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Xavier Berjot

Rémunération variable et condition de présence

Rémunération variable et condition de présence 1707 2560 sancy-avocats.com

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Le contrat de travail peut naturellement conditionner le droit à un élément de rémunération variable à certains paramètres. En revanche, le bénéfice de la part variable ne peut pas être intégralement subordonné à une condition de présence du salarié au moment de son versement.

1/ Pas de condition de présence à la date du versement de la prime

L’ouverture du droit à un élément de la rémunération peut être liée à une condition de présence à la date de son échéance, c’est-à-dire à la date à laquelle les conditions de son exigibilité sont remplies (Cass. soc. 19-7-1995 n° 92-40.638).

Cette clause ne peut être écartée que si son application réduit le salaire à un montant inférieur au minimum légal ou conventionnel de la catégorie professionnelle à laquelle appartient le salarié.

En revanche, le droit à rémunération relatif à une période considérée est acquis du seul fait que cette période a été intégralement travaillée. 

En effet, pour la Cour de cassation, si l’ouverture du droit à un élément de la rémunération afférent à une période travaillée peut être soumise à une condition de présence à la date de son échéance, le droit à rémunération est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée de sorte qu’il ne saurait être subordonné à une condition de présence à la date, postérieure, de son versement (Cass. soc. 3-4-2007 n° 05-45.110).

Cette jurisprudence de la Cour de cassation a été réaffirmée postérieurement (Cass. soc. 8-7-2020 n° 18-21.945 ; Cass. soc. 29-9-2021 n° 13-25.549).

Elle ne concerne pas seulement le salaire variable et a pu être dégagée, par exemple, à propos d’une prime d’expatriation (Cass. soc. 27-3-2013 n° 11-22.875) :

– « Ayant relevé que le droit à percevoir la prime d’expatriation litigieuse était acquis du fait de la réalisation de la mission à l’étranger, la cour d’appel en a déduit à bon droit que son paiement ne pouvait être subordonné à une condition d’appartenance aux effectifs de la société le dernier jour du mois de février de l’année civile suivante. »

De même, la solution a été appliquée à une prime d’intéressement présentant un caractère collectif (Cass. soc. 21-9-2005 n° 01-42.399).

La Cour de cassation considère, enfin, que lorsque la partie variable de la rémunération est fixée en fonction du chiffre d’affaires annuel réalisé personnellement par le salarié, celui-ci, quittant l’entreprise avant la fin de l’année civile, ne peut pas être privé d’un élément de rémunération versé en contrepartie de son activité auquel il peut alors prétendre au prorata de son temps de présence (Cass. soc. 15-3-2017 n° 15-19.528).

2/ Incidence de la rupture du contrat de travail 

La question se pose de savoir comment la Cour de cassation apprécie la condition de présence du salarié à la date de versement d’une prime, lors de la rupture du contrat de travail.

Par principe, un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse ne peut pas être débouté de sa demande de versement d’une prime liée à une condition de présence à la date de paiement.

Comme l’énonce la Cour de cassation, « la condition est réputée accomplie lorsque c’est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l’accomplissement. » (Cass. soc. 26-9-2018 n° 17-19.840).

Cette solution joue également en cas de nullité du licenciement, l’employeur ne pouvant opposer au salarié la condition de présence à la clôture de l’exercice comptable pour le débouter de sa demande de rémunération variable (Cass. soc. 27-5-2020 n° 18-20.156).

En revanche, une prime annuelle dont le bénéfice est subordonné à la condition que le salarié soit titulaire d’un contrat de travail en vigueur au moment de son versement n’est pas due si celui-ci a été rompu avant cette date, peu important que le licenciement ait ensuite été jugé sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 27-5-2020 n° 18-20.688).

Cette solution est logique puisque l’ouverture du droit à un élément de la rémunération afférent à une période travaillée peut être soumise à une condition de présence à la date de son échéance (cf. § 1).

La jurisprudence s’est également prononcée sur l’incidence d’une dispense de préavis au regard du droit à la prime.

Selon l’article L. 1234-5 du Code du travail, la dispense par l’employeur de l’exécution du travail pendant la durée du préavis ne doit entraîner, jusqu’à l’expiration de ce délai, aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait reçus s’il avait accompli son travail.

Dès lors, pour la Cour de cassation, viole ce texte la Cour d’appel qui déboute un salarié de sa demande en paiement d’une prime d’assiduité pour la période de préavis en décidant que l’employeur est en droit de conditionner le règlement d’une telle prime à la présence effective du salarié (Cass. soc. 27-6-2001 n° 98-45.711).

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Salariés : quand l’entretien d’évaluation devient une sanction

Salariés : quand l’entretien d’évaluation devient une sanction 1707 2560 sancy-avocats.com

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Dans un arrêt du 2 février 2022 (Cass. soc. 2-2-2022 n° 20-13.833), la Cour de cassation a jugé que le compte-rendu d’entretien annuel comportant des griefs précis sanctionne un comportement considéré comme fautif et constitue donc un avertissement.

1/ Les contours de l’entretien d’évaluation

Le Code du travail n’impose pas à l’employeur de prévoir, à échéances périodiques, un entretien d’évaluation, de performance ou d’activité (peu importe son libellé).

Un tel dispositif peut être mis en place par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction.

Il est même conseillé, afin d’évaluer les performances du salarié, ses éventuelles lacunes, ses probables succès et ses besoins de formation.

Comme la Cour d’appel de Versailles a pu le juger, « la mise en place d’un système d’évaluation est nécessaire pour permettre à l’employeur de respecter, d’une part, son obligation de négociation triennale en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, de s’assurer, d’autre part, de l’adaptation des salariés à leur poste de travail, notamment par la proposition de formations » (CA Versailles 26-5-2011 n° 09-09814).

En effet, en pratique, l’entretien d’évaluation s’avère très utile – sinon indispensable – pour dresser un état des lieux du travail effectué par le salarié, en particulier sur l’année écoulée.

D’ailleurs, en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle ou de résultats, les juges attendent légitimement de l’employeur qu’il produise des documents écrits sur l’appréciation du salarié.

En définitive, l’entretien d’évaluation constitue une « bonne pratique », utile tant au salarié qu’à l’employeur. 

L’entretien d’évaluation ne doit pas être confondu avec l’entretien professionnel. 

Rappelons, à cet égard, que le salarié doit être informé qu’il bénéficie tous les 2 ans d’un entretien professionnel avec son employeur « consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d’emploi » (C. trav. art. L. 6315-1.I).

Le texte précise que « cet entretien ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié. » 

L’entretien professionnel comporte également « des informations relatives à la validation des acquis de l’expérience, à l’activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l’employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle. » 

2/ La dénaturation de l’entretien d’évaluation 

Les entretiens d’évaluation donnent généralement lieu à l’établissement d’un compte-rendu signé par l’employeur et le salarié.

C’est souvent sous cette forme que sont identifiés les axes de progression du salarié ou les moyens d’améliorer la qualité de son travail.

En revanche, le compte-rendu d’entretien d’évaluation ne peut pas s’assimiler à une sanction, sauf à ce que l’employeur vide son pouvoir disciplinaire.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 2 février 2022, un compte-rendu d’entretien d’évaluation formulait des griefs précis et invitait le salarié à un changement immédiat de comportement.

Pour la Cour d’appel de Besançon (7 janvier 2020), l’employeur avait ainsi sanctionné le salarié et ne pouvait plus invoquer les mêmes faits à l’appui d’un licenciement.

La décision est approuvée par la Cour de cassation, aux motifs suivants :

– « Après avoir relevé que, dans son compte rendu d’entretien, l’employeur reprochait au salarié son attitude dure et fermée aux changements, à l’origine d’une plainte de collaborateurs en souffrance, des dysfonctionnements graves liés à la sécurité électrique et le non-respect des normes réglementaires, et l’invitait de manière impérative et comminatoire et sans délai à un changement complet et total, la cour d’appel en a exactement déduit que ce document comportant des griefs précis sanctionnait un comportement considéré comme fautif et constituait un avertissement, en sorte que les mêmes faits ne pouvaient plus justifier un licenciement ultérieur. »

L’arrêt de la Cour de cassation est conforme à sa jurisprudence selon laquelle tous les écrits de l’employeur reprochant une faute au salarié sont assimilables à un avertissement.

Ainsi, la « mise en garde » notifiée par écrit avec indication qu’elle sera portée au dossier du salarié constitue une sanction disciplinaire prenant la forme d’un avertissement (Cass. soc. 22-4-1997 n° 94-42.430).

De même, la procédure de demande d’explications écrites en vigueur dans une entreprise constitue une mesure disciplinaire dès lors qu’elle est mise en œuvre après faits considérés comme fautifs, que le salarié est tenu de répondre immédiatement aux questions posées, et que tout refus de s’exécuter après une mise en demeure constitue un grief supplémentaire pouvant justifier une sanction (Cass. soc. 19-5-2015 n° 13-26.916).

Plus récemment, la Cour de cassation a jugé que la lettre rappelant la présence non autorisée du salarié dans un local électrique et l’invitant de manière impérative à respecter les règles régissant l’accès à un tel local, stigmatise le comportement du salarié considéré comme fautif et constitue une sanction disciplinaire (Cass. soc. 10-2-2021 n° 19-18.903).

Un simple e-mail peut également être considéré comme un avertissement, en fonction de sa teneur.

À titre d’illustration, l’e-mail dans lequel l’employeur adresse divers reproches à un salarié et l’invite de façon impérative à un changement radical, avec mise au point ultérieure, sanctionne un comportement fautif et constitue un avertissement (Cass. soc. 26-5-2010 n° 08-42.893).

En revanche, un simple compte-rendu des faits reprochés au salarié lors d’un entretien n’est pas une sanction (Cass. soc. 12-11-2015 n° 14-17.615).

Dans le même sens, ne constitue pas une sanction disciplinaire la lettre par laquelle l’employeur se borne à solliciter du salarié qu’il se ressaisisse en lui faisant des propositions afin de l’aider (Cass. soc. 13-12-2011 n° 10-20.135).

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a considéré que le compte-rendu d’un entretien de suivi par lequel un supérieur hiérarchique indique au salarié qu’il sollicite une sanction à son encontre auprès du service compétent pour prononcer une telle mesure, en précisant qu’il ignore quelle en sera l’issue, n’est pas un avertissement (Cass. soc. 27-5-2021 n° 19-15507).

En conclusion, le compte-rendu de l’entretien annuel d’évaluation présente une importance significative et doit être soigneusement rédigé.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Rupture conventionnelle : quand renoncer à la clause de non-concurrence ?

Rupture conventionnelle : quand renoncer à la clause de non-concurrence ? 2560 1707 sancy-avocats.com

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La rupture conventionnelle n’est pas un dispositif nouveau puisqu’elle a été instaurée par la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail. Pourtant, nombreux sont les contrats de travail qui ne fixent pas le sort de la clause de non-concurrence en cas de rupture conventionnelle.

1/ Rappels préalables 

L’employeur peut lever la clause de non-concurrence, et donc se décharger de son obligation de verser la contrepartie financière correspondante, à condition :

– que cette possibilité soit expressément prévue par le contrat de travail ou la convention collective (Cass. soc. 28-3-2007, n° 06-40.293) ;

– de respecter le délai et le formalisme prévus par le contrat ou la convention collective (Cass. soc. 21-10-2020, n° 19-18399).

Par ailleurs, la renonciation doit être explicite et non équivoque (Cass. soc. 30-5-1990, n° 87-40.485) et notifiée individuellement au salarié (Cass. soc. 21-10-2009, n° 08-40.828).

L’employeur ne respectant pas les formalités de renonciation à la clause n’est pas délié de ses obligations et doit verser l’indemnité compensatrice (Cass. soc. 13-10-1988, n° 85-43.261).

L’application de ces principes a dû être adaptée par la jurisprudence lorsque l’employeur entend lever une clause de non-concurrence après une rupture conventionnelle. 

2/ Adaptation à la rupture conventionnelle

Dans un arrêt du 26 janvier 2022 (Cass. soc. 26-1-2022, n° 20-15.755), la Cour de cassation a jugé qu’en cas de rupture conventionnelle, l’employeur qui « entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires ».

Dans cette affaire, une directrice des ventes et son employeur avaient conclu une rupture conventionnelle le 27 mars 2015, avec une date d’effet fixée au 5 mai 2015.

Le contrat de travail contenait une clause de non-concurrence s’appliquant pendant un an à compter de la rupture effective du contrat de travail et réservant la faculté, pour l’employeur, de renoncer à cette clause par décision notifiée au salarié à tout moment durant le préavis ou dans un délai maximum d’un mois à compter de la fin du préavis (ou, en l’absence de préavis, de la notification du licenciement).

Le 11 septembre 2015, la salariée a sollicité le versement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence. En réponse, son ancien employeur l’a dispensée de toute obligation de non-concurrence « depuis son départ de l’entreprise. »

Par arrêt du 19 février 2020, la Cour d’appel de Lyon a condamné l’employeur au paiement de la contrepartie financière, mais seulement pour la période du 5 mai 2015 au 11 septembre 2015.

Cette décision est censurée par la Cour de cassation au motif suivant :

– « En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que la date de rupture fixée par les parties dans la convention de rupture était le 5 mai 2015, ce dont il résultait que la renonciation par l’employeur au bénéfice de la clause de non-concurrence intervenue le 11 septembre 2015 était tardive, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »

Il en résulte qu’en matière de rupture conventionnelle, l’employeur, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires.

3/ Confirmation de jurisprudence

L’arrêt du 26 janvier 2022 s’inscrit dans le cadre d’une jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation désormais bien établie.

En effet, la Cour de cassation considère qu’en cas de rupture du contrat de travail avec dispense d’exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l’obligation de non-concurrence correspond à celle du départ effectif de l’entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires (Cass. soc. 13-3-2013, nº 11-21.150).

Elle en déduit que l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis doit, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise (Cass. soc. 21-1-2015, nº 13-24.471).

Cette jurisprudence est également appliquée en cas de rupture du contrat de travail résultant de l’adhésion du salarié au CSP, l’employeur devant, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise (Cass. soc. 2-3-2017, nº 15-15.405).

Ces solutions se justifient par le fait que le salarié ne peut pas être laissé dans l’incertitude quant à l’étendue de sa liberté de travailler.

Précisons enfin que, dans un arrêt du 29 janvier 2014 (Cass. soc. 29-1-2014, n° 12-22116), en présence d’une clause de non-concurrence stipulant que l’employeur pouvait renoncer à son application « au plus tard dans les quinze jours qui suivent la première présentation de la notification de la rupture du contrat de travail », la Cour de cassation a considéré que ce délai a pour point de départ la date de la rupture fixée par la convention de rupture.

En conclusion, afin d’éviter tout litige, la convention de rupture conventionnelle peut utilement régler le sort de l’obligation de non-concurrence ou fixer ses modalités de renonciation.

Xavier Berjot
Avocat associé
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CSG/CRDS sur l’indemnité pour licenciement abusif : du nouveau

CSG/CRDS sur l’indemnité pour licenciement abusif : du nouveau 2560 2048 sancy-avocats.com

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Depuis le 1er janvier 2022, la direction de la Sécurité sociale a allégé l’assujettissement à CSG/CRDS des indemnités allouées au salarié en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

1/ L’ancienne doctrine 

Antérieurement au 1er janvier 2022, l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse était exonérée de CSG et de CRDS dans la limite :

– des montants minimaux fixés à l’article L. 1235-3 du Code du travail (barème « Macron ») ;

– et de 2 PASS (soit 82.272 €) (BOSS Indemnités de rupture § 1901, version du 01/04/2021).

Pour déterminer le régime social de ces indemnités, il était nécessaire de tenir compte du montant déjà exonéré au titre de l’indemnité légale, conventionnelle ou contractuelle de licenciement.

Les montants prévus par le barème « Macron » étant relativement faibles, cette position revenait à soumettre très vite, à CSG/CRDS, l’indemnité pour licenciement sans cause réelle.

Par ailleurs, la position de l’administration était contraire aux dispositions de l’article L. 136-1-1, III-5°, a) du Code de sécurité sociale prévoyant une exonération de CSG et de CRDS applicables aux indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail et à hauteur du montant prévu par la loi.

2/ Les nouveautés 

Désormais, l’indemnité octroyée par le juge en cas de licenciement sans cause réelle ou sérieuse est exonérée de CSG et de CRDS dans la limite de deux PASS.

L’administration justifie sa position au regard de l’article L. 136-1-1, III, 5° a) du Code de la sécurité sociale :

« III.-Par dérogation au I, sont exclus de l’assiette de la contribution mentionnée à l’article L. 136-1 les revenus suivants :

5° a) Indépendamment de leur assujettissement à l’impôt sur le revenu, les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail, dans la limite du plus petit des montants suivants :

– le montant prévu par la convention collective de branche, l’accord professionnel ou interprofessionnel ou la loi si ce dernier est le plus élevé, ou, en l’absence de montant légal ou conventionnel pour le motif concerné, le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ;

– le montant fixé en application du 7° du II de l’article L. 242-1 du présent code » (soit 2 PASS).

Par exception, les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail d’un montant supérieur à dix fois le PASS (soit 411.360 €) sont intégralement assujetties.

En conclusion, la direction de la Sécurité sociale ne fait référence aux montants plancher du barème d’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Rappelons que le BOSS est opposable à l’administration.

3/ Les règles maintenues

Les indemnités accordées par le juge, en cas de licenciement abusif, irrégulier ou nul, sont exonérées de cotisations de sécurité sociale dans la limite de deux PASS (CSS. art. L242-1, II-7° et CGI. art. 80 duodecies).

Comme le précise l’administration, en dehors des indemnités pouvant être exclues de l’assiette des cotisations, une somme représentative de dommages-intérêts indemnisant un préjudice autre que la perte de salaire peut être exclue de l’assiette des cotisations (BOSS rupture, § 1720).

Une décision de justice peut seule constater la réalité et la nature du préjudice et vérifier ainsi que les sommes allouées sont des dommages-intérêts indemnisant un préjudice, et permettre leur exclusion de l’assiette des cotisations et contributions sociales.

Pour davantage d’informations sur le régime social et fiscal de l’indemnité pour licenciement abusif, le lecteur peut consulter l’article suivant : Indemnité pour licenciement abusif : le régime social et fiscal.

Xavier Berjot
Avocat associé
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Le licenciement verbal

Le licenciement verbal 2560 1707 sancy-avocats.com

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L’employeur qui décide de licencier un salarié doit notifier le licenciement par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (C. trav. art. L. 1232-6). Même si cette formalité n’est qu’un moyen de preuve, la jurisprudence sanctionne le licenciement verbal.

1/ Les hypothèses du licenciement verbal

La lettre de licenciement comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur (C. trav. art. L. 1232-6, al. 2).

Il en résulte qu’est irrégulier le licenciement notifié verbalement au salarié.

Ainsi, est sans cause réelle et sérieuse le licenciement d’une salariée notifié par lettre du 13 mars 1990, alors que l’intéressée s’était vu interdire l’accès à son bureau dès le 2 mars 1990 (Cass. soc. 29-10-1996 n° 93-44.245).

De même, la cour d’appel, ayant constaté qu’avant l’entretien préalable les employés de la banque signalaient que le directeur d’agence ne faisait plus partie du personnel, qu’il avait été licencié et remplacé, a pu décider que son licenciement ne procédait pas d’une cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 19-3-2008 n° 07-40.489).

La jurisprudence de la Cour de cassation n’est cependant pas solidement établie sur la question du licenciement verbal.

En effet, cette dernière a pu juger que la décision prise avant l’entretien préalable et communiquée par note interne à d’autres salariés constitue une irrégularité de procédure mais n’a pas pour effet de priver la rupture de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 29-10-2003 n° 01-44.354).

Un arrêt antérieur avait également considéré que la seule circonstance pour l’employeur, avant l’entretien préalable, de rechercher un nouveau salarié, n’est pas de nature à rendre irrégulière la procédure de licenciement (Cass. soc. 2-4-1992 n° 90-42.030).

Les juges du fond sont également partagés sur la qualification à donner aux agissements de l’employeur faisant part de sa volonté de se séparer du salarié, directement ou indirectement, avant la notification du licenciement.

A titre d’exemple, la désactivation du badge d’accès aux locaux et l’attribution de ses fonctions à d’autres salariés avant l’engagement de la procédure de licenciement ne suffisent pas à caractériser la volonté de l’employeur de licencier le salarié avant la tenue de l’entretien préalable (CA Paris 28-3-2012 n° 10/06051).

En revanche, la divulgation faite par le dirigeant sur sa volonté de rompre le contrat révèle la décision de licencier le salarié avant le déclenchement de la procédure de licenciement, et la rupture s’analyse alors en un licenciement verbal et donc abusif (CA Paris 2-11-2006 n° 06-2683).

Parallèlement à l’engagement d’une procédure de licenciement, l’employeur peut souhaiter notifier au salarié une mise à pied à titre conservatoire, dans l’attente de la décision intervenir.

Les circonstances dans lesquelles cette mesure intervient peuvent, parfois, caractériser un licenciement verbal.

Par principe, en l’absence d’éléments établissant la décision de licenciement, la mise à pied conservatoire, s‘inscrivant dans le cadre de la procédure de licenciement, ne constitue ni la marque d’une décision de rupture ni un licenciement verbal (Cass. soc. 7-7-2015 n° 14-14.737).

Il en est de même de la dispense d’activité notifiée au salarié lors de sa convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement (Cass. soc. 5-11-2014 n° 13-20.882).

En sens inverse, un salarié fait l’objet d’un licenciement verbal s’il doit remettre les clefs lui permettant d’accéder à son lieu de travail, ayant ainsi été empêché de travailler pendant plusieurs jours en l’absence de mise à pied formelle (Cass. soc. 9-3-2011 n° 09-65.441).

Un licenciement verbal est également caractérisé lorsque le salarié est mis « en disponibilité » et qu’il se voit refuser l’accès à l’établissement (Cass. soc. 17-1-2013 n° 11-25.277).

2/ Les conséquences du licenciement verbal

Le licenciement verbal, malgré son irrégularité, entraîne la rupture du contrat de travail et fixe le point de départ du préavis (Cass. soc. 9-4-1992 n° 90-42.335).

Il en résulte que l’employeur a l’obligation de tenir à la disposition du salarié – ou de lui adresser – les documents de fin de contrat, dont l’attestation Pôle Emploi, le certificat de travail et le reçu pour solde de tout compte.

Par ailleurs, le salarié est éligible à la portabilité des garanties complémentaires santé et prévoyance, dans les conditions fixées à l’article L. 911-8 du Code de la sécurité sociale.

Le salarié ayant fait l’objet d’un licenciement verbal ne pouvant être régularisé par l’envoi postérieur d’une lettre de rupture, cette mesure est nécessairement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 28-5-2008 n° 07-41.735).

Le montant de l’indemnité mise à la charge de l’employeur oscille entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau figurant à l’article L. 1235-3 du Code du travail (« barème Macron »).

Cette indemnité, exprimée en mois de salaire brut, varie selon l’ancienneté du salarié et le nombre de salariés dans l’entreprise (moins de 11 ou 11 et plus).

Une cour d’appel ne peut pas débouter un salarié de ses demandes d’indemnités consécutives à son licenciement au motif que les faits qui lui étaient reprochés étaient graves, alors qu’elle avait retenu que le salarié avait été licencié verbalement (Cass. soc. 23-6-1998 n° 96-41.688).

Enfin, la Cour de cassation considère qu’en cas de licenciement verbal, le juge peut ordonner à l’employeur de délivrer la lettre de licenciement.

A titre d’exemple, une cour d’appel ne peut pas rejeter la demande de remise d’une lettre de licenciement formée par le salarié au motif que, la rupture du contrat de travail ayant été constatée, il n’y avait pas lieu d’ordonner une telle délivrance (Cass. soc. 28-2-2001 n° 98-45.667).

Le bureau de conciliation du Conseil de prud’hommes peut ordonner la remise de la lettre au salarié (Cass. soc. 4-12-1990 n° 87-44.824) comme le juge des référés, sauf en présence d’une contestation sérieuse (Cass. soc. 3-1-1990 n° 88-44.938).

Xavier Berjot
Avocat associé
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Cadeaux d’affaires : réglementation et fiscalité

Cadeaux d’affaires : réglementation et fiscalité 418 109 sancy-avocats.com

Article de Xavier BERJOT pour le magazine L’activité Immobilière (Février 2022)

Cadeaux

Licenciement d’un membre du CSE : pas de consultation du comité dans les entreprises de moins de 50 salariés

Licenciement d’un membre du CSE : pas de consultation du comité dans les entreprises de moins de 50 salariés 2560 1709 sancy-avocats.com

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Dans un avis du 29 décembre 2021 (n°45069), le Conseil d’État a considéré qu’en l’absence de dispositions conventionnelles contraires, le CSE n’a pas à être consulté sur le projet de licenciement d’un de ses membres, dans les entreprises de 11 à 49 salariés.

1/ Rappels sur la procédure de licenciement d’un membre du CSE

Le licenciement envisagé par l’employeur d’un membre élu à la délégation du personnel au CSE titulaire ou suppléant ou d’un représentant syndical au CSE ou d’un représentant de proximité est soumis au CSE, qui donne un avis sur le projet de licenciement (C. trav. art. L. 2421-3).

NB. Pour mémoire, d’autres cas de protection existent.

Afin de permettre au CSE de se prononcer, l’employeur doit nécessairement l’informer du ou des mandat(s) détenu(s) par le salarié (CE 13-11-1992, n° 103649) et des motifs du licenciement envisagé (Cass. crim. 3-12-2002, n° 02-81452).

Lorsqu’il n’existe pas de CSE dans l’entreprise ou l’établissement, l’inspecteur du travail est saisi directement.

Le salarié protégé doit être auditionné par le CSE, sous peine de nullité de l’avis du comité (CE 29-6-1990, n° 87944).

Si le salarié protégé est membre du CSE, il doit être convoqué à un double titre : en qualité de salarié devant être auditionné et en qualité de membre du CSE.

Enfin, s’il est membre du CSE, le salarié protégé doit pouvoir prendre part au vote (Cass. soc. 11-6-1981, n° 79-41592).

La procédure de consultation du CSE doit intervenir après la tenue de l’entretien préalable du salarié protégé.

Enfin, une fois émis l’avis du CSE, l’employeur dispose d’un délai de 15 jours pour présenter une demande d’autorisation de licenciement à l’inspecteur du travail (C. trav. art. R. 2421-10, al. 3).

2/ Le cas des entreprises de moins de 50 salariés

Avant l’avis du Conseil d’État, la question se posait de savoir si le CSE devait être consulté sur le projet de licenciement d’un de ses membres uniquement dans les entreprises de 50 salariés et plus ou aussi dans les entreprises dont l’effectif est inférieur.

En effet, l’obligation de consultation préalable du CSE est prévue à l’article L. 2421-3 du Code du travail qui dispose que le comité donne son avis « dans les conditions prévues à la section 3 du chapitre II du titre Ier du livre III »

Or, cette section est relative aux attributions du CSE dans les entreprises d’au moins 50 salariés.

La Direction générale du travail indiquait pour sa part que :

– « Lorsque le mandat du salarié protégé le requiert, le comité social et économique disposant des attributions consultatives dans les entreprises de 50 salariés et plus (C. trav., art. L. 2421-3 et L. 2421-4) doit être consulté pour tout licenciement quel qu’en soit le motif (…). » (guide relatif aux décisions administratives en matière de licenciement des salariés protégés du 11-10-2019).

Dans son avis du 29 décembre 2021, Le Conseil d’État adopte cette position :

– dans les entreprises comptant entre 11 et 49 salariés, le CSE n’a pas à être consulté sur le projet de licenciement d’un membre élu à la délégation du personnel au CSE titulaire ou suppléant ou d’un représentant syndical au CSE ou d’un représentant de proximité du CSE,

– sauf si une telle consultation a été prévue par un accord collectif conclu en application de l’article L. 2312-4 du Code du travail.

Rappel : L’article L. 2312-4 dispose que « les dispositions du présent chapitre ne font pas obstacle aux dispositions plus favorables relatives aux attributions du comité social et économique résultant d’accords collectifs de travail ou d’usages. » 

Le Conseil d’État rappelle enfin que, dans les entreprises comptant au moins 50 salariés, la consultation du CSE est requise dans tous les cas.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Indemnité pour licenciement abusif : le régime social et fiscal

Indemnité pour licenciement abusif : le régime social et fiscal 2560 1707 sancy-avocats.com

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Dans un arrêt du 15 décembre 2021 (n° 20-18.782), la Cour de cassation vient d’affirmer que les montants fixés par le barème Macron sont exprimés en mois de salaire bruts. Cette décision offre l’opportunité de rappeler le régime social et fiscal de l’indemnité pour licenciement abusif.

1/ Le régime social 

Les indemnités accordées par le juge, en cas de licenciement abusif, irrégulier ou nul, sont exonérées de cotisations de sécurité sociale dans la limite de deux plafonds annuels de la sécurité sociale (PASS), soit 82.272 € en 2021 comme en 2022 (CSS. art. L. 242-1, II-7° et CGI. art. 80 duodecies).

Pour déterminer le régime social de ces indemnités, il est nécessaire de tenir compte du montant déjà exonéré au titre de l’indemnité légale, conventionnelle ou contractuelle de licenciement.

Par ailleurs, l’indemnité pour licenciement abusif est exonérée de CSG et de CRDS dans la limite des montants minimaux fixés à l’article L. 1235-3 du Code du travail et dans la limite de deux PASS (indemnité de licenciement et indemnité octroyée par le juge).

L’exonération ne joue que si le montant de l’indemnité versée n’excède pas 10 fois le PASS, à défaut de quoi l’indemnité est intégralement assujettie à cotisations.

Enfin, comme le précise l’administration, en dehors des indemnités pouvant être exclues de l’assiette des cotisations, une somme représentative de dommages-intérêts indemnisant un préjudice autre que la perte de salaire peut être exclue de l’assiette des cotisations (BOSS rupture).

Une décision de justice peut seule constater la réalité et la nature du préjudice et vérifier ainsi que les sommes allouées sont des dommages-intérêts indemnisant un préjudice, et permettre leur exclusion de l’assiette des cotisations et contributions sociales.

2/ Le régime fiscal 

L’article 80 duodecies du CGI exonère intégralement de l’impôt sur le revenu les indemnités mentionnées à l’article à l’article L. 1235-3 du Code du travail.

Il convient de préciser que ces indemnités sont exonérées sans préjudice de l’indemnité de licenciement, qui suit son propre régime d’exonération.

Sont également intégralement exonérées d’impôt sur le revenu les indemnités qui sanctionnent :

– Le licenciement irrégulier, intervenu en méconnaissance des règles de procédure prévues par le Code du travail. L’indemnité accordée par le juge en réparation de ces irrégularités de forme ne peut excéder un mois de salaire (C. trav. art. L. 1235-2) ;

– Le licenciement jugé nul notamment pour motif discriminatoire (C. trav. art. L. 1235-3-1) ;

– Le licenciement intervenu alors que la procédure de licenciement est nulle conformément aux dispositions du premier alinéa de l’article L. 1235-10 du Code du travail (relatif au PSE) ainsi que le non-respect par l’employeur des procédures de consultation du CSE ou d’information de l’autorité administrative (C. trav. art. L. 1235-12) et le non-respect de la priorité de réembauche prévue à l’article L. 1233-45 du Code du travail en cas de licenciement collectif pour motif économique.

Enfin, les dommages-intérêts versés au salarié en réparation d’un préjudice lié à l’exécution du contrat et n’ayant aucun lien avec un élément de salaire ne sont pas visés par les articles 79 à 81 quater du Code général des impôts (CGI).

Pour rappel, ces articles définissent le revenu imposable et sont compris dans un § V du CGI intitulé « V : Traitements, salaires, pensions et rentes viagères (Articles 79 à 90) ».

Ces dommages-intérêts ne sont donc pas soumis à l’impôt sur le revenu.

Par exception, il résulte de l’article 80 du CGI que sont imposées comme des traitements et salaires les indemnités, au-delà d’un million d’euros, « perçues au titre du préjudice moral fixées par décision de justice. » 

3/ Le barème Macron exprimé en brut

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 15 décembre 2021, un salarié contestait son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

La Cour d’appel de Nancy (CA Nancy, le 11 juin 2020) avait condamné l’employeur à payer au salarié la somme nette de 63.364,20 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Pour condamner l’employeur à verser au salarié la somme nette de 63.364,20 euros, les magistrats avait retenu que, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération du salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l’entreprise et de l’effectif de celle-ci, il y avait lieu de fixer le préjudice à cette somme nette, en application des dispositions de l’article L. 1235-3 du Code du travail.

L’arrêt est cassé au visa de ce texte, la Cour de cassation affirmant que le salarié ne pouvait prétendre, au regard de son ancienneté de 29 ans dans l’entreprise et au montant de son salaire brut de 3.168,21 euros, qu’à une indemnité maximale de 63.364,20 euros bruts.

Le barème Macron s’entend donc « brut de cotisations » et non pas « net. »

A noter : cet arrêt de la Cour de cassation ne se prononce pas sur la conformité du barème Macron aux textes internationaux.

La Cour de cassation a considéré, par avis du 17 juillet 2019, que ce barème ne violait pas le principe de réparation adéquate posé par l’article 10 de la convention n° 158 de l’OIT sur le licenciement (Cass. 17-7-2019, avis n° 19-70.010 et 19-70.011).

Après cet avis, une décision de la Cour de cassation est attendue dans les prochains mois sur le sujet.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Durée de travail : la requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps complet

Durée de travail : la requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps complet 2560 1707 sancy-avocats.com

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Le contrat de travail à temps partiel, CDI ou CDD, doit obligatoirement être écrit et comporter des mentions obligatoires, notamment sur la répartition de la durée du travail. Les sanctions financières peuvent être lourdes, comme l’illustre un arrêt récent.

1/ Les mentions obligatoires du contrat à temps partiel

Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat nécessairement écrit qui doit mentionner (C. trav. art. L. 3123-6) :

1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d’aide à domicile et les salariés relevant d’un accord collectif, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;

2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;

3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d’aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;

4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 (loi « Travail »), les dispositions de l’article L. 3123-14 du Code du travail, prévoyant les mentions impératives du contrat de travail à temps partiel, ont été codifiées à l’article L. 3123-6 et font partie des dispositions d’ordre public.

L’exigence légale d’un écrit s’applique non seulement au contrat de travail à temps partiel mais aussi à ses avenants modifiant la durée du travail ou sa répartition entre les jours de la semaine ou les semaines du mois (Cass. soc. 23-11-2016 n° 15-18.093).

2/ Les cas de requalification 

Pour la Cour de cassation, l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet.

Il incombe alors à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue et, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur.

A titre d’exemple, doit être requalifié à temps complet le contrat de travail d’un promoteur de vente engagé selon CDI à temps partiel, travaillant par intermittence et rencontrant des variations importantes de son horaire mensuel (Cass. soc. 30-6-2010 n° 08-45.400).

De même, une Cour d’appel, ayant constaté qu’une lettre d’embauche fixait une durée de 126 heures par mois, mais renvoyait pour la répartition de ces heures à un document qui n’avait jamais été établi et que l’employeur ne renversait pas la présomption de travail à temps plein qui en résultait, estime à bon droit que le contrat de travail à temps partiel doit être requalifié en contrat de travail à temps plein (Cass. soc. 22-10-2008 n° 07-43.226).

Dans un arrêt du 17 novembre 2021 (Cass. soc. 17-11-2021 n° 20-10.734), la Cour de cassation vient de réaffirmer cette règle, au visa de l’article L. 3123-14 du Code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.

En l’espèce, un salarié avait été embauché en tant que rédacteur par CDI à temps partiel à compter du 1er juin 2009, avec une reprise d’ancienneté au 1er septembre 2006.

Son contrat de travail mentionnait qu’il était soumis à un horaire mensuel de 86,67 heures et que ses horaires seraient de 8 h 30 à 12 h 30 ou de 14 h à 18 heures, à son choix, sans la possibilité de réaliser des heures complémentaires.

Le contrat était muet concernant la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

Sollicitant la requalification de son contrat à temps partiel en contrat à temps complet, le salarié a été débouté par la Cour d’appel de Lyon, ayant relevé que le contrat de travail fixait une rémunération fixe mensuelle sur une base de 86,67 heures correspondant à un temps de travail moyen de 20 heures par semaine, soit pour 4 heures par jour, nécessairement une semaine de 5 jours ouvrés, de sorte que le salarié ne pouvait prétendre que son contrat de travail ne faisait pas état d’une répartition de son temps de travail.

L’arrêt est cassé par la Cour de cassation au motif suivant :

« En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que le contrat de travail ne mentionnait pas la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »

3/ Les moyens de défense de l’employeur 

Le seul défaut dans le contrat de travail de la mention des limites dans lesquelles peuvent être effectuées les heures complémentaires au-delà du temps de travail fixé par le contrat à temps partiel n’entraîne pas sa requalification en contrat à temps complet (Cass. soc. 25-1-2017 15-16.708).

En pratique, l’employeur peut donc rapporter la preuve des heures de travail accomplies par le salarié à temps partiel, pour faire échec à sa demande de requalification du contrat à temps complet.

Tel est le cas, par exemple, d’un entraîneur de natation engagé sans contrat de travail écrit mais qui, au regard des missions qui lui étaient confiées, avait connaissance de sa durée de travail exacte (Cass. soc. 19-10-2016 n° 15-12.983).

En effet, les plannings des jours et heures où l’employeur utilisait les piscines de l’agglomération ainsi que les relevés mensuels signés des heures accomplies par le salarié démontraient qu’il n’était pas dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il allait travailler et qu’il n’était pas dans l’obligation de se tenir à la disposition de son employeur.

La même solution a été adoptée concernant le salarié d’une entreprise de nettoyage engagé comme agent de service par contrat à temps partiel ne mentionnant ni la durée de travail ni sa répartition (Cass. soc. 5-10-2011 n° 10-20.279).

En effet, la Cour d’appel avait constaté que ce salarié effectuait des horaires stables et réguliers attestés par les plannings versés aux débats par la société et un courrier du salarié.

En définitive, la Cour de cassation adopte une démarche pragmatique qui permet au salarié, mais également à l’employeur, de faire valoir leurs droits.

De la même manière, la jurisprudence considère que le dépassement des heures complémentaires au-delà du dixième du temps contractuel et le défaut de la mention, dans le contrat de travail, des limites dans lesquelles peuvent être effectuées les heures complémentaires au-delà du temps de travail fixé par le contrat à temps partiel n’entraînent pas sa requalification en contrat à temps complet (Cass. soc. 25-1-2017 n° 15-16.708).

4/ Les conséquences de la requalification

En cas de requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet, la durée du travail en résultant correspond à la durée légale de travail ou, si elle est inférieure, à la durée fixée conventionnellement (Cass. soc. 3-6-2015 n° 13-21.671).

L’employeur peut donc être condamné à verser au salarié un rappel de salaire (outre les congés afférents) sur la base d’un temps plein.

La Cour de cassation considère même qu’en cas de requalification, la rémunération est due au salarié sur le fondement d’un contrat de travail à temps complet et qu’il n’y a pas lieu d’exclure les périodes pendant lesquelles il a exercé un autre emploi et pris un congé sans solde (Cass. soc. 14-9-2016 n° 15-15.944).

L’action en requalification du contrat de travail en contrat à temps complet est une action en paiement du salaire soumise au délai de prescription de 3 ans prévu par l’article L. 3245-1 du Code du travail (Cass. soc. 19-12-2018 n° 16-20.522 ; Cass. soc. 30-6-2021 n° 19-10.161).

Par ailleurs, en cas de rupture de la relation de travail, l’employeur peut, le cas échéant, être condamné à verser au salarié une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé correspondant à 6 mois de salaire (C. trav. art. L. 8223-1).

Ainsi, est justifiée la condamnation de l’employeur à verser cette indemnité à des distributeurs de prospectus et journaux gratuits, dès que lors que celui-ci n’établissait pas que les salariés concernés effectuaient un travail à temps partiel (Cass. soc. 25-5-2005 n° 02-47.634).

Enfin, en fonction des circonstances, le salarié à temps partiel dont le contrat de travail n’est pas régulier peut prendre acte de la rupture de son contrat aux torts de l’employeur ou en solliciter la résiliation judiciaire.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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