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Xavier Berjot

Renouvellement de l’essai et acceptation claire et non équivoque du salarié

Renouvellement de l’essai et acceptation claire et non équivoque du salarié 2560 1707 sancy-avocats.com

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Le renouvellement de la période d’essai ne peut résulter que d’un accord exprès des parties intervenu au cours de la période initiale. Un arrêt original de la Cour de cassation (Cass. soc. 25-1-2023, n° 21-13699) statue sur cette question.

1/ Rappels sur le renouvellement de la période d’essai

La période d’essai peut être renouvelée une fois si un accord de branche étendu le prévoit (C. trav. art. L. 1221-21).

Le Code du travail précise que cet accord doit alors fixer les conditions et les durées de renouvellement.

Par ailleurs, la période d’essai et la possibilité de la renouveler ne se présument pas.

Au contraire, elles doivent être expressément stipulées dans la lettre d’engagement ou le contrat de travail (C. trav. art. L. 1221-21).

Le Code du travail n’exige pas explicitement que le salarié ait formellement consenti au renouvellement de l’essai.

Pour la jurisprudence, le renouvellement de la période d’essai ne peut résulter que d’un accord exprès des parties intervenu au cours de la période initiale (Cass. soc. 24-11-1999, n° 96-40.728).

Cette solution est valable même si les dispositions conventionnelles prévoient une simple information du salarié (Cass. soc. 12-7-2010, n° 09-41.875).

Cet arrêt a été rendu au sujet de la convention collective des télécommunications (IDCC 2148) prévoyant que « le renouvellement éventuel de la période d’essai doit être notifié au salarié par écrit au plus tard avant le terme de la période initiale à l’initiative de l’une ou l’autre des parties. »

Dès lors que le renouvellement ou la prolongation de la période d’essai ne peut résulter que d’un accord exprès des parties intervenu au cours de la période initiale, celles-ci ne peuvent convenir d’un renouvellement ou d’une prolongation tacite de l’essai (Cass. soc. 16-10-2002, n° 00-45.556).

Cette notion d’accord exprès ou explicite du salarié, parfois aussi qualifié d’acceptation claire et non équivoque, a été progressivement précisée par la Cour de cassation.

2/ Notion d’acceptation claire et non équivoque

Par principe, la signature du salarié accompagnée de la mention manuscrite « lu et approuvé » sur la lettre de renouvellement permet de caractériser l’acceptation claire et non équivoque de l’intéressé (Cass. soc. 23-9-2014, n° 13-17.140).

Encore faut-il que l’accord exprès du salarié soit manifesté avant l’échéance de la période d’essai initiale (circ. DGT 2009-5 du 17-9-2009 ; Cass. soc. 11-3-2009, n° 07-44090).

Lorsqu’un salarié a été embauché avec une période d’essai renouvelable d’un commun accord, cet accord ne peut résulter de la seule poursuite du travail par l’intéressé (Cass. soc. 4-10-2000, n° 98-44.458).

L’acceptation par le salarié de la prolongation de la période d’essai ne peut donc résulter de son absence de réserve sur le contenu de la lettre l’avisant de la prolongation (Cass. soc. 5-3-1996, n° 93-40.080).

De même, ni l’émargement par le salarié de la lettre de l’employeur l’avisant de la prolongation de la période d’essai, sur laquelle le salarié avait porté la mention « reçu en main propre », ni la poursuite du travail sans protestation n’établissent l’accord de l’intéressé sur cette prolongation (Cass. soc. 19-11-1997, n° 95-42.666).

Le contrat de travail ne peut pas faire échec à cette règle, de sorte que les parties ne peuvent convenir d’un renouvellement ou d’une prolongation tacite de la période d’essai (Cass. soc. 16-10-2002, n° 00-45.556).

Comme la Cour d’appel de Versailles a pu l’exprimer, cette exigence s’impose en dépit de la force obligatoire des conventions édictée par l’article 1134 du Code civil eu égard aux règles posées par le Code du travail en matière de période d’essai, dérogatoires aux dispositions applicables en cas de licenciement (CA Versailles 14-5-2009, n° 08/01113).

L’arrêt du 23 janvier 2023 pourrait – presque – sembler revenir sur cette jurisprudence bien établie.

En l’espèce, un salarié engagé comme DRH avait, le 28 septembre 2016, apposé sa signature sur la lettre établie par la Société lui proposant le renouvellement de sa période d’essai, sans y porter d’autre mention.

Le 1er décembre 2016, la Société avait rompu la période d’essai.

Pour juger que la période d’essai avait été valablement renouvelée, la Cour d’appel de Versailles (20 janvier 2021), s’était fondée sur des emails par lesquels le DRH indiquait à des recruteurs que sa période d’essai au sein de la Société avait été prolongée et qu’il était en recherche d’emploi, ainsi que sur une attestation en ce sens d’un recruteur.

Pour la Cour de cassation, il ressortait de ces éléments que le salarié avait manifesté sa volonté de manière claire et non équivoque d’accepter le renouvellement de sa période d’essai.

L’originalité de l’arrêt réside donc dans le fait que l’acceptation exprès du salarié a été constatée sur le fondement d’éléments extérieurs à la lettre de renouvellement litigieuse.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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CSE : les élections partielles

CSE : les élections partielles 2560 1706 sancy-avocats.com

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L’élection du CSE a lieu, en principe, tous les 4 ans (C. trav. art. L. 2314-4), sous réserve d’une périodicité différente fixée par une convention ou un accord collectif. Cela étant, dans certains cas, l’employeur doit organiser un nouveau processus électoral avant le terme des mandats.

1/ Le déclenchement des élections partielles

Des élections partielles doivent être organisées à l’initiative de l’employeur (C. trav. art. L 2314-10, al. 1) :

– si un collège électoral n’est plus représenté ;

– ou si le nombre des membres titulaires de la délégation du personnel du CSE est réduit de moitié ou plus ;

– sauf si ces événements interviennent moins de 6 mois avant le terme du mandat des membres de la délégation du personnel du CSE.

Selon la Cour de cassation, l’employeur ne peut pas décider de l’organisation d’élections partielles lorsque les conditions légales ne sont pas réunies, sous peine d’annulation des élections (Cass. soc. 30-11-2011, n° 11-12.097).

En revanche, des élections partielles doivent être organisées même si la disparition du collège ou la diminution du nombre d’élus résultent de l’annulation de mandats d’élus pour non-respect des règles de mixité (Cass. soc. 22-9-2021 n° 20-16.859).

Par ailleurs, un arrêt récent (Cass. soc. 18-5-2022, n° 21-11.347) a rappelé qu’en cas de départ ou d’absence des élus titulaires, il convient d’appliquer strictement les règles de suppléance prévues à l’article L. 2314-37 du Code du travail, avant de procéder à l’organisation d’élections partielles.

Selon ce texte, lorsqu’un délégué titulaire cesse ses fonctions ou est momentanément absent pour une cause quelconque, il est remplacé :

– par un suppléant élu sur une liste présentée par la même organisation syndicale que celle de ce titulaire. La priorité est donnée au suppléant élu de la même catégorie.

– S’il n’existe pas de suppléant élu sur une liste présentée par l’organisation syndicale qui a présenté le titulaire, le remplacement est assuré par un candidat non élu présenté par la même organisation.

– Dans ce cas, le candidat retenu est celui qui vient sur la liste immédiatement après le dernier élu titulaire ou, à défaut, le dernier élu suppléant.

– A défaut, le remplacement est assuré par le suppléant élu n’appartenant pas à l’organisation du titulaire à remplacer, mais appartenant à la même catégorie et ayant obtenu le plus grand nombre de voix.

Dans tous les cas, le suppléant devient titulaire jusqu’au retour de celui qu’il remplace ou jusqu’au renouvellement du CSE.

2/ Le déroulement des élections partielles

Il appartient à l’employeur de prendre l’initiative d’organiser les élections partielles, lorsque les conditions légales sont réunies.

Les élections partielles se déroulent « dans les conditions fixées à l’article L. 2314-29 » pour pourvoir tous les sièges vacants dans les collèges intéressés, sur la base des dispositions en vigueur lors de l’élection précédente (C. trav. art. L. 2314-10).

NB. Pour rappel, l’article L. 2314-29 prévoit que le scrutin pour l’élection du CSE est de liste à deux tours avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne.

Au premier tour de scrutin, chaque liste est établie par les organisations syndicales. Si le nombre des votants est inférieur à la moitié des électeurs inscrits, il est procédé, dans un délai de 15 jours, à un second tour de scrutin pour lequel les électeurs peuvent voter pour des listes autres que celles présentées par une organisation syndicale.

Les candidats sont élus pour la durée du mandat restant à courir.

Comme une ancienne circulaire l’avait précisé, au cas où un collège électoral n’est plus représenté, les élections ont pour objet de pourvoir uniquement les sièges de titulaires et de suppléants du collège concerné (Circ. du 25-10-1983, n° 2-5-2).

En revanche, lorsque le nombre de membres titulaires est réduit de moitié ou plus, les élections doivent concerner tous les sièges vacants, titulaires et suppléants, dans les différents collèges.

L’administration a également précisé la portée des dispositions légales selon lesquelles les élections partielles se déroulent sur la base des dispositions en vigueur lors de l’élection précédente.

Pour elle, en précisant que ces élections se déroulent sur la base des dispositions en vigueur lors de l’élection précédente, le législateur a entendu signifier que seraient reprises les dispositions du protocole préélectoral (Circ. du 25-10-1983, n° 2-5-2).

Toutefois, il semble normal que la situation individuelle des salariés doive s’apprécier à la date des élections partielles, tant en ce qui concerne l’appartenance à un collège que l’électorat et l’éligibilité.

La Cour de cassation a également eu à se prononcer sur le sujet, jugeant qu’une Cour d’appel ne peut pas faire droit à la demande d’un syndicat de négocier un nouveau protocole préélectoral pour l’organisation d’élections partielles afin de modifier, compte tenu de l’évolution des effectifs, le nombre de sièges (Cass. soc. 28-2-2018, n° 17-11.848).

Plus récemment, la Cour de cassation a également affirmé que la proportion femmes-hommes fixée pour les élections initiales s’applique aux élections partielles (Cass. soc. 9-11-2022, n° 21-60.183).

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Dispense du préavis de licenciement à l’initiative du salarié : une précision importante…

Dispense du préavis de licenciement à l’initiative du salarié : une précision importante… 1920 2560 sancy-avocats.com

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Dans un arrêt du 7 décembre 2022 (n°21-16.000), la Cour de cassation considère que la renonciation à l’exécution du préavis, sollicitée par le salarié avant la notification du licenciement, n’est pas valable.

1/ Rappels sur la dispense de préavis à l’initiative du salarié

Contrairement à l’employeur, le salarié ne peut pas choisir unilatéralement de ne pas exécuter son préavis de licenciement.

Certaines conventions collectives prévoient, cependant, que le salarié ayant retrouvé un emploi peut ne pas accomplir tout ou partie du préavis restant à courir.

Ainsi, l’article 17 de la convention collective des bureaux d’études techniques et cabinets d’ingénieurs-conseils (dite « Syntec ») dispose qu’en « cas de licenciement, le salarié pourra quitter son emploi dès qu’il sera pourvu d’une nouvelle place. Dans ce cas, il n’aura droit, indépendamment de l’indemnité éventuelle de licenciement, qu’à la rémunération correspondant à la durée de la période de préavis effectivement travaillée. »

D’autres conventions collectives sont plus restrictives et énoncent que le salarié doit obtenir l’accord de l’employeur pour pouvoir quitter l’entreprise avant l’expiration du préavis (ex. article IV. 1.1. de la convention collective des entreprises d’architectures).

En tout état de cause, l’intention du salarié de ne pas exécuter son préavis doit être claire et non équivoque, à défaut de quoi une indemnité compensatrice est due par l’employeur (Cass. soc. 18-6-2002, n° 00-43.013).

2/ Effets de la dispense de préavis à l’initiative du salarié

Le salarié dispensé de l’exécution de son préavis, à sa demande, ne perçoit pas l’indemnité compensatrice correspondante.

La jurisprudence exige cependant que sa volonté de renoncer à poursuivre l’exécution du préavis ne soit pas équivoque (Cass. soc. 3-10-1995 n° 92-41.308).

Rappelons que le salarié refusant d’exécuter son préavis, alors que l’employeur ne l’en a pas dispensé, peut être condamné à verser à ce dernier une indemnité compensatrice de préavis (Cass. soc. 26-3-2002, n° 00-40.321).

Enfin, à l’instar de la dispense de préavis par l’employeur, la dispense de préavis à l’initiative du salarié n’a pas pour conséquence d’avancer la date à laquelle le contrat prend fin.

Seul un accord des parties peut permettre de rompre le contrat de manière anticipée (Cass. soc. 19-6-1987, n° 84-45.616).

Dans l’arrêt du 7 décembre 2022, une salariée faisait l’objet d’un licenciement collectif pour motif économique.

Antérieurement à la notification de son licenciement, elle avait demandé à l’employeur de ne pas effectuer son préavis, ayant déjà obtenu une proposition d’embauche.

L’employeur a accédé à sa demande mais, dans le cadre du litige postérieur entre les parties, a été condamné à verser une indemnité compensatrice de préavis à la salariée, par arrêt de la Cour d’appel de Paris du 10 mars 2021.

La Cour de cassation approuve la Cour d’appel de Paris et rejette le pouvoir de l’employeur, après un raisonnement en trois temps :

– Il résulte de l’article L. 1234-1 du Code du travail, qu’en cas d’inexécution par le salarié du préavis, l’employeur n’est tenu au paiement d’une indemnité compensatrice que lorsqu’il a unilatéralement décidé de dispenser le salarié d’exécuter sa prestation de travail ou lorsque cette inexécution lui est imputable.

– Selon l’article L. 1231-4 du même code, l’employeur et le salarié ne peuvent renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles du licenciement.

– La Cour d’appel, qui a constaté que la salariée avait renoncé le 21 avril 2016 à l’exécution du préavis, a exactement retenu que cette renonciation n’était pas valable comme intervenue avant la notification de son licenciement le 27 mai 2016, peu important la communication d’un plan de mobilité professionnelle avant cette date.

 

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Inaptitude : la loyauté de l’employeur ne se retourne pas contre lui

Inaptitude : la loyauté de l’employeur ne se retourne pas contre lui 2560 1709 sancy-avocats.com

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L’obligation de reclassement qui pèse sur l’employeur préalablement à un licenciement pour inaptitude ne s’étend pas à d’autres entreprises qui ne relèvent pas d’un même groupe, rappelle la Cour de cassation (Cass. soc. 16-11-2022, n° 21-12.809). Les faits de cette affaire sont intéressants.

1/ Le groupe constitue le périmètre du reclassement

Lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur doit lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, « au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel » (C. trav. art. L. 1226-2 : inaptitude non-professionnelle ; L. 1226-10 : inaptitude professionnelle).

Les ordonnances n° 2017-87 du 22 septembre 2017 et n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 ont clarifié la notion de groupe, qui était auparavant déterminée par la jurisprudence.

La Cour de cassation considérait en effet que, si l’entreprise appartient à un groupe, l’employeur est tenu d’effectuer cette recherche parmi les entreprises du groupe dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation lui permettent d’effectuer la mutation de tout ou partie du personnel (Cass. soc. 10-3-2004, n° 03-42744).

Ainsi, la recherche de reclassement devait être menée au sein d’un réseau de franchises (Cass. soc. 10-1-2014, n° 13-18679), d’un groupement économique et social (Cass. soc. 25-11-2015, n° 14-17995) ou, encore, d’une fédération d’associations (Cass. soc. 6-1-2010, n° 08-44113).

Les textes précisent désormais que la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du Code de commerce.

Il convient de préciser que la recherche de reclassement est limitée aux entreprises du groupe situées sur le seul territoire national (C. trav. art. L. 1226-2 et L. 1226-10).

Dans son arrêt du 16 novembre 2022, la Cour de cassation pose pour principe que la recherche de reclassement doit s’effectuer au sein de l’entreprise et, le cas échéant, à l’intérieur du groupe auquel appartient l’employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

Elle ajoute que l’obligation de reclassement qui pèse sur l’employeur préalablement à un licenciement pour inaptitude ne s’étend pas à d’autres entreprises qui ne relèvent pas d’un même groupe.

Les faits étaient antérieurs aux ordonnances n° 2017-87 du 22 septembre 2017 et n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 mais ce n’est pas la notion de groupe qui constitue l’originalité de l’arrêt.

2/ L’extension du périmètre par l’employeur ne peut pas se retourner contre lui

Dans cette affaire, un salarié exerce les fonctions de Monteur et Technicien avant d’être déclaré inapte à son poste par le médecin du travail.

L’employeur recherche le reclassement du salarié au sein du groupe mais aussi d’entreprises extérieures avec lesquelles sa société est en relation d’affaires.

Finalement licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement, le salarié saisit la juridiction prud’homale de diverses demandes relatives à l’exécution et à la rupture de son contrat de travail.

La Cour d’appel lui donne gain de cause, retenant que l’employeur a pris l’initiative de rechercher des postes auprès de sociétés extérieures au groupe sans qu’il ne propose au salarié les postes disponibles au sein de celles-ci.

Pour les juges, cette omission caractérise un défaut de loyauté dans la recherche d’un poste de reclassement.

En d’autres termes, l’employeur, qui avait cru bien faire en étendant le périmètre de reclassement au-delà du groupe, s’est retrouvé pris au piège de sa propre démarche.

Heureusement pour l’employeur, la Cour de cassation a clos le débat en rappelant que le reclassement ne s’étend pas au-delà du groupe.

L’arrêt ne se prononce même pas sur la question du défaut de loyauté allégué à l’encontre de l’employeur.

Cette décision invite les employeurs à s’en tenir à un cadre strictement légal, sous peine de courir un risque judiciaire, au moins devant les juges du fond.

 

Xavier Berjot
Avocat associé
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Temps de déplacement des salariés itinérants : revirement de la Cour de cassation

Temps de déplacement des salariés itinérants : revirement de la Cour de cassation 2560 1707 sancy-avocats.com

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Dans un arrêt important (Cass. soc. 23-11-2022, n° 20-21.924), la Cour de cassation considère désormais que lorsque les temps de déplacements accomplis par un salarié itinérant entre son domicile et les sites des premier et dernier clients répondent à la définition du temps de travail effectif, le régime des temps de déplacement doit être écarté.

1/ Rappel des principes applicables aux temps de déplacement

Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif (C. trav. art. L. 3121-4).

Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière.

En tout état de cause, la part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail ne doit entraîner aucune perte de salaire.

1.1. Déplacements domicile / lieu habituel de travail

Le temps de trajet entre le domicile et le lieu « habituel » de travail ne constitue pas, en soi, un temps de travail effectif (Cass. soc. 13-1-2006, n° 04-45.542).

Il en résulte que ce temps n’entre pas en compte dans le calcul de la durée du travail, et n’a pas à être rémunéré ou indemnisé.

Il en va de même du trajet retour du salarié, c’est-à-dire de son lieu de travail à son domicile.

Par exception, le temps de déplacement accompli lors de périodes d’astreinte fait partie intégrante de l’intervention elle-même, et doit donc être décompté et rémunéré comme du temps de travail effectif (Cass. soc. 31-10-2007, n° 06-43.834).

1.2. Déplacements domicile / lieu d’exécution du contrat de travail

L’article L. 3121-4 du Code du travail vise le déplacement professionnel vers un lieu qui n’est pas le lieu de travail « habituel » du salarié.

Dans un tel cas, sous réserve de dispositions conventionnelles ou d’usages plus favorables :

– Ce temps de déplacement n’entre pas dans le décompte de la durée du travail, en particulier pour l’application de la législation sur les heures supplémentaires (majorations, contingent annuel et contrepartie obligatoire en repos) ;

– Il n’a pas à être rémunéré, sauf s’il coïncide avec l’horaire de travail ;

– Dans l’hypothèse où il excède le « temps normal de trajet » entre le domicile et le lieu « habituel » de travail, seule une contrepartie sous forme de repos ou sous forme financière (ex. une indemnité de trajet) doit être prévue.

Les contreparties sont déterminées par accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par accord de branche.

À défaut d’accord, l’employeur les définit unilatéralement, après consultation du CSE (C. trav. art. L. 3121-7 et L. 3121-8).

2/ Problématiques liées aux salariés itinérants

Pour les salariés itinérants (chauffeurs, livreurs, techniciens de maintenance, etc.), qui n’ont pas de lieu de travail habituel, la question se pose de savoir ce qu’il faut entendre par « temps normal de trajet. »

Pour la Cour de cassation (Cass. soc. 22-6-2011, n° 10-12.920), le « temps normal de trajet » se détermine par référence à celui d’un travailleur type se rendant de son domicile à son lieu de travail habituel.

Un arrêt du 7 mai 2008 avait précisé que le temps normal de trajet s’apprécie « dans la région concernée » (Cass. soc. 7-5-2008, n° 07-42.702).

Dans une décision plus récente (Cass. soc. 30-5-2018, n° 16-20.634), la Cour de cassation avait indiqué que, pour les salariés itinérants, le temps de déplacement quotidien entre le domicile et les sites du premier et du dernier client doit faire l’objet d’une contrepartie quand il dépasse un trajet normal (Cass. soc. 30-5-2018, n° 16-20.634).

Ce temps n’était donc pas qualifié de temps de travail effectif.

3/ Nouvelle position de Cour de cassation

Dans son arrêt du 23 novembre 2022, la chambre sociale invoque le droit communautaire pour revoir sa position sur l’indemnisation des temps de déplacement.

Plus précisément, la Cour rappelle que, dans un arrêt du 9 mars 2021 (Radiotelevizija Slovenija, C-344/19), la CJUE a jugé que les États membres ne sauraient déterminer unilatéralement la portée des notions de “temps de travail” et de “période de repos”, en subordonnant à quelque condition ou restriction que ce soit le droit, reconnu directement aux travailleurs par la directive 2003/88/CE, à ce que les périodes de travail et, corrélativement, celles de repos soient dûment prises en compte.

Ainsi, pour la Cour de cassation, « eu égard à l’obligation d’interprétation des articles L. 3121-1 et L. 3121-4 du code du travail à la lumière de la directive 2003/88/CE, il y a donc lieu de juger désormais que, lorsque les temps de déplacements accomplis par un salarié itinérant entre son domicile et les sites des premier et dernier clients répondent à la définition du temps de travail effectif telle qu’elle est fixée par l’article L. 3121-1 du code du travail, ces temps ne relèvent pas du champ d’application de l’article L. 3121-4 du même code. »

Dans cette affaire, un attaché commercial devait, en conduisant pendant ses déplacements, grâce à un kit main libre dans son véhicule, fixer des rendez-vous, appeler et répondre à ses divers interlocuteurs (clients, directeur commercial, assistantes et techniciens).

Ce salarié itinérant ne se rendait que de façon occasionnelle au siège de l’entreprise et disposait d’un véhicule de société pour intervenir auprès de ses clients répartis sur 7 départements éloignés de son domicile, ce qui le conduisait, parfois, à la fin d’une journée de déplacement professionnel, à réserver une chambre d’hôtel afin de pourvoir reprendre, le lendemain, le cours des visites programmées.

En conclusion, les déplacements de ce salarié constituaient du temps de travail effectif au sens de l’article L. 3121-1 du Code du travail.

Xavier Berjot
Avocat associé
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Astreinte et temps de travail effectif : nouvelles frontières

Astreinte et temps de travail effectif : nouvelles frontières 2560 1440 sancy-avocats.com

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En application du droit communautaire, la Cour de cassation clarifie le champ d’application de l’astreinte (Cass. soc. 26-10-2022, n° 21-14.178). Sans revenir sur sa définition, la chambre sociale fixe un critère de distinction entre astreinte et temps de travail effectif.

1/ Définition de l’astreinte

Une période d’astreinte s’entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, doit être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise (C. trav. art. L 3121-9).

L’astreinte correspond donc à un temps pendant lequel le salarié, qui n’exerce aucune activité effective pour l’employeur, doit néanmoins se tenir à sa disposition pour effectuer une éventuelle intervention.

Quant à la durée du travail effectif, celle-ci est définie par le Code du travail comme le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles (C. trav. art. L. 3121-1).

La distinction entre l’astreinte et le temps de travail effectif est fondamentale puisque le régime juridique de ces deux notions diffère radicalement.

En effet, la période d’astreinte fait l’objet d’une contrepartie, soit sous forme financière, soit sous forme de repos et seule la durée de l’intervention du salarié est considérée comme un temps de travail effectif (C. trav. art. L. 3121-9).

Les contreparties des astreintes sont fixées (C. trav. art. L. 3121-11 et L. 3121-12, 1°) :

–  soit par convention ou accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, de branche ;

– soit, à défaut d’accord, par l’employeur après avis du CSE et information de l’agent de contrôle de l’inspection du travail.

Dans tous les cas, les salariés concernés par des périodes d’astreinte doivent être informés de leur programmation individuelle dans un délai raisonnable.

2/ Requalification de l’astreinte

La jurisprudence refuse de considérer comme périodes d’astreinte les temps pendant lesquels le salarié n’est pas libre de vaquer à ses occupations personnelles.

A titre d’exemple, constituent un temps de travail effectif les heures d’astreinte effectuées sur le lieu du travail par les veilleurs de nuit d’une maison de retraite et durant lesquelles les intéressés doivent rester en permanence à la disposition de l’employeur (Cass. soc. 15-2-1995, n° 91-41.025).

De même, ayant constaté que, compte tenu de l’obligation pour l’employeur d’assurer une permanence téléphonique continue de sécurité 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, le salarié exerçait le soir et la nuit les fonctions attribuées pendant la journée à un autre membre du personnel spécialement affecté à la réception des appels d’urgence, une Cour d’appel a caractérisé l’exercice d’un travail effectif (Cass. soc. 9-11-2010, n° 08-40.535).

A l’inverse, correspondent à une astreinte les permanences de nuit assurées par le salarié d’un hôtel, tenu de rester sur son lieu de travail afin d’intervenir en cas de nécessité mais bénéficiant d’un logement de fonction lui permettant de vaquer à des occupations personnelles (Cass. soc. 27-6-2012, n° 11-13.342).

Dans l’arrêt du 26 octobre 2022, la Cour de cassation considère que constituent du temps de travail effectif les permanences au cours desquelles le salarié est soumis à des contraintes d’une intensité telle « qu’elles affectent, objectivement et très significativement, sa faculté de gérer librement le temps pendant lequel ses services professionnels ne sont pas sollicités et de vaquer à des occupations personnelles. »

L’affaire concernait un salarié occupant le poste de dépanneur dans une entreprise dont l’activité consiste à assurer le dépannage de véhicules sur une portion d’autoroute, 24 heures sur 24.

Au soutien de sa décision, la Cour de cassation invoque un arrêt de la CJUE du 9 mars 2021 ayant introduit la distinction suivante (CJUE 9-3-2021, C-344/19) :

– Relève de la notion de “temps de travail effectif”, au sens de la directive 2003/88, l’intégralité des périodes de garde, y compris celles sous régime d’astreinte, au cours desquelles les contraintes imposées au travailleur sont d’une nature telle qu’elles affectent objectivement et très significativement la faculté, pour ce dernier, de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel ses services professionnels ne sont pas sollicités et de consacrer ce temps à ses propres intérêts ;

– Inversement, lorsque les contraintes imposées au travailleur au cours d’une période de garde déterminée n’atteignent pas un tel degré d’intensité et lui permettent de gérer son temps et de se consacrer à ses propres intérêts sans contraintes majeures, seul le temps lié à la prestation de travail qui est, le cas échéant, effectivement réalisée au cours d’une telle période constitue du “temps de travail”, aux fins de l’application de la directive 2003/88.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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L’élection des délégués du CSE central : l’essentiel

L’élection des délégués du CSE central : l’essentiel 1440 2560 sancy-avocats.com

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Contrairement aux membres du CSE, les délégués du CSE central ne sont pas élus par les salariés. Ils sont désignés, pour chaque établissement, par le CSE d’établissement parmi ses membres. Le processus est essentiellement jurisprudentiel.

1/ Composition du CSE central

Par principe, le CSE central exerce les attributions qui concernent la marche générale de l’entreprise et qui excèdent les limites des pouvoirs des chefs d’établissement (C. trav. art. L. 2316-1).

Le CSE central est composé (C. trav. art. L. 2316-4) :

– De l’employeur ou de son représentant ;

– D’un nombre égal de délégués titulaires et de suppléants, élus, pour chaque établissement, par le CSE d’établissement parmi ses membres.

– De certains acteurs à titre consultatif, comme le médecin du travail ou l’inspecteur du travail.

L’élection du CSE central a lieu tous les 4 ans, après l’élection générale des membres des CSE d’établissement (C. trav. art. L. 2316-10).

2/ Nombre de sièges à pourvoir

Le nombre des membres titulaires du CSE central est égal à celui des suppléants (C. trav. art. L. 2316-4).

Sauf accord conclu entre l’employeur et l’ensemble des organisations syndicales représentatives (C. trav. art. R. 2316-1) :

– Le nombre des membres du CSE central ne peut pas dépasser 25 titulaires et 25 suppléants ;

– Chaque établissement peut être représenté au CSE central soit par un seul délégué, titulaire ou suppléant, soit par un ou deux délégués titulaires et un ou deux délégués suppléants.

3/ Répartition des sièges entre les établissements et les collèges

Dans chaque entreprise, la répartition des sièges entre les différents établissements et les différents collèges fait l’objet d’un accord entre l’employeur et les organisations syndicales intéressées, conclu « selon les conditions de l’article L. 2314-6 du Code du travail » (C. trav. art. L 2316-8, al. 1).

Il s’agit donc des mêmes organisations syndicales que celles qui ont vocation à négocier un protocole préélectoral.

En cas de désaccord sur la répartition des sièges, la DREETS dans le ressort de laquelle se trouve le siège de l’entreprise décide de la répartition des sièges entre les différents établissements et les différents collèges (C. trav. art. L. 2316-8 ; art. R. 2316-2).

NB. Même si elles interviennent alors que le mandat de certains membres n’est pas expiré, la détermination du nombre d’établissements distincts et la répartition des sièges entre les établissements et les différentes catégories sont appliquées sans qu’il y ait lieu d’attendre la date normale de renouvellement de toutes les délégations des CSE d’établissement ou de certaines d’entre elles.

 La saisine de la DREETS suspend le processus électoral jusqu’à la décision administrative et entraîne la prorogation des mandats des élus en cours jusqu’à la proclamation des résultats du scrutin.

4/ Spécificités liées aux collèges cadres

Lorsqu’un ou plusieurs établissements de l’entreprise constituent 3 collèges électoraux en application de l’article L. 2314-11 du Code du travail (collèges « cadres »), un délégué titulaire et un délégué suppléant au moins au CSE central doivent appartenir à la catégorie des ingénieurs, chefs de service et cadres administratifs, commerciaux ou techniques assimilés sur le plan de la classification (C. trav. art. L. 2316-5).

Par ailleurs, lorsqu’aucun établissement de l’entreprise ne constitue 3 collèges électoraux mais que plusieurs établissements distincts groupent ensemble au moins 501 salariés ou au moins 25 membres du personnel appartenant à la catégorie des ingénieurs, chefs de service et cadres administratifs, commerciaux ou techniques assimilés sur le plan de la classification, au moins un délégué titulaire au CSE central doit appartenir à cette catégorie (C. trav. art. L. 2316-6).

5/ Electorat et éligibilité

Il résulte de l’article L. 2316-4 du Code du travail que les délégués au CSE central sont élus, pour chaque établissement, par le CSE d’établissement.

Pour la Cour de cassation, les élus titulaires disposent du droit de vote, à l’exclusion des membres suppléants (Cass. soc. 27-11-1975, n° 75-60.135) et des présidents de chaque CSE d’établissement (Cass. soc. 21-7-1976, n° 76-60.072).

Les titulaires aux CSE d’établissement sont éligibles au CSE central en qualité de titulaires ou suppléants, alors que les suppléants peuvent exclusivement y être élus suppléants (Cass. soc. 3-6-1977, n° 77-60.024).

Enfin, les représentants syndicaux aux CSE d’établissement ne peuvent pas être élus au CSE central (Cass. soc. 4-6-2003, n° 01-60.909).

6/ Scrutin et déroulement du vote

En l’absence d’accord unanime du collège électoral, l’élection des délégués au CSE central s’effectue au scrutin uninominal majoritaire à un tour (Cass. soc. 9-6-1998, n° 96-60.455).

Les partenaires sociaux peuvent cependant retenir d’autres modalités, comme un scrutin de liste à un tour avec représentation proportionnelle en fonction du total des voix obtenues par chaque liste.

L’élection a lieu au scrutin secret sous enveloppe (Cass. soc. 9-6-1998, n° 97-60.304) et, sauf accord contraire, il est procédé aux élections par un vote global, toutes catégories confondues, et non par collège (Cass. soc. 21-7-1976, n° 76-60.030).

L’élection est soumise à la règle de la majorité des voix exprimées et, en cas de partage des voix, le plus âgé des candidats est proclamé élu (Cass. soc. 9-6-1998, n° 97-60.304).

Bien que la pratique soit courante, aucun texte n’impose la rédaction d’un procès-verbal à l’issue de l’élection des représentants au CSE central (Cass. soc. 16-2-2001, n° 10-21.039).

La proclamation des résultats peut résulter, par exemple, de l’envoi d’un email à tous les salariés et à l’inspecteur du travail, les informant du nom des élus.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Temps partiel : comment modifier les horaires ?

Temps partiel : comment modifier les horaires ? 1707 2560 sancy-avocats.com

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Les horaires du salarié à temps partiel doivent être précisés au contrat, afin notamment de permettre à l’intéressé de cumuler plusieurs emplois. Les changements de planning sont possibles, mais sous certaines conditions et limites. A défaut, les sanctions peuvent être lourdes.

1/ La précision des horaires

Le contrat de travail du salarié à temps partiel doit mentionner (C. trav. art. L. 3123-6) :

– La durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;

– Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;

– Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié.

– Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.

Des particularités doivent être signalées s’agissant des salariés des associations et entreprises d’aide à domicile.

Pour ces derniers, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois n’a pas à être prévue au contrat et les horaires de travail doivent leur être communiqués par écrit chaque mois.

Enfin, les salariés relevant d’un accord d’entreprise instituant un dispositif d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine peuvent être soumis à des règles différentes (C. trav. art. L. 3121-44).

2/ Les possibilités de modification des horaires

L’employeur peut modifier la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, en respectant un délai de prévenance d’au moins 7 jours ouvrés (C. trav. art. L. 3123-31).

Toutefois, un accord d’entreprise ou une convention collective peut déterminer le délai dans lequel la modification de la répartition de la durée du travail est notifiée au salarié (C. trav. art. L. 3123-24).

Ce délai ne peut alors être inférieur à 3 jours ouvrés, étant précisé que l’accord ou la convention doit déterminer les contreparties apportées au salarié lorsque le délai de prévenance est inférieur à 7 jours ouvrés.

Le choix des contreparties est laissé à l’appréciation des signataires de l’accord et peut porter notamment sur la fixation d’une durée minimale de travail sur la semaine ou sur le mois (Circ. 2000-03 du 3-3-2000 fiche 12).

Précisons que, dans les associations et entreprises d’aide à domicile, le délai de prévenance peut même être inférieur à 3 jours pour les cas d’urgence définis par convention ou accord de branche étendu ou par convention ou accord d’entreprise ou d’établissement.

Dans tous les cas, le non-respect du délai de prévenance, par l’employeur, entraîne la requalification du contrat de travail du salarié à temps partiel en contrat à temps plein en cas de changements incessants de ses horaires de travail (Cass. soc. 27-3-2019 16-28.774).

En revanche, un unique changement d’horaire sans respect du délai n’entraîne pas la requalification à temps plein (Cass. soc. 27-3-2019 n° 17-21.543).

En tout état de cause, le délai de prévenance n’est applicable qu’en cas de décision unilatérale de l’employeur et non lorsque la modification intervient avec l’accord exprès du salarié (Cass. soc. 9-11-2016 n° 15-19.401).

La Cour de cassation vient de rappeler ces règles dans un arrêt du 26 octobre 2022 (Cass. soc. 26-10-2022 n° 21-15538), censurant une Cour d’appel ayant débouté un salarié de sa demande de requalification, et retenant les motifs suivants :

« En se déterminant ainsi, alors que le délai de prévenance est applicable en cas de décision unilatérale de l’employeur, la cour d’appel, qui n’a pas recherché si les variations auxquelles était soumis le planning de la salariée étaient notifiées à celle-ci dans un délai de prévenance suffisant ou si elles intervenaient avec son accord exprès, n’a pas donné de base légale à sa décision. »

3/ L’hypothèse du refus du salarié

Lorsque l’employeur demande au salarié de modifier la répartition de sa durée du travail dans un des cas et selon des modalités préalablement définis dans le contrat de travail, le refus du salarié d’accepter cette modification ne constitue ni une faute ni un motif de licenciement dès lors que cette modification n’est pas compatible avec (C. trav. art. L 3123-12, al. 2) :

–  des obligations familiales impérieuses ;

–  le suivi d’un enseignement scolaire ou supérieur ;

–  l’accomplissement d’une période d’activité fixée par un autre employeur ;

–  ou une activité professionnelle non salariée.

A titre d’exemple, le licenciement d’un salarié à temps partiel motivé par son refus d’une modification de la répartition de sa durée du travail entre les jours de la semaine est abusif dès lors que la modification proposée par l’employeur est incompatible avec son activité chez un autre employeur (Cass. soc. 28-9-2011 n° 09-70.329).

Par ailleurs, les obligations familiales impérieuses peuvent constituer des événements tels que   la nécessité d’assurer l’assistance à un membre de la famille gravement malade ou dépendant ou, encore, d’assurer la garde d’enfants, pour un parent isolé (Circ. 2000-03 du 3-3-2000 fiche 12).

Enfin, lorsque l’employeur demande au salarié de modifier la répartition de sa durée du travail, alors que le contrat de travail n’a pas prévu les cas et la nature de telles modifications, le refus du salarié d’accepter cette modification ne constitue ni une faute ni un motif de licenciement (C. trav. art. L. 3123-12, al. 1).

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Harcèlement moral : protection et mauvaise foi

Harcèlement moral : protection et mauvaise foi 1707 2560 sancy-avocats.com

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Les victimes et témoins de faits allégués de harcèlement moral bénéficient d’une protection légale. Toutefois, celle-ci ne joue pas en cas de mauvaise foi du dénonciateur. Un arrêt récent (Cass. soc. 19-10-2022, n° 21-19449) rappelle comment comprendre cette notion.

 1/ Le régime de protection

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (C. trav. art. L. 1152-1).

En complément de ce texte, le Code du travail prévoit qu’aucune personne ayant subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou ayant, de bonne foi, relaté ou témoigné de tels agissements ne peut faire d’une sanction, d’un licenciement ou, encore, d’une mesure discriminatoire (C. trav. art. L. 1152-2).

Le dispositif protecteur prévoit, enfin, que « toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul. »

A titre d’exemple, est nul le licenciement s’inscrivant dans le contexte d’agissements de harcèlement moral subis par le salarié et motivé par une faute grave artificiellement invoquée, dans le seul but de faire échec à la prohibition de la rupture du contrat de travail par l’employeur au cours d’une période de suspension du contrat de travail (Cass. soc. 11-2-2015 n° 13-26.198).

De même, une Cour d’appel annule, à bon droit, un licenciement après avoir constaté que le harcèlement moral était caractérisé et que le comportement reproché au salarié était une réaction aux agissements dont il avait été victime (Cass. soc. 29-6-2011 n° 09-69.444).

Le Code du travail prévoit que la protection légale joue en cas de bonne foi mais n’explicite pas ce qu’il faut entendre, à l’inverse, en cas de mauvaise foi.

La jurisprudence de la Cour de cassation a donc été conduite à statuer sur le sujet.

2/ L’exception de mauvaise foi

Par principe, le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut pas être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut pas résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis (Cass. soc. 10-3-2009 n° 07-44.092).

L’arrêt du 19 octobre 2022 rappelle cette solution, censurant une Cour d’appel ayant refusé d’annuler un licenciement, alors qu’il ressortait de ses constatations que le salarié, dont la mauvaise foi n’était pas alléguée, avait été licencié pour avoir relaté des faits de harcèlement auprès de la société avec laquelle son employeur avait conclu un contrat de location-gérance.

Le salarié bénéficie donc de la protection légale si les fais de harcèlement moral n’ont pas été prouvés, c’est-à-dire, concrètement, même en l’absence de harcèlement moral.

Pour autant, la protection n’est pas absolue et n’est pas accordée au salarié ayant connaissance du caractère fallacieux des faits qu’il dénonce ou prétend avoir subi.

A titre d’illustration, constitue une faute grave le fait, pour un salarié, de dénoncer de façon mensongère des faits inexistants de harcèlement moral dans le but de déstabiliser l’entreprise et de se débarrasser de son supérieur hiérarchique (Cass. soc. 6-6-2012 n° 10-28.345).

Dans le même sens, est justifié le licenciement d’un salarié ayant invoqué un harcèlement moral de mauvaise foi, alors qu’il refusait de rendre des comptes à sa hiérarchie, faisait preuve d’un comportement insolent, et entretenait une attitude de dénigrement envers l’entreprise (Cass. soc. 7-5-2014 n° 13-14.344).

Dans certains cas, la mauvaise foi peut conduire au licenciement pour faute lourde du salarié.

Ainsi, une faute lourde doit être retenue contre une salariée ayant déposé, contre son employeur, une plainte mensongère pour harcèlement, avec l’intention de lui nuire car il avait refusé de falsifier ses bulletins de paie (CA Montpellier 25-9-2001 n° 00-100).

La mauvaise foi peut être alléguée par l’employeur devant le Conseil de prud’hommes, sans nécessairement avoir été mentionnée dans la lettre de licenciement (Cass. soc. 16-9-2020 n° 18-26.696).

En conclusion, précisons que la protection légale est également offerte en cas de harcèlement moral sauf, ici encore, en cas de mauvaise foi du dénonciateur.

 

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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Nullité du licenciement et pluralité de motifs

Nullité du licenciement et pluralité de motifs 1707 2560 sancy-avocats.com

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Le Code du travail prévoit que, lorsque l’un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité du licenciement ne dispense pas le juge d’examiner les autres griefs, pour en tenir compte dans l’évaluation de l’indemnité à allouer au salarié. La Cour de cassation (Cass. soc. 19-10-2022, n° 21-15533) vient de se prononcer sur le dispositif.

1/ Le dispositif de l’article L. 1235-2-1 du Code du travail 

Selon l’article L. 1235-2-1 du Code du travail :

– « En cas de pluralité de motifs de licenciement, si l’un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité encourue de la rupture ne dispense pas le juge d’examiner l’ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le cas échéant, dans l’évaluation qu’il fait de l’indemnité à allouer au salarié, sans préjudice des dispositions de l’article L. 1235-3-1. »

Ce dispositif, créé par l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, permet à l’employeur de solliciter du juge qu’il minore l’indemnité allouée au salarié, lorsque le licenciement est déclaré nul mais que d’autres motifs peuvent être retenus à l’encontre du salarié.

Cette minoration ne peut cependant pas conduire le juge à condamner l’employeur à verser au salarié une indemnité inférieure à 6 mois de salaire.

En effet, l’article L. 1235-3-1 du Code du travail prévoit qu’en cas de nullité du licenciement, le juge octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, « qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. »

2/ La précision de la Cour de cassation

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 19 octobre 2022, une salariée avait été licenciée « pour cause réelle et sérieuse », après avoir saisi le Conseil de prud’hommes afin de voir prononcer la résiliation de son contrat de travail et l’annulation d’un avertissement.

Le licenciement de la salariée avait été annulé par les juges du fond, au motif que l’employeur reprochait à celle-ci, notamment, d’avoir saisi la juridiction prud’homale d’une demande en résiliation de son contrat de travail, ce grief étant constitutif d’une atteinte à une liberté fondamentale.

NB. En effet, il est de jurisprudence constante qu’est nul le licenciement d’un salarié motivé par sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail (Cass. soc. 3-2-2016, n° 14-18.600), par sa menace d’introduire une action en justice (Cass. soc. 21-11-2018, n° 17-11.122) ou, encore, par son dépôt d’une plainte pénale à l’encontre de l’employeur (Cass. soc. 28-4-2011, n° 10-30.107). 

L’intérêt de l’arrêt réside dans le fait que l’employeur reprochait à la Cour d’appel de n’avoir pas tenu compte des autres griefs à l’encontre de la salariée, afin de limiter son indemnisation.

Pour l’employeur, « il revenait à la cour d’étudier ces éléments pour évaluer l’indemnité allouée à la salariée. »

Le pourvoi de ce dernier est rejeté par la Cour de cassation, aux motifs suivants :

– En cas de pluralité de motifs de licenciement, si l’un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité encourue de la rupture ne dispense pas le juge d’examiner l’ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le cas échéant, dans l’évaluation qu’il fait de l’indemnité à allouer au salarié.

– Ces dispositions offrent ainsi à l’employeur un moyen de défense au fond sur le montant de l’indemnité à laquelle il peut être condamné, devant être soumis au débat contradictoire.

– Il en résulte que, lorsque l’employeur le lui demande, le juge examine si les autres motifs invoqués sont fondés et peut, le cas échéant, en tenir compte pour fixer le montant de l’indemnité versée au salarié qui n’est pas réintégré, dans le respect du plancher de 6 mois prévu par l’article L. 1235-3-1.

– Après avoir retenu que l’un des griefs invoqués par l’employeur portait atteinte à la liberté fondamentale de la salariée d’agir en justice et constaté que l’employeur ne critiquait pas à titre subsidiaire la somme réclamée par cette dernière en conséquence de la nullité du licenciement, la cour d’appel a apprécié souverainement le montant du préjudice.

En définitive, il appartient à l’employeur, qui se prévaut de l’article L. 1235-2-1 du Code du travail, d’en invoquer les dispositions.

Il s’agit en effet d’un moyen de défense devant être soulevé et soumis au principe du contradictoire.

3/ La fin de la théorie du « motif contaminant » ?

En principe, en cas de litige relatif à un licenciement, le juge doit examiner tous les motifs invoqués par l’employeur, qui fixent tous la limite du litige (Cass. soc. 5-7-2000, n° 98-43.521).

Il en résulte que, si certains motifs sont écartés, d’autres peuvent, le cas échéant, légitimer le licenciement.

Par exception, en cas de nullité du licenciement, le caractère illicite du motif de la rupture dispense le juge d’examiner les autres griefs invoqués par l’employeur, même s’ils auraient été susceptibles de constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Le motif est entaché d’une telle illicéité qu’il contamine – ou pollue – l’intégralité de la lettre de licenciement.

Tel est le cas en matière de harcèlement moral (Cass. soc. 13-2-2013, n° 11-28.339) ou en cas de violation du droit du salarié d’exercer une action en justice (Cass. soc. 3-2-2016, n° 14-18.600).

La Cour de cassation a récemment fait application de ce principe en présence d’un licenciement prononcé par l’employeur pour un motif lié à l’exercice non abusif par le salarié de sa liberté d’expression (Cass. soc. 29-62022, n°20-16.060).

Il convient cependant de noter que l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 n’était pas applicable aux faits ayant conduit à cet arrêt.

 

Or, depuis l’entrée en vigueur de ce texte, le Code du travail permet désormais de tenir compte des autres motifs de licenciement, même en présence d’un cas de nullité.

Xavier Berjot
Avocat associé
xberjot@sancy-avocats.com

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