deux salariés peuvent faire l’objet d’un licenciement pour ces faits relevant de leur vie privée.

Pour la Cour de cassation, chacun a droit au respect de sa vie privée et il en résulte qu’il ne peut être procédé à un licenciement pour une cause tirée de la vie privée du salarié que si son comportement crée un trouble objectif caractérisé au sein de l’entreprise (Cass. soc. 16-9-2009, n° 08-41.837).

Dans un arrêt ultérieur, la Cour de cassation a précisé qu’un fait de la vie personnelle occasionnant un trouble dans l’entreprise ne saurait justifier un licenciement disciplinaire (Cass. soc. 9-3-2011, n° 09-42.150).

Cette décision a constitué un revirement de jurisprudence, car la Cour de cassation admettait, antérieurement, le licenciement pour faute grave en lien avec des faits de la vie privée (ex. est justifié le licenciement pour faute grave d’un joueur de football qui a été vu par des supporters, le soir, dans des bars et boîtes de nuit, ce comportement ayant, en raison de son caractère public, eu un impact sur l’image du club en suscitant le mécontentement de supporters : Cass. soc. 28-6-1995, n° 93-46.424).

En définitive, le bien-fondé du licenciement pour faute des deux salariés Le Slip Français est loin d’être évident…

Cela est d’autant plus vrai que leur soirée était totalement déconnectée de leur activité professionnelle (ex. les salariés ne portaient pas de sous-vêtements de la marque, ne citaient pas Le Slip Français ; ils se trouvaient dans un lieu privé,…).

Xavier Berjot
Avocat Associé

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Entreprises de 50 salariés et plus : comment préparer la première réunion du CSE ?

Entreprises de 50 salariés et plus : comment préparer la première réunion du CSE ? 1350 900 sancy-avocats.com

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Depuis le 1er janvier 2020, le CSE doit obligatoirement se substituer aux anciennes instances représentatives du personnel (CE, DP, DUP, instance unique et CHSCT). La première réunion du CSE, dans les entreprises de 50 salariés et plus, revêt une importance particulière.

1/ Les participants à la première réunion

L’employeur, en sa qualité de président du CSE, assiste aux réunions du comité et doit convoquer l’ensemble des participants.

Il s’agit, en premier lieu, des membres titulaires du CSE (C. trav. art. L. 2314-1), étant précisé que les membres suppléants n’assistent aux réunions qu’en l’absence des titulaires.

En second lieu, peuvent assister aux réunions les éventuels délégués syndicaux de l’entreprise (ou de l’établissement). Rappelons à cet égard que :

– dans les entreprises de moins de 300 salariés, le délégué syndical est, de droit, représentant syndical au CSE (C. trav. art. L. 2143-22). A ce titre, il doit être destinataire des informations fournies au comité.

– dans les entreprises de 300 salariés et plus, chaque organisation syndicale représentative dans l’entreprise peut désigner un représentant syndical au CSE. Il assiste aux séances avec voix consultative. Il est choisi parmi les membres du personnel de l’entreprise et doit remplir les conditions d’éligibilité au CSE (C. trav. art. L. 2314-2).

En troisième lieu, l’employeur peut être assisté, au CSE, de trois collaborateurs qui ont voix consultative (C. trav. art. L. 2315-23).

Peuvent également participer à la première réunion du CSE l’inspecteur du travail et l’agent des services de prévention des organismes de sécurité sociale (CARSAT).

En effet, l’article L. 2315-30 du Code du travail prévoit que l’ordre du jour des réunions du CSE doit être communiqué par le président aux membres du comité, à l’agent de contrôle de l’inspection du travail ainsi qu’à l’agent des services de prévention des organismes de sécurité sociale.

N.B. En réponse au Conseil National des Barreaux (CNB), la Direction Générale du Travail (DGT) a, le 4 décembre 2019, précisé que l’ordre du jour devait être communiqué à l’agent de contrôle de l’inspection du travail et à l’agent des services de prévention des organismes de sécurité sociale y compris lorsque la réunion ne porte pas des questions de santé et de sécurité.

En outre, rappelons pour mémoire qu’en fonction des sujets à l’ordre du jour, des personnes extérieures telles que le médecin du travail peuvent assister aux réunions du CSE (C. trav. art. L. 2314-3). Cependant, leur présence n’est pas requise à la première réunion.

Enfin, l’employeur doit penser à convoquer à la première réunion les anciens membres du comité d’entreprise, pour statuer sur le transfert des créances et dettes du CE au CSE (cf. § 3 ci-dessous).

2/ L’ordre du jour de la première réunion

Il appartient à l’employeur d’établir l’ordre du jour de manière unilatérale puisque, par hypothèse, le CSE n’a pas encore élu son secrétaire.

Il s’agit donc d’une exception à la règle selon laquelle l’ordre du jour de chaque réunion du CSE est établi par le président et le secrétaire (C. trav. art. L 2315-29, al. 1).

Le CSE devant nécessairement désigner, parmi ses membres titulaires, un secrétaire et un trésorier (C. trav. art. L 2315-23, al. 3), ce sujet doit être inscrit à l’ordre du jour.

L’ordre du jour doit toujours être transmis aux participants au moins 3 jours avant la réunion du CSE (C. trav. art. L. 2315-30).

Par ailleurs, il est important que la première réunion du CSE se tienne, au plus tard, dans le mois suivant l’élection de ses membres.

En effet, un mois après chaque élection du CSE, l’employeur doit lui communiquer une documentation économique et financière précisant (C. trav. art. L. 2312-57) :

– la forme juridique de l’entreprise et son organisation ;

– les perspectives économiques de l’entreprise telles qu’elles peuvent être envisagées ;

– le cas échéant, la position de l’entreprise au sein du groupe ;

– compte tenu des informations dont dispose l’employeur, la répartition du capital entre les actionnaires détenant plus de 10 % du capital et la position de l’entreprise dans la branche d’activité à laquelle elle appartient. Cette disposition doit être entendue comme étant la situation de l’entreprise sur le marché et sa position face à la concurrence.

En définitive, l’ordre du jour de la première réunion du CSE peut être le suivant :

– Désignation des membres du bureau (secrétaire et trésorier) ;

– Présentation des attributions du CSE ;

– Transfert des créances et dettes du CE au CSE ;

– Détermination des moyens, ressources et règles de fonctionnement du CSE ;

– Remise et présentation de la documentation économique et financière de l’entreprise ;

– Discussion sur le futur règlement intérieur du CSE ;

– Calendrier des réunions du CSE ;

– Questions diverses. 

3/ Le transfert des créances et dettes du CE au CSE

L’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise prévoit que :

– « l’ensemble des biens, droits et obligations, créances et dettes des comités d’entreprise, des comités d’établissement, des comités centraux d’entreprise, des délégations uniques du personnel, des CHSCT et des instances regroupées dans les entreprises d’au moins 300 salariés, sont transférés de plein droit et en pleine propriété aux comités sociaux et économiques mis en place au terme des mandats en cours des instances précitées et au plus tard au 31 décembre 2019. Ce transfert s’effectue à titre gratuit lors de la mise en place des CSE ».

Ce texte implique donc un transfert automatique des créances et dettes de l’ancien CE au nouveau CSE.

De manière plus pratique, l’ordonnance dite « balai » n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 a prévu que :

– Lors de leur dernière réunion, les anciennes IRP doivent décider de l’affectation des biens de toute nature dont elles disposent à destination du futur CSE et, le cas échéant, les conditions de transfert des droits et obligations, créances et dettes relatifs aux activités transférées ;

– Lors de sa première réunion, le CSE décide, à la majorité de ses membres, soit d’accepter les affectations prévues par les anciennes IRP lors de leur dernière réunion, soit de décider d’affectations différentes (Ord. n° 2017-1386 du 22-9-2017 art. 9, VI modifié). 

4/ Le déroulement de la première réunion 

Il appartient à l’employeur d’ouvrir les débats et de dérouler les sujets à l’ordre du jour.

Le premier sujet peut être la désignation du bureau, à moins que le président souhaite présenter, en introduction, les attributions du CSE.

S’agissant de la désignation du bureau, le Code du travail prévoit que le CSE désigne le secrétaire et le trésorier parmi ses membres titulaires, ce qui exclut les suppléants (C. trav. art. L. 2315-23, al. 3).

Le secrétaire et le trésorier sont élus à la majorité des suffrages exprimés et le président peut prendre part au vote, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation applicable au CE et transposable au CSE (Cass. soc. 21-11-2000, n° 98-23.094 ; Cass. soc. 5-1-2005, n° 02-19.080).

En cas de partage des voix, la désignation des membres du bureau du comité se fait, conformément aux règles habituelles du droit électoral, au profit du candidat le plus âgé (Cass. soc. 30-11-2011, n° 10-23.986).

N.B. Dans les grandes entreprises, le CSE peut procéder à la désignation d’un secrétaire-adjoint et / ou d’un trésorier-adjoint. En ce cas, ces membres du bureau peuvent être choisis parmi les membres titulaires mais aussi suppléants du comité.

Notons que tous les participants, sans exception, ont le droit de prendre la parole et d’exprimer leur opinion pendant la réunion.

Les séances du comité peuvent être enregistrées ou sténographiées, notamment pour permettre au secrétaire de participer efficacement aux réunions sans avoir à prendre de notes et faciliter la rédaction du procès-verbal (C. trav. art. L. 2315-34, al. 4 ; D. 2315-27).

Lorsque cette décision émane du CSE, l’employeur ne peut s’y opposer, sauf lorsque les délibérations portent sur des informations revêtant un caractère confidentiel au sens de l’article L. 2315-3 et qu’il présente comme telles (C. trav. art. D. 2315-27, al. 2).

A l’occasion de la première réunion du CSE, il peut être utile de discuter du règlement intérieur du CSE.

A cet égard, l’article L. 2315-24, al. 1 du Code du travail prévoit que le CSE détermine, dans un règlement intérieur, les modalités de son fonctionnement et celles de ses rapports avec les salariés de l’entreprise, pour l’exercice des missions qui lui sont conférées.

Enfin, l’employeur peut présenter un calendrier prévisionnel des réunions du CSE sur l’année à venir.

5/ Le procès-verbal de la première réunion 

La rédaction et la signature du procès-verbal relèvent des prérogatives du secrétaire du CSE et non de l’employeur (président du CSE).

Par principe, les délibérations du CSE sont consignées dans un procès-verbal établi par le secrétaire du comité dans un délai et selon des modalités définis par un accord d’entreprise ou, à défaut, par décret (C. trav. art. L. 2315-34, al. 1).

A défaut d’accord :

– Les délibérations du CSE sont consignées dans des procès-verbaux établis par le secrétaire dans un délai de 15 jours et communiqués à l’employeur et aux membres du comité (C. trav. art. R. 2315-25) ;

– Le procès-verbal est établi et transmis à l’employeur par le secrétaire du CSE dans les 15 jours suivant la réunion à laquelle il se rapporte ou, si une nouvelle réunion est prévue dans ce délai de 15 jours, avant cette réunion (C. trav. art. D. 2315-26, al. 1).

Le procès-verbal établi contient au moins le résumé des délibérations du comité et la décision motivée de l’employeur sur les propositions faites lors de la précédente réunion (C. trav. art. D. 2315-26, al. 3).

Il peut, après avoir été adopté, être affiché ou diffusé dans l’entreprise par le secrétaire du comité, selon des modalités précisées par le règlement intérieur du comité (C. trav. art. L. 2315-35).

N.B. L’adoption des PV est une pratique courante. Il est d’usage que les PV soient adoptés au début de la réunion suivante. Il revient au règlement intérieur du CSE de fixer les modalités de cette adoption (modifications, majorité requise,…). L’adoption du procès-verbal constituant une simple mesure d’administration, l’employeur peut prendre part au vote.

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