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Xavier Berjot

Licenciement disciplinaire : comment déterminer la qualification de la faute ?

Licenciement disciplinaire : comment déterminer la qualification de la faute ? 1707 2560 sancy-avocats.com

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Le licenciement disciplinaire n’est justifié que si l’employeur parvient à caractériser une faute à l’encontre du salarié. Cette notion de faute n’est pas toujours facile à déterminer et il en va de même de son degré de gravité. 

1/ La notion de faute 

Le Code du travail ne définit pas la notion de faute ou de comportement fautif, et la jurisprudence en a donc progressivement forgé les contours.

Le comportement fautif est celui qui résulte d’un fait (ou d’un ensemble de faits) établi et imputable au salarié, constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail.

A titre d’illustration, constitue une faute le fait, pour un salarié cadre, d’effectuer un travail personnel pour le compte d’un ami pendant l’horaire normal de travail, en période d’extrême surcharge et au détriment des dossiers internes (Cass. soc. 4-6-1997 n° 94-43568).

De même, commet une faute le chauffeur routier qui se fait accompagner dans son travail par son épouse, au mépris de la réglementation professionnelle (CA Rouen 8-2-2000 n° 97-1301).

En tout état de cause, la faute implique un comportement volontaire ou une mauvaise volonté délibérée du salarié.

A l’inverse, les insultes proférées par un salarié envers son employeur ne peuvent pas justifier son licenciement dès lors que l’intéressé pensait s’adresser par téléphone non à son supérieur hiérarchique mais à un proche (Cass. soc. 28-1-2015 n° 14-10.853).

Par ailleurs, la faute se distingue nécessairement de l’insuffisance professionnelle ou de résultats, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation.

Il appartient en effet au juge de rechercher si les mauvais résultats d’un salarié procèdent soit d’une insuffisance professionnelle, soit d’une faute imputable au salarié (Cass. soc. 3-4-2001 n° 98-44.069).

Lorsque l’employeur invoque un motif disciplinaire dans la lettre de licenciement, le juge est tenu par cette qualification disciplinaire.

Il en résulte qu’une cour d’appel ne peut pas retenir qu’un licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors que le fait qu’elle retient comme constitutif d’une telle cause ne présente pas de caractère fautif (Cass. soc. 26-11-2014 n° 13-22.247).

2/ La gravité de la faute 

L’appréciation du degré de gravité d’une faute tient compte d’une multiplicité de critères tels que la nature des faits, l’ancienneté du salarié, son passé disciplinaire, le contexte, l’attitude de l’employeur, etc.

Le contrat de travail et, surtout, le règlement intérieur, listent parfois des faits considérés comme fautifs et pouvant justifier un licenciement.

Toutefois, il appartient toujours au juge de contrôler la qualification des faits et d’exercer un contrôle de proportionnalité de la sanction à la faute.

Il a été ainsi jugé que les dispositions du règlement intérieur relatives à la sanction disciplinaire ne lient pas le juge auquel il appartient d’exercer son pouvoir d’appréciation en recherchant si le refus du salarié d’exécuter une mission caractérise une faute rendant impossible son maintien dans l’entreprise durant le préavis (Cass. soc. 2-5-2000 n° 97-44.091).

Si le juge du fond dispose d’un pouvoir d’appréciation, il convient de préciser que la Cour de cassation exerce un contrôle strict sur la qualification de la faute grave et de la faute lourde.

La faute grave est, selon la formule de la Cour de cassation, « celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise » (Soc. 27-9-2007 n° 06-43867).

Cette faute résulte donc d’un fait (ou d’un ensemble de faits) imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle, qu’elle rend impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise.

La faute lourde est celle commise par le salarié avec l’intention de nuire à l’employeur. Cette faute ne se caractérise donc pas, tant par sa gravité, que par son caractère intentionnel (Cass. soc. 13-4-2022 n° 20-14.926).

Ainsi, constitue une faute lourde le fait, pour un responsable d’exploitation, de commander la livraison d’une importante quantité de fuel, aux fins de se livrer volontairement à une malversation relevant d’une intention délibérée de nuire aux intérêts de l’entreprise (Cass. soc. 15-11-2011 n° 10-22789).

En revanche, le détournement d’argent, par un chef comptable, ne constitue pas une faute lourde, mais une volonté de s’enrichir (Cass. soc. 18-11-2003 n° 01-44102).

En conclusion, rappelons que le juge ne peut pas aggraver la qualification de la faute retenue par l’employeur (Cass. soc. 20-12-2017 n° 16-17.199).

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Loi « Santé » : les nouveautés depuis le 31 mars 2022

Loi « Santé » : les nouveautés depuis le 31 mars 2022 2560 2560 sancy-avocats.com

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La loi n°2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail a pour objectif affiché de de réformer la santé au travail. Trois décrets d’application transcrivent concrètement cette ambition à effet au 31 mars 2022. 

1/ Les évolutions du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) 

Le décret n° 2022-395 du 18 mars 2022 prévoit que le DUER doit désormais être mis à jour au moins chaque année dans les entreprises de 11 salariés et plus (C. trav. art. R. 4121-2, 1°).

En synthèse, le DUER doit être actualisé :

1° Au moins chaque année dans les entreprises d’au moins 11 salariés ;

2° Lors de toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ;

3° Lorsqu’une information supplémentaire intéressant l’évaluation d’un risque est portée à la connaissance de l’employeur.

Par ailleurs, la mise à jour du programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail (ou de la liste des actions de prévention et de protection) doit être effectuée à chaque mise à jour du DUERP.

Rappelons, à cet égard, que la loi « Santé » a prévu que les résultats de l’évaluation des risques doivent donner lieu à :

– un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail (entreprises de 50 salariés et plus) ;

– la définition d’actions de prévention des risques et de protection des salariés (entreprises de moins de 50 salariés).

Enfin, selon le décret n° 2022-395 du 18 mars 2022, le DUERP et ses versions antérieures doivent être tenus, pendant une durée de 40 ans à compter de leur élaboration, à la disposition de toute personne intéressée listée par le texte (travailleurs et anciens travailleurs, membres du CSE, inspection du travail, etc.) (C. trav. art. R. 4121-4).

Les travailleurs et anciens travailleurs peuvent communiquer les éléments mis à leur disposition aux professionnels de santé en charge de leur suivi médical.

2/ Les changements dans le suivi médical des salariés

a. Visite de reprise

Depuis le 31 mars 2022, pour les arrêts de travail consécutifs à un accident ou une maladie non professionnels et débutant après le 31 mars 2022, seule une absence d’au moins 60 jours impose l’organisation d’une visite médicale de reprise (C. trav. art. R. 4624-31).

En synthèse, le travailleur bénéficie désormais d’un examen de reprise du travail par le médecin du travail :

1° Après un congé de maternité ;

2° Après une absence pour cause de maladie professionnelle ;

3° Après une absence d’au moins trente jours pour cause d’accident du travail ;

4° Après une absence d’au moins 60 jours pour cause de maladie ou d’accident non professionnel.

Dès que l’employeur a connaissance de la date de la fin de l’arrêt de travail, il doit saisir le service de santé au travail qui organise l’examen de reprise le jour de la reprise effective du travail, et au plus tard dans un délai de 8 jours suivant cette reprise.

b. Visite de préreprise

En vue de favoriser le maintien dans l’emploi, les travailleurs en arrêt de travail d’une durée de plus de 30 jours (au lieu de 3 mois auparavant) peuvent bénéficier d’une visite de préreprise (C. trav. art. R. 4624-29).

Ces dispositions entrent en vigueur le 31 mars 2022 et s’appliquent aux arrêts de travail débutant après cette date.

c. Visite médicale « postexposition »

La loi « Santé » a instauré une visite et un suivi spécifiques en faveur des salariés qui font l’objet d’un suivi médical renforcé et qui ont été exposés à des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité (C. trav. art. L. 4624-2-1).

Le décret n° 2022-372 du 16 mars 2022 détaille les modalités pratiques de cette visite (C. trav. art. R. 4624-28-1).

3/ La définition des modalités de financement de la formation « santé » du CSE 

les membres du CSE, ainsi que le référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes bénéficient de la formation nécessaire à l’exercice de leurs missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (C. trav. art. L. 2315-18).

la loi « Santé » a permis aux opérateurs de compétences (Opco) de prendre en charge les coûts de formation engagés par les entreprises de moins de 50 salariés.

le décret n° 2022-395 du 18 mars 2022 précise les modalités de financement, par les Opco, de ces formations « santé. »

En substance, les dépenses de formation éligibles à cette prise en charge sont les suivantes (C. trav. art. R. 6332-40) :

– les coûts pédagogiques ;

– la rémunération et les charges sociales légales et conventionnelles des salariés en formation, dans la limite du coût horaire du Smic par heure de formation ;

– les frais annexes de transport, de restauration et d’hébergement afférents à la formation ;

– les frais de garde d’enfants ou de parents à charge lorsque les formations se déroulent pour tout ou partie en dehors du temps de travail.

4/ La prévention de la désinsertion professionnelle 

Enfin, les décrets n° 2022-373 et n° 2022-372 ont explicité différents dispositifs visant à lutter contre la désinsertion professionnelle des salariés en arrêt de travail et des salariés reconnus inaptes ou en voie d’inaptitude.

Tout d’abord, le salarié dont la durée d’absence au travail est supérieure à 30 jours peut bénéficier, à son initiative ou à celle de son employeur, d’un rendez-vous de liaison avec ce dernier, associant le service de prévention et de santé au travail (C. trav. art. D. 1226-8-1).

Le rendez-vous a pour objet d’informer le salarié qu’il peut bénéficier d’actions de prévention de la désinsertion professionnelle, de l’examen de préreprise avec le médecin du travail et des mesures d’aménagement du poste et du temps de travail.

Par ailleurs, le salarié en rééducation professionnelle a droit à des indemnités journalières (IJSS) dont le montant est égal à celui des IJSS perçues pendant l’arrêt de travail précédant la rééducation professionnelle (CSS art. R. 323-3-1, I, al. 1 et 2).

L’indemnisation du salarié pendant sa période de rééducation professionnelle ne peut pas être inférieure à la rémunération perçue avant l’arrêt de travail précédant la mise en place de la convention de rééducation professionnelle en entreprise (CRPE) (C. trav. art. R. 5213-15).

Enfin, le bénéfice d’un « essai encadré » est ouvert aux salariés en arrêt de travail en raison d’un accident ou d’une maladie, d’origine professionnelle ou non (aucune condition d’arrêt de travail n’étant fixée).

L’essai encadré permet aux salariés d’évaluer, pendant cet arrêt de travail, au sein de leur entreprise ou d’une autre entreprise, la compatibilité d’un poste de travail avec leur état de santé (CSS art. D. 323-6).

Ce dispositif est déployé par le service social de la caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat), avec l’accord du médecin traitant, du médecin-conseil et du médecin du travail assurant le suivi du salarié.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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La preuve des heures supplémentaires facilitée

La preuve des heures supplémentaires facilitée 1738 2560 sancy-avocats.com

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Dans plusieurs décisions récentes, la Cour de cassation confirme sa jurisprudence favorable au salarié au sujet de l’administration de la preuve des heures supplémentaires. Elle invite l’employeur à ne pas négliger ce qui constitue, souvent, un risque judiciaire significatif. 

1/ Un principe de partage de la preuve

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié (C. trav. art. L. 3171-4, al. 1).

Le texte ajoute qu’au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles (C. trav. art. L. 3171-4, al. 2).

Le Code du travail a donc prévu un partage de la charge de la preuve, entre les parties, en matière d’heures supplémentaires.

Le salarié, demandeur à l’instance, doit présenter des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies (Cass. soc. 18-3-2020 n° 18-10.919).

L’employeur, pour sa part, doit être en mesure de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié dans la limite de la prescription applicable aux salaires (Cass. soc. 13-2-2002 n° 00-40.836).

Ce régime de partage de la preuve s’applique également aux litiges portant :

– sur les heures complémentaires effectuées par les salariés à temps partiel (Cass. soc. 13-12-2000 n° 98-46.054) ;

– sur les heures effectuées les dimanches et jours fériés (Cass. soc. 12-10-2004 n° 02-41.289) ;

– sur l’existence ou le nombre de jours travaillés dans le cadre d’une convention de forfait en jours (Cass. soc. 7-12-2010 n° 09-42.626).

En revanche, les dispositions de l’article L. 3171-4 du Code du travail relatives à la répartition entre employeur et salarié de la charge de la preuve des heures de travail effectuées ne sont pas applicables à la preuve du respect des durées maximales de travail, qui incombe à l’employeur (Cass. soc. 23-5-2017 n° 15-24.507).

2/ Une jurisprudence favorable au salarié

Depuis longtemps, la Cour de cassation énonce que « la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties » (ex. Cass. soc. 24-4-2003 n° 00-44.653).

Elle ajoute qu’il appartient cependant au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande en paiement d’heures supplémentaires (Cass. soc. 25-2-2004 n° 01-45.441).

La notion de demande « étayée » est beaucoup plus souple que celle de demande « prouvée » ou « établie. »

En effet, pour la Cour de cassation, le juge ne peut pas rejeter une demande en paiement d’heures complémentaires au motif que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de celle-ci (Cass. soc. 10-5-2007 n° 05-45.932).

Ainsi, un décompte hebdomadaire n’est pas obligatoire pour étayer une demande en paiement d’heures supplémentaires (Cass. soc. 4-9-2019 n° 18-10.541).

La jurisprudence est relativement favorable au salarié dans l’administration de la preuve, admettant notamment :

– un décompte d’heures, calculé mois par mois, sans explication ni indication complémentaire (Cass. soc. 24-11-2010 n° 09-40.928) ;

– un agenda personnel, étayé par des attestations de collègues (Cass. soc. 8-12-2010 n° 09-66.138) ;

– un décompte des horaires de prise de poste et de fin de service, même en l’absence d’indications d’éventuelles pauses méridiennes (Cass. soc. 27-1-2021 n° 17-31.046).

Dans un arrêt du 5 janvier 2022 (Cass. soc. 5-1-2022, n°20-16.172), la Cour de cassation a censuré un arrêt ayant rejeté, comme preuve des heures supplémentaires d’un directeur commercial, « des feuilles d’enregistrement des heures de travail faisant apparaître une amplitude de 9 heures par jour et sur une base de 45 heures, sans toutefois faire mention du début et de la fin de la journée de travail ni préciser l’amplitude des pauses déjeuner. »

Dans autre affaire ayant donné lieu à un arrêt du 16 mars 2022 (Cass. soc. 16-3-2022, n° 21-10210), le salarié produisait des tableaux relatifs à des heures complémentaires et supplémentaires, établis par mois et non par semaine.

Pour la Cour d’appel de Grenoble (2 juillet 2019), ces éléments étaient « inexploitables » puisque les heures supplémentaires se décomptent sur la semaine.

L’arrêt est cassé par la Cour de cassation, qui juge que « le salarié communiquait des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre. »

C’est d’ailleurs la même formulation qui est retenue dans l’arrêt du 5 janvier 2022.

Enfin, la Cour relève que l’employeur était soumis aux dispositions de l’article R. 713-36 du Code rural et de la pêche maritime selon lesquelles :

– L’employeur doit enregistrer, chaque jour, sur un document prévu à cet effet, le nombre d’heures de travail effectuées par chaque salarié, ou groupe de salariés, ou les heures de début et de fin de chacune de leurs périodes de travail.

– Une copie du document doit être remise à chaque salarié, en même temps que sa paye.

En définitive, la jurisprudence exige de l’employeur qu’il produise des éléments probants permettant de contester ceux du salarié.

Cette solution est logique dans la mesure où le Code du travail impose à l’employeur de contrôler la durée de travail du salarié, ce qui implique l’établissement de documents de décompte (C. trav. art. L. 3171-1).

Xavier Berjot
Avocat associé
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Inaptitude : précision importante sur la portée de l’obligation de reclassement

Inaptitude : précision importante sur la portée de l’obligation de reclassement 1707 2560 sancy-avocats.com

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Un arrêt récent de la Cour de cassation (Civ. 2. 17-2-2022 n°20-19.516) statue sur la question du régime social et fiscal de l’indemnité transactionnelle perçue par le salarié. Cette décision confirme que l’indemnité transactionnelle peut, dans certaines hypothèses, être exonérée de cotisations sociales et non assujettie à l’impôt sur le revenu.

1. Rappels préalables : le régime social et fiscal de l’indemnité transactionnelle 

L’indemnité transactionnelle perçue par le salarié suit un régime social et fiscal différent selon qu’elle porte sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail.

1.1. L’indemnité transactionnelle portant sur la rupture du contrat de travail

Sur le plan social, celle-ci est exclue de l’assiette des cotisations, dans la limite d’un montant fixé à deux fois la valeur annuelle du plafond de la sécurité sociale (« PASS »), soit 82.272 € pour 2022 (41.136 € x 2).

La partie excédentaire est soumise à cotisations patronales et salariales, comme les salaires.

Par ailleurs, la partie qui excède le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement est toujours soumise à CSG / CRDS, soit 9,7 % au total, à la charge du salarié.

Enfin, lorsque l’indemnité transactionnelle dépasse 10 fois le PASS (soit 411.360 € en 2022), elle est soumise à cotisations sociales dès le premier euro.

Sur le plan fiscal, l’indemnité transactionnelle est exonérée d’impôt sur le revenu dans la limite suivante (la plus haute est retenue) :

– Soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture de son contrat de travail, dans la limite de six fois le PASS (246.816 € en 2022) ;

– Soit 50 % du montant de l’indemnité si ce seuil est supérieur, toujours dans la limite de six fois le PASS ;

– Soit le montant de l’indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, par l’accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi, et ce sans limite.

1.2. L’indemnité transactionnelle portant sur l’exécution du contrat de travail 

A titre préalable, soulignons que la transaction conclue au cours de l’exécution du contrat de travail peut avoir pour objet de régler un litige relatif à :

– des éléments de salaire : heures supplémentaires, primes diverses, indemnité de non-concurrence…

– une souffrance physique ou psychique (au sens du « pretium doloris ») : harcèlement moral ou sexuel, préjudice lié à une situation de souffrance au travail, à la violation du droit au repos…

Or, c’est la nature de l’élément réparé par l’indemnité transactionnelle qui détermine son régime social et fiscal.

Sur le plan social, les sommes versées en exécution des transactions conclues avec les salariés constituant un élément de rémunération versé en contrepartie ou à l’occasion du travail entrent dans l’assiette des cotisations et contributions (Civ 2. 28-11-2019 n° 18-22.807).

A l’inverse, si l’indemnité transactionnelle a pour objet de réparer un préjudice dénué de tout caractère salarial, elle n’a pas à être assujettie aux cotisations et contributions sociales, à la CSG, à la CRDS et aux taxes et participations assises sur les salaires dont l’assiette est harmonisée avec celle des cotisations de sécurité sociale.

Il en résulte que les sommes versées par l’employeur pour indemniser le salarié victime d’un préjudice physique, psychique, psychologique, moral, d’image, etc., ne doivent pas se voir appliquer de cotisations, contributions, de CSG et de CRDS, etc.

Sur le plan fiscal, les dommages-intérêts versés au salarié en réparation d’un préjudice lié à l’exécution du contrat et n’ayant aucun lien avec un élément de salaire ne sont pas visés par les articles 79 à 81 quater du Code général des impôts (CGI).

Pour rappel, ces articles définissent le revenu imposable et sont compris dans un § V du CGI intitulé « V : Traitements, salaires, pensions et rentes viagères (Articles 79 à 90) ».

Par exception, il résulte de l’article 80 du CGI que sont imposées comme des traitements et salaires les indemnités, au-delà d’un million d’euros, « perçues au titre du préjudice moral fixées par décision de justice. »

En conclusion, l’indemnité allouée au salarié en raison d’un préjudice subi lors de l’exécution du contrat de travail n’est pas imposable, sauf si elle a la nature d’un élément de salaire.

2. La solution de l’arrêt du 17 février 2022

Dans une décision très claire, la Cour de cassation considère que l’indemnité transactionnelle peut être exonérée de cotisations sociales compte tenu de sa nature. L’administration adopte d’ailleurs la même position.

2.1. Les faits

Dans cette affaire, deux salariés signent, avec leur employeur, une transaction prévoyant le versement d’une indemnité en contrepartie de laquelle ils renoncent « irrévocablement à la demande de résiliation judiciaire de leurs contrats de travail et à ses conséquences et à réclamer à leur employeur tous chefs  de demande, avantages en nature ou en espèce de quelque sorte que ce soit et notamment des indemnités et paiements divers consécutifs à l’exécution ou à l’éventuelle rupture des relations de la société (rappels de salaire, avantages individuels, primes diverses, heures supplémentaires, jours RTT, indemnités de préavis et de licenciement, congés payés, avantage en nature, frais professionnels, droits au DIF, indemnités de toute nature, sans que cette liste soit exhaustive). » 

La Société fait l’objet d’un redressement Urssaf, les contrôleurs estimant que le caractère exclusivement indemnitaire des montants transactionnels n’est pas établi.

La Cour d’appel de Caen (25 juin 2020) annule le redressement, considérant que le litige porte sur l’indemnisation de préjudices résultant du non-respect des temps de repos du forfait-jours et des règles relatives aux congés payés, c’est-à-dire à l’indemnisation d’un préjudice résultant de la violation d’obligations impératives de l’employeur portant sur le droit à la santé et au repos.

La Cour de cassation rejette le pourvoi formé à l’encontre de cet arrêt, relevant que les juges ont fait ressortir « la commune intention des parties d’indemniser les salariés des conséquences du manquement de l’employeur à ses obligations en matière de santé et de sécurité au travail. » 

Cette décision est intéressante, dans la mesure où les praticiens hésitent souvent à exonérer l’indemnité transactionnelle. 

Pourtant, l’administration, elle-même, admet cette solution.

2.2. Position de l’administration

Le bulletin officiel de la Sécurité sociale (« Boss ») (Boss rupture, § 1720) énonce que :

– « en dehors des indemnités pouvant être exclues de l’assiette des cotisations et contributions sociales dans les conditions prévues par la loi, une somme représentative de dommages-intérêts indemnisant un préjudice (moral ou personnel) autre que la perte de salaire peut dans certains cas être exclue de l’assiette des cotisations, lorsque l’employeur apporte la preuve qu’elle concourt, pour tout ou partie de son montant, à l’indemnisation d’un préjudice résultant de la rupture du contrat de travail du salarié. Il en va ainsi lorsqu’une décision de justice constate la réalité de ce préjudice et considère que les sommes versées constituent des dommages-intérêts. »

Le Boss vise l’indemnisation d’un préjudice résultant de la rupture du contrat de travail mais la solution est similaire pour le préjudice subi pendant l’exécution du contrat de travail.

En effet, dans les deux cas, l’exercice consiste à prendre en considération l’élément réparé par l’indemnité transactionnelle.

Le site Internet de l’Urssaf (urssaf.fr) prévoit la même solution :

« En aucun cas, l’Urssaf n’est compétente pour se prononcer sur le fond, la forme ou la validité d’une transaction. Ce pouvoir appartient exclusivement aux juges du fond. 

Toutefois, la qualification que les parties à la transaction donnent aux sommes versées n’est pas déterminante. 

Il en résulte que pour distinguer les sommes qui ont un caractère indemnitaire de celles qui ont le caractère de rémunération, le sens et la portée de la transaction peuvent être recherchés : 

– à partir des termes mêmes du document transactionnel ;

– mais aussi à partir des éléments extérieurs à cette transaction (circonstances de fait, relations entre les parties…). 

L’Urssaf est ainsi compétente pour rechercher si l’indemnité transactionnelle versée correspond à une ou plusieurs indemnités susceptibles d’être exonérées, ou bien s’il s’agit d’éléments de salaire soumis à cotisations. » 

Exonéré de cotisations, l’indemnité transactionnelle présentant les caractéristiques de celle visée dans l’arrêt du 17 février 2022 ne doit, par ailleurs, pas être assujettie à l’impôt sur le revenu (cf. § 1.2).

Xavier Berjot
Avocat associé
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L’indemnité transactionnelle exonérée et défiscalisée : nouvelle illustration

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Un arrêt récent de la Cour de cassation (Civ. 2. 17-2-2022 n°20-19.516) statue sur la question du régime social et fiscal de l’indemnité transactionnelle perçue par le salarié. Cette décision confirme que l’indemnité transactionnelle peut, dans certaines hypothèses, être exonérée de cotisations sociales et non assujettie à l’impôt sur le revenu.

1. Rappels préalables : le régime social et fiscal de l’indemnité transactionnelle 

L’indemnité transactionnelle perçue par le salarié suit un régime social et fiscal différent selon qu’elle porte sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail.

1.1. L’indemnité transactionnelle portant sur la rupture du contrat de travail

Sur le plan social, celle-ci est exclue de l’assiette des cotisations, dans la limite d’un montant fixé à deux fois la valeur annuelle du plafond de la sécurité sociale (« PASS »), soit 82.272 € pour 2022 (41.136 € x 2).

La partie excédentaire est soumise à cotisations patronales et salariales, comme les salaires.

Par ailleurs, la partie qui excède le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement est toujours soumise à CSG / CRDS, soit 9,7 % au total, à la charge du salarié.

Enfin, lorsque l’indemnité transactionnelle dépasse 10 fois le PASS (soit 411.360 € en 2022), elle est soumise à cotisations sociales dès le premier euro.

Sur le plan fiscal, l’indemnité transactionnelle est exonérée d’impôt sur le revenu dans la limite suivante (la plus haute est retenue) :

– Soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture de son contrat de travail, dans la limite de six fois le PASS (246.816 € en 2022) ;

– Soit 50 % du montant de l’indemnité si ce seuil est supérieur, toujours dans la limite de six fois le PASS ;

– Soit le montant de l’indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, par l’accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi, et ce sans limite.

1.2. L’indemnité transactionnelle portant sur l’exécution du contrat de travail 

A titre préalable, soulignons que la transaction conclue au cours de l’exécution du contrat de travail peut avoir pour objet de régler un litige relatif à :

– des éléments de salaire : heures supplémentaires, primes diverses, indemnité de non-concurrence…

– une souffrance physique ou psychique (au sens du « pretium doloris ») : harcèlement moral ou sexuel, préjudice lié à une situation de souffrance au travail, à la violation du droit au repos…

Or, c’est la nature de l’élément réparé par l’indemnité transactionnelle qui détermine son régime social et fiscal.

Sur le plan social, les sommes versées en exécution des transactions conclues avec les salariés constituant un élément de rémunération versé en contrepartie ou à l’occasion du travail entrent dans l’assiette des cotisations et contributions (Civ 2. 28-11-2019 n° 18-22.807).

A l’inverse, si l’indemnité transactionnelle a pour objet de réparer un préjudice dénué de tout caractère salarial, elle n’a pas à être assujettie aux cotisations et contributions sociales, à la CSG, à la CRDS et aux taxes et participations assises sur les salaires dont l’assiette est harmonisée avec celle des cotisations de sécurité sociale.

Il en résulte que les sommes versées par l’employeur pour indemniser le salarié victime d’un préjudice physique, psychique, psychologique, moral, d’image, etc., ne doivent pas se voir appliquer de cotisations, contributions, de CSG et de CRDS, etc.

Sur le plan fiscal, les dommages-intérêts versés au salarié en réparation d’un préjudice lié à l’exécution du contrat et n’ayant aucun lien avec un élément de salaire ne sont pas visés par les articles 79 à 81 quater du Code général des impôts (CGI).

Pour rappel, ces articles définissent le revenu imposable et sont compris dans un § V du CGI intitulé « V : Traitements, salaires, pensions et rentes viagères (Articles 79 à 90) ».

Par exception, il résulte de l’article 80 du CGI que sont imposées comme des traitements et salaires les indemnités, au-delà d’un million d’euros, « perçues au titre du préjudice moral fixées par décision de justice. »

En conclusion, l’indemnité allouée au salarié en raison d’un préjudice subi lors de l’exécution du contrat de travail n’est pas imposable, sauf si elle a la nature d’un élément de salaire.

2. La solution de l’arrêt du 17 février 2022

Dans une décision très claire, la Cour de cassation considère que l’indemnité transactionnelle peut être exonérée de cotisations sociales compte tenu de sa nature. L’administration adopte d’ailleurs la même position.

2.1. Les faits

Dans cette affaire, deux salariés signent, avec leur employeur, une transaction prévoyant le versement d’une indemnité en contrepartie de laquelle ils renoncent « irrévocablement à la demande de résiliation judiciaire de leurs contrats de travail et à ses conséquences et à réclamer à leur employeur tous chefs  de demande, avantages en nature ou en espèce de quelque sorte que ce soit et notamment des indemnités et paiements divers consécutifs à l’exécution ou à l’éventuelle rupture des relations de la société (rappels de salaire, avantages individuels, primes diverses, heures supplémentaires, jours RTT, indemnités de préavis et de licenciement, congés payés, avantage en nature, frais professionnels, droits au DIF, indemnités de toute nature, sans que cette liste soit exhaustive). » 

La Société fait l’objet d’un redressement Urssaf, les contrôleurs estimant que le caractère exclusivement indemnitaire des montants transactionnels n’est pas établi.

La Cour d’appel de Caen (25 juin 2020) annule le redressement, considérant que le litige porte sur l’indemnisation de préjudices résultant du non-respect des temps de repos du forfait-jours et des règles relatives aux congés payés, c’est-à-dire à l’indemnisation d’un préjudice résultant de la violation d’obligations impératives de l’employeur portant sur le droit à la santé et au repos.

La Cour de cassation rejette le pourvoi formé à l’encontre de cet arrêt, relevant que les juges ont fait ressortir « la commune intention des parties d’indemniser les salariés des conséquences du manquement de l’employeur à ses obligations en matière de santé et de sécurité au travail. » 

Cette décision est intéressante, dans la mesure où les praticiens hésitent souvent à exonérer l’indemnité transactionnelle. 

Pourtant, l’administration, elle-même, admet cette solution.

2.2. Position de l’administration

Le bulletin officiel de la Sécurité sociale (« Boss ») (Boss rupture, § 1720) énonce que :

– « en dehors des indemnités pouvant être exclues de l’assiette des cotisations et contributions sociales dans les conditions prévues par la loi, une somme représentative de dommages-intérêts indemnisant un préjudice (moral ou personnel) autre que la perte de salaire peut dans certains cas être exclue de l’assiette des cotisations, lorsque l’employeur apporte la preuve qu’elle concourt, pour tout ou partie de son montant, à l’indemnisation d’un préjudice résultant de la rupture du contrat de travail du salarié. Il en va ainsi lorsqu’une décision de justice constate la réalité de ce préjudice et considère que les sommes versées constituent des dommages-intérêts. »

Le Boss vise l’indemnisation d’un préjudice résultant de la rupture du contrat de travail mais la solution est similaire pour le préjudice subi pendant l’exécution du contrat de travail.

En effet, dans les deux cas, l’exercice consiste à prendre en considération l’élément réparé par l’indemnité transactionnelle.

Le site Internet de l’Urssaf (urssaf.fr) prévoit la même solution :

« En aucun cas, l’Urssaf n’est compétente pour se prononcer sur le fond, la forme ou la validité d’une transaction. Ce pouvoir appartient exclusivement aux juges du fond. 

Toutefois, la qualification que les parties à la transaction donnent aux sommes versées n’est pas déterminante. 

Il en résulte que pour distinguer les sommes qui ont un caractère indemnitaire de celles qui ont le caractère de rémunération, le sens et la portée de la transaction peuvent être recherchés : 

– à partir des termes mêmes du document transactionnel ;

– mais aussi à partir des éléments extérieurs à cette transaction (circonstances de fait, relations entre les parties…). 

L’Urssaf est ainsi compétente pour rechercher si l’indemnité transactionnelle versée correspond à une ou plusieurs indemnités susceptibles d’être exonérées, ou bien s’il s’agit d’éléments de salaire soumis à cotisations. » 

Exonéré de cotisations, l’indemnité transactionnelle présentant les caractéristiques de celle visée dans l’arrêt du 17 février 2022 ne doit, par ailleurs, pas être assujettie à l’impôt sur le revenu (cf. § 1.2).

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Rémunération variable et condition de présence

Rémunération variable et condition de présence 1707 2560 sancy-avocats.com

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Le contrat de travail peut naturellement conditionner le droit à un élément de rémunération variable à certains paramètres. En revanche, le bénéfice de la part variable ne peut pas être intégralement subordonné à une condition de présence du salarié au moment de son versement.

1/ Pas de condition de présence à la date du versement de la prime

L’ouverture du droit à un élément de la rémunération peut être liée à une condition de présence à la date de son échéance, c’est-à-dire à la date à laquelle les conditions de son exigibilité sont remplies (Cass. soc. 19-7-1995 n° 92-40.638).

Cette clause ne peut être écartée que si son application réduit le salaire à un montant inférieur au minimum légal ou conventionnel de la catégorie professionnelle à laquelle appartient le salarié.

En revanche, le droit à rémunération relatif à une période considérée est acquis du seul fait que cette période a été intégralement travaillée. 

En effet, pour la Cour de cassation, si l’ouverture du droit à un élément de la rémunération afférent à une période travaillée peut être soumise à une condition de présence à la date de son échéance, le droit à rémunération est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée de sorte qu’il ne saurait être subordonné à une condition de présence à la date, postérieure, de son versement (Cass. soc. 3-4-2007 n° 05-45.110).

Cette jurisprudence de la Cour de cassation a été réaffirmée postérieurement (Cass. soc. 8-7-2020 n° 18-21.945 ; Cass. soc. 29-9-2021 n° 13-25.549).

Elle ne concerne pas seulement le salaire variable et a pu être dégagée, par exemple, à propos d’une prime d’expatriation (Cass. soc. 27-3-2013 n° 11-22.875) :

– « Ayant relevé que le droit à percevoir la prime d’expatriation litigieuse était acquis du fait de la réalisation de la mission à l’étranger, la cour d’appel en a déduit à bon droit que son paiement ne pouvait être subordonné à une condition d’appartenance aux effectifs de la société le dernier jour du mois de février de l’année civile suivante. »

De même, la solution a été appliquée à une prime d’intéressement présentant un caractère collectif (Cass. soc. 21-9-2005 n° 01-42.399).

La Cour de cassation considère, enfin, que lorsque la partie variable de la rémunération est fixée en fonction du chiffre d’affaires annuel réalisé personnellement par le salarié, celui-ci, quittant l’entreprise avant la fin de l’année civile, ne peut pas être privé d’un élément de rémunération versé en contrepartie de son activité auquel il peut alors prétendre au prorata de son temps de présence (Cass. soc. 15-3-2017 n° 15-19.528).

2/ Incidence de la rupture du contrat de travail 

La question se pose de savoir comment la Cour de cassation apprécie la condition de présence du salarié à la date de versement d’une prime, lors de la rupture du contrat de travail.

Par principe, un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse ne peut pas être débouté de sa demande de versement d’une prime liée à une condition de présence à la date de paiement.

Comme l’énonce la Cour de cassation, « la condition est réputée accomplie lorsque c’est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l’accomplissement. » (Cass. soc. 26-9-2018 n° 17-19.840).

Cette solution joue également en cas de nullité du licenciement, l’employeur ne pouvant opposer au salarié la condition de présence à la clôture de l’exercice comptable pour le débouter de sa demande de rémunération variable (Cass. soc. 27-5-2020 n° 18-20.156).

En revanche, une prime annuelle dont le bénéfice est subordonné à la condition que le salarié soit titulaire d’un contrat de travail en vigueur au moment de son versement n’est pas due si celui-ci a été rompu avant cette date, peu important que le licenciement ait ensuite été jugé sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 27-5-2020 n° 18-20.688).

Cette solution est logique puisque l’ouverture du droit à un élément de la rémunération afférent à une période travaillée peut être soumise à une condition de présence à la date de son échéance (cf. § 1).

La jurisprudence s’est également prononcée sur l’incidence d’une dispense de préavis au regard du droit à la prime.

Selon l’article L. 1234-5 du Code du travail, la dispense par l’employeur de l’exécution du travail pendant la durée du préavis ne doit entraîner, jusqu’à l’expiration de ce délai, aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait reçus s’il avait accompli son travail.

Dès lors, pour la Cour de cassation, viole ce texte la Cour d’appel qui déboute un salarié de sa demande en paiement d’une prime d’assiduité pour la période de préavis en décidant que l’employeur est en droit de conditionner le règlement d’une telle prime à la présence effective du salarié (Cass. soc. 27-6-2001 n° 98-45.711).

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Salariés : quand l’entretien d’évaluation devient une sanction

Salariés : quand l’entretien d’évaluation devient une sanction 1707 2560 sancy-avocats.com

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Dans un arrêt du 2 février 2022 (Cass. soc. 2-2-2022 n° 20-13.833), la Cour de cassation a jugé que le compte-rendu d’entretien annuel comportant des griefs précis sanctionne un comportement considéré comme fautif et constitue donc un avertissement.

1/ Les contours de l’entretien d’évaluation

Le Code du travail n’impose pas à l’employeur de prévoir, à échéances périodiques, un entretien d’évaluation, de performance ou d’activité (peu importe son libellé).

Un tel dispositif peut être mis en place par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction.

Il est même conseillé, afin d’évaluer les performances du salarié, ses éventuelles lacunes, ses probables succès et ses besoins de formation.

Comme la Cour d’appel de Versailles a pu le juger, « la mise en place d’un système d’évaluation est nécessaire pour permettre à l’employeur de respecter, d’une part, son obligation de négociation triennale en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, de s’assurer, d’autre part, de l’adaptation des salariés à leur poste de travail, notamment par la proposition de formations » (CA Versailles 26-5-2011 n° 09-09814).

En effet, en pratique, l’entretien d’évaluation s’avère très utile – sinon indispensable – pour dresser un état des lieux du travail effectué par le salarié, en particulier sur l’année écoulée.

D’ailleurs, en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle ou de résultats, les juges attendent légitimement de l’employeur qu’il produise des documents écrits sur l’appréciation du salarié.

En définitive, l’entretien d’évaluation constitue une « bonne pratique », utile tant au salarié qu’à l’employeur. 

L’entretien d’évaluation ne doit pas être confondu avec l’entretien professionnel. 

Rappelons, à cet égard, que le salarié doit être informé qu’il bénéficie tous les 2 ans d’un entretien professionnel avec son employeur « consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d’emploi » (C. trav. art. L. 6315-1.I).

Le texte précise que « cet entretien ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié. » 

L’entretien professionnel comporte également « des informations relatives à la validation des acquis de l’expérience, à l’activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l’employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle. » 

2/ La dénaturation de l’entretien d’évaluation 

Les entretiens d’évaluation donnent généralement lieu à l’établissement d’un compte-rendu signé par l’employeur et le salarié.

C’est souvent sous cette forme que sont identifiés les axes de progression du salarié ou les moyens d’améliorer la qualité de son travail.

En revanche, le compte-rendu d’entretien d’évaluation ne peut pas s’assimiler à une sanction, sauf à ce que l’employeur vide son pouvoir disciplinaire.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 2 février 2022, un compte-rendu d’entretien d’évaluation formulait des griefs précis et invitait le salarié à un changement immédiat de comportement.

Pour la Cour d’appel de Besançon (7 janvier 2020), l’employeur avait ainsi sanctionné le salarié et ne pouvait plus invoquer les mêmes faits à l’appui d’un licenciement.

La décision est approuvée par la Cour de cassation, aux motifs suivants :

– « Après avoir relevé que, dans son compte rendu d’entretien, l’employeur reprochait au salarié son attitude dure et fermée aux changements, à l’origine d’une plainte de collaborateurs en souffrance, des dysfonctionnements graves liés à la sécurité électrique et le non-respect des normes réglementaires, et l’invitait de manière impérative et comminatoire et sans délai à un changement complet et total, la cour d’appel en a exactement déduit que ce document comportant des griefs précis sanctionnait un comportement considéré comme fautif et constituait un avertissement, en sorte que les mêmes faits ne pouvaient plus justifier un licenciement ultérieur. »

L’arrêt de la Cour de cassation est conforme à sa jurisprudence selon laquelle tous les écrits de l’employeur reprochant une faute au salarié sont assimilables à un avertissement.

Ainsi, la « mise en garde » notifiée par écrit avec indication qu’elle sera portée au dossier du salarié constitue une sanction disciplinaire prenant la forme d’un avertissement (Cass. soc. 22-4-1997 n° 94-42.430).

De même, la procédure de demande d’explications écrites en vigueur dans une entreprise constitue une mesure disciplinaire dès lors qu’elle est mise en œuvre après faits considérés comme fautifs, que le salarié est tenu de répondre immédiatement aux questions posées, et que tout refus de s’exécuter après une mise en demeure constitue un grief supplémentaire pouvant justifier une sanction (Cass. soc. 19-5-2015 n° 13-26.916).

Plus récemment, la Cour de cassation a jugé que la lettre rappelant la présence non autorisée du salarié dans un local électrique et l’invitant de manière impérative à respecter les règles régissant l’accès à un tel local, stigmatise le comportement du salarié considéré comme fautif et constitue une sanction disciplinaire (Cass. soc. 10-2-2021 n° 19-18.903).

Un simple e-mail peut également être considéré comme un avertissement, en fonction de sa teneur.

À titre d’illustration, l’e-mail dans lequel l’employeur adresse divers reproches à un salarié et l’invite de façon impérative à un changement radical, avec mise au point ultérieure, sanctionne un comportement fautif et constitue un avertissement (Cass. soc. 26-5-2010 n° 08-42.893).

En revanche, un simple compte-rendu des faits reprochés au salarié lors d’un entretien n’est pas une sanction (Cass. soc. 12-11-2015 n° 14-17.615).

Dans le même sens, ne constitue pas une sanction disciplinaire la lettre par laquelle l’employeur se borne à solliciter du salarié qu’il se ressaisisse en lui faisant des propositions afin de l’aider (Cass. soc. 13-12-2011 n° 10-20.135).

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a considéré que le compte-rendu d’un entretien de suivi par lequel un supérieur hiérarchique indique au salarié qu’il sollicite une sanction à son encontre auprès du service compétent pour prononcer une telle mesure, en précisant qu’il ignore quelle en sera l’issue, n’est pas un avertissement (Cass. soc. 27-5-2021 n° 19-15507).

En conclusion, le compte-rendu de l’entretien annuel d’évaluation présente une importance significative et doit être soigneusement rédigé.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Rupture conventionnelle : quand renoncer à la clause de non-concurrence ?

Rupture conventionnelle : quand renoncer à la clause de non-concurrence ? 2560 1707 sancy-avocats.com

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La rupture conventionnelle n’est pas un dispositif nouveau puisqu’elle a été instaurée par la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail. Pourtant, nombreux sont les contrats de travail qui ne fixent pas le sort de la clause de non-concurrence en cas de rupture conventionnelle.

1/ Rappels préalables 

L’employeur peut lever la clause de non-concurrence, et donc se décharger de son obligation de verser la contrepartie financière correspondante, à condition :

– que cette possibilité soit expressément prévue par le contrat de travail ou la convention collective (Cass. soc. 28-3-2007, n° 06-40.293) ;

– de respecter le délai et le formalisme prévus par le contrat ou la convention collective (Cass. soc. 21-10-2020, n° 19-18399).

Par ailleurs, la renonciation doit être explicite et non équivoque (Cass. soc. 30-5-1990, n° 87-40.485) et notifiée individuellement au salarié (Cass. soc. 21-10-2009, n° 08-40.828).

L’employeur ne respectant pas les formalités de renonciation à la clause n’est pas délié de ses obligations et doit verser l’indemnité compensatrice (Cass. soc. 13-10-1988, n° 85-43.261).

L’application de ces principes a dû être adaptée par la jurisprudence lorsque l’employeur entend lever une clause de non-concurrence après une rupture conventionnelle. 

2/ Adaptation à la rupture conventionnelle

Dans un arrêt du 26 janvier 2022 (Cass. soc. 26-1-2022, n° 20-15.755), la Cour de cassation a jugé qu’en cas de rupture conventionnelle, l’employeur qui « entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires ».

Dans cette affaire, une directrice des ventes et son employeur avaient conclu une rupture conventionnelle le 27 mars 2015, avec une date d’effet fixée au 5 mai 2015.

Le contrat de travail contenait une clause de non-concurrence s’appliquant pendant un an à compter de la rupture effective du contrat de travail et réservant la faculté, pour l’employeur, de renoncer à cette clause par décision notifiée au salarié à tout moment durant le préavis ou dans un délai maximum d’un mois à compter de la fin du préavis (ou, en l’absence de préavis, de la notification du licenciement).

Le 11 septembre 2015, la salariée a sollicité le versement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence. En réponse, son ancien employeur l’a dispensée de toute obligation de non-concurrence « depuis son départ de l’entreprise. »

Par arrêt du 19 février 2020, la Cour d’appel de Lyon a condamné l’employeur au paiement de la contrepartie financière, mais seulement pour la période du 5 mai 2015 au 11 septembre 2015.

Cette décision est censurée par la Cour de cassation au motif suivant :

– « En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que la date de rupture fixée par les parties dans la convention de rupture était le 5 mai 2015, ce dont il résultait que la renonciation par l’employeur au bénéfice de la clause de non-concurrence intervenue le 11 septembre 2015 était tardive, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »

Il en résulte qu’en matière de rupture conventionnelle, l’employeur, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires.

3/ Confirmation de jurisprudence

L’arrêt du 26 janvier 2022 s’inscrit dans le cadre d’une jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation désormais bien établie.

En effet, la Cour de cassation considère qu’en cas de rupture du contrat de travail avec dispense d’exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l’obligation de non-concurrence correspond à celle du départ effectif de l’entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires (Cass. soc. 13-3-2013, nº 11-21.150).

Elle en déduit que l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis doit, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise (Cass. soc. 21-1-2015, nº 13-24.471).

Cette jurisprudence est également appliquée en cas de rupture du contrat de travail résultant de l’adhésion du salarié au CSP, l’employeur devant, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise (Cass. soc. 2-3-2017, nº 15-15.405).

Ces solutions se justifient par le fait que le salarié ne peut pas être laissé dans l’incertitude quant à l’étendue de sa liberté de travailler.

Précisons enfin que, dans un arrêt du 29 janvier 2014 (Cass. soc. 29-1-2014, n° 12-22116), en présence d’une clause de non-concurrence stipulant que l’employeur pouvait renoncer à son application « au plus tard dans les quinze jours qui suivent la première présentation de la notification de la rupture du contrat de travail », la Cour de cassation a considéré que ce délai a pour point de départ la date de la rupture fixée par la convention de rupture.

En conclusion, afin d’éviter tout litige, la convention de rupture conventionnelle peut utilement régler le sort de l’obligation de non-concurrence ou fixer ses modalités de renonciation.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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CSG/CRDS sur l’indemnité pour licenciement abusif : du nouveau

CSG/CRDS sur l’indemnité pour licenciement abusif : du nouveau 2560 2048 sancy-avocats.com

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Depuis le 1er janvier 2022, la direction de la Sécurité sociale a allégé l’assujettissement à CSG/CRDS des indemnités allouées au salarié en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

1/ L’ancienne doctrine 

Antérieurement au 1er janvier 2022, l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse était exonérée de CSG et de CRDS dans la limite :

– des montants minimaux fixés à l’article L. 1235-3 du Code du travail (barème « Macron ») ;

– et de 2 PASS (soit 82.272 €) (BOSS Indemnités de rupture § 1901, version du 01/04/2021).

Pour déterminer le régime social de ces indemnités, il était nécessaire de tenir compte du montant déjà exonéré au titre de l’indemnité légale, conventionnelle ou contractuelle de licenciement.

Les montants prévus par le barème « Macron » étant relativement faibles, cette position revenait à soumettre très vite, à CSG/CRDS, l’indemnité pour licenciement sans cause réelle.

Par ailleurs, la position de l’administration était contraire aux dispositions de l’article L. 136-1-1, III-5°, a) du Code de sécurité sociale prévoyant une exonération de CSG et de CRDS applicables aux indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail et à hauteur du montant prévu par la loi.

2/ Les nouveautés 

Désormais, l’indemnité octroyée par le juge en cas de licenciement sans cause réelle ou sérieuse est exonérée de CSG et de CRDS dans la limite de deux PASS.

L’administration justifie sa position au regard de l’article L. 136-1-1, III, 5° a) du Code de la sécurité sociale :

« III.-Par dérogation au I, sont exclus de l’assiette de la contribution mentionnée à l’article L. 136-1 les revenus suivants :

5° a) Indépendamment de leur assujettissement à l’impôt sur le revenu, les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail, dans la limite du plus petit des montants suivants :

– le montant prévu par la convention collective de branche, l’accord professionnel ou interprofessionnel ou la loi si ce dernier est le plus élevé, ou, en l’absence de montant légal ou conventionnel pour le motif concerné, le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ;

– le montant fixé en application du 7° du II de l’article L. 242-1 du présent code » (soit 2 PASS).

Par exception, les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail d’un montant supérieur à dix fois le PASS (soit 411.360 €) sont intégralement assujetties.

En conclusion, la direction de la Sécurité sociale ne fait référence aux montants plancher du barème d’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Rappelons que le BOSS est opposable à l’administration.

3/ Les règles maintenues

Les indemnités accordées par le juge, en cas de licenciement abusif, irrégulier ou nul, sont exonérées de cotisations de sécurité sociale dans la limite de deux PASS (CSS. art. L242-1, II-7° et CGI. art. 80 duodecies).

Comme le précise l’administration, en dehors des indemnités pouvant être exclues de l’assiette des cotisations, une somme représentative de dommages-intérêts indemnisant un préjudice autre que la perte de salaire peut être exclue de l’assiette des cotisations (BOSS rupture, § 1720).

Une décision de justice peut seule constater la réalité et la nature du préjudice et vérifier ainsi que les sommes allouées sont des dommages-intérêts indemnisant un préjudice, et permettre leur exclusion de l’assiette des cotisations et contributions sociales.

Pour davantage d’informations sur le régime social et fiscal de l’indemnité pour licenciement abusif, le lecteur peut consulter l’article suivant : Indemnité pour licenciement abusif : le régime social et fiscal.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Le licenciement verbal

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L’employeur qui décide de licencier un salarié doit notifier le licenciement par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (C. trav. art. L. 1232-6). Même si cette formalité n’est qu’un moyen de preuve, la jurisprudence sanctionne le licenciement verbal.

1/ Les hypothèses du licenciement verbal

La lettre de licenciement comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur (C. trav. art. L. 1232-6, al. 2).

Il en résulte qu’est irrégulier le licenciement notifié verbalement au salarié.

Ainsi, est sans cause réelle et sérieuse le licenciement d’une salariée notifié par lettre du 13 mars 1990, alors que l’intéressée s’était vu interdire l’accès à son bureau dès le 2 mars 1990 (Cass. soc. 29-10-1996 n° 93-44.245).

De même, la cour d’appel, ayant constaté qu’avant l’entretien préalable les employés de la banque signalaient que le directeur d’agence ne faisait plus partie du personnel, qu’il avait été licencié et remplacé, a pu décider que son licenciement ne procédait pas d’une cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 19-3-2008 n° 07-40.489).

La jurisprudence de la Cour de cassation n’est cependant pas solidement établie sur la question du licenciement verbal.

En effet, cette dernière a pu juger que la décision prise avant l’entretien préalable et communiquée par note interne à d’autres salariés constitue une irrégularité de procédure mais n’a pas pour effet de priver la rupture de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 29-10-2003 n° 01-44.354).

Un arrêt antérieur avait également considéré que la seule circonstance pour l’employeur, avant l’entretien préalable, de rechercher un nouveau salarié, n’est pas de nature à rendre irrégulière la procédure de licenciement (Cass. soc. 2-4-1992 n° 90-42.030).

Les juges du fond sont également partagés sur la qualification à donner aux agissements de l’employeur faisant part de sa volonté de se séparer du salarié, directement ou indirectement, avant la notification du licenciement.

A titre d’exemple, la désactivation du badge d’accès aux locaux et l’attribution de ses fonctions à d’autres salariés avant l’engagement de la procédure de licenciement ne suffisent pas à caractériser la volonté de l’employeur de licencier le salarié avant la tenue de l’entretien préalable (CA Paris 28-3-2012 n° 10/06051).

En revanche, la divulgation faite par le dirigeant sur sa volonté de rompre le contrat révèle la décision de licencier le salarié avant le déclenchement de la procédure de licenciement, et la rupture s’analyse alors en un licenciement verbal et donc abusif (CA Paris 2-11-2006 n° 06-2683).

Parallèlement à l’engagement d’une procédure de licenciement, l’employeur peut souhaiter notifier au salarié une mise à pied à titre conservatoire, dans l’attente de la décision intervenir.

Les circonstances dans lesquelles cette mesure intervient peuvent, parfois, caractériser un licenciement verbal.

Par principe, en l’absence d’éléments établissant la décision de licenciement, la mise à pied conservatoire, s‘inscrivant dans le cadre de la procédure de licenciement, ne constitue ni la marque d’une décision de rupture ni un licenciement verbal (Cass. soc. 7-7-2015 n° 14-14.737).

Il en est de même de la dispense d’activité notifiée au salarié lors de sa convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement (Cass. soc. 5-11-2014 n° 13-20.882).

En sens inverse, un salarié fait l’objet d’un licenciement verbal s’il doit remettre les clefs lui permettant d’accéder à son lieu de travail, ayant ainsi été empêché de travailler pendant plusieurs jours en l’absence de mise à pied formelle (Cass. soc. 9-3-2011 n° 09-65.441).

Un licenciement verbal est également caractérisé lorsque le salarié est mis « en disponibilité » et qu’il se voit refuser l’accès à l’établissement (Cass. soc. 17-1-2013 n° 11-25.277).

2/ Les conséquences du licenciement verbal

Le licenciement verbal, malgré son irrégularité, entraîne la rupture du contrat de travail et fixe le point de départ du préavis (Cass. soc. 9-4-1992 n° 90-42.335).

Il en résulte que l’employeur a l’obligation de tenir à la disposition du salarié – ou de lui adresser – les documents de fin de contrat, dont l’attestation Pôle Emploi, le certificat de travail et le reçu pour solde de tout compte.

Par ailleurs, le salarié est éligible à la portabilité des garanties complémentaires santé et prévoyance, dans les conditions fixées à l’article L. 911-8 du Code de la sécurité sociale.

Le salarié ayant fait l’objet d’un licenciement verbal ne pouvant être régularisé par l’envoi postérieur d’une lettre de rupture, cette mesure est nécessairement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 28-5-2008 n° 07-41.735).

Le montant de l’indemnité mise à la charge de l’employeur oscille entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau figurant à l’article L. 1235-3 du Code du travail (« barème Macron »).

Cette indemnité, exprimée en mois de salaire brut, varie selon l’ancienneté du salarié et le nombre de salariés dans l’entreprise (moins de 11 ou 11 et plus).

Une cour d’appel ne peut pas débouter un salarié de ses demandes d’indemnités consécutives à son licenciement au motif que les faits qui lui étaient reprochés étaient graves, alors qu’elle avait retenu que le salarié avait été licencié verbalement (Cass. soc. 23-6-1998 n° 96-41.688).

Enfin, la Cour de cassation considère qu’en cas de licenciement verbal, le juge peut ordonner à l’employeur de délivrer la lettre de licenciement.

A titre d’exemple, une cour d’appel ne peut pas rejeter la demande de remise d’une lettre de licenciement formée par le salarié au motif que, la rupture du contrat de travail ayant été constatée, il n’y avait pas lieu d’ordonner une telle délivrance (Cass. soc. 28-2-2001 n° 98-45.667).

Le bureau de conciliation du Conseil de prud’hommes peut ordonner la remise de la lettre au salarié (Cass. soc. 4-12-1990 n° 87-44.824) comme le juge des référés, sauf en présence d’une contestation sérieuse (Cass. soc. 3-1-1990 n° 88-44.938).

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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